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PIERRE VIAL LESOU ET CES MESSIEURS DE LA MAFIA...

JE VOUS SALUE MAFIA, PIERRE VIAL
DEUX MAFIOSI, PIERRE VIAL
FLEUVE NOIR SPÉCIAL-POLICE # 414 & 528, 1964 / 1966

Comme Auguste Le Breton, Ange Bastiani, Albert Simonin et quelques autres, Pierre Lesou, dit Pierre Vial, dit Pierre Vial Lesou, a toujours été associé au roman noir de truands, sous-genre majeur des années 1950 à 1970, lancé au double son de cloche d'une Série Noire dopée par des Rififi et des Grisbi tonitruants - soit du baston et de l'oseille, de la castagne et du flouse, du rebecca et de la maille dans la France interlope de l'après-guerre.
Dans ces romans, on pouvait lire les destins d'honorables malfaiteurs qui, inspirés par les actes de bravoures d'un Jo Attia ou d'un Pierre Loutrel, se lançaient à l'assaut du pèze des cavedus et des gagneuses du prochain.
Ça se flinguait et ça s'entubait dans les grandes largeurs.

On tremblait en imaginant
Tony Le Stéphanois fonçant dans sa berline vers le repère des ordures adverses - des Arabes dans le bouquin de Le Breton, des Robert Hossein dans le film de Jules Dassin.
On avait là toute une mythologie à porté de main.
Pigalle en nouvelle Olympe décadente, et ses troquets en guise de champs de batailles homériques.
Les Dieux vendaient de la coco et les éditeurs vendaient du Truand. Une mode comme une autre. La gouape sur-armée et affranchie à la dure était le vampire des fifties. Le demi-sel devenait son Jonathan Harker et les prostituées ses Mina de pacotille.
"Redoutable imagerie pour les esprits faibles" notait Alphonse Boudard, qui, dans le genre, en connaissait un sacré rayon.
Éclairé aux néons des troquets et relaté en dépêches AFP section Langue Verte, cette jaffe avait en effet de quoi échauffer le carafon d'une bonne poignée de gustaves en quête de sensations fortes. Et pourtant, comme le faisait remarquer Jean-Pierre Melville dans une interview télé de 1970, les truands, dans toute cette tambouille, les truands, véritablement, on s'en fout.
"Je trouve que c'est des pauvres types, des minables. Mais il se trouve que les histoires de gangsters représentent un véhicule facile à exploiter pour cette forme de tragédie moderne [...] C'est un fourre-tout, on peut y mettre tout ce qu'on veut, de bon ou de mauvais, mais c'est quand même assez facile de se servir de ce véhicule pour raconter des histoires qui vous tiennent à cœur."
Les histoires, ce seront toujours les mêmes. Elle nous tiennent à cœur car elle sont aussi immuables qu'immortelles.
L'amitié, la trahison, la liberté.
La tragédie moderne, ce peut tout aussi bien être
Hippolyte en décapotable chromée faisant la tournée de ses jupons à location que Don Rodrigue avec une sulfateuse en lieu et place de ses trois mille pèlerins baroudeurs combattant du Maure en Espagne.
Lui combattra plutôt les Corses d'en face. Ou bien les Nord
Af' du quartier suivant, au choix.
La tragédie moderne, c'est cette bonne vieille chanson ré-orchestrée à l'actuel. Vires-moi donc cette toge grecque que je ne saurai voir. Ici, le swing renverse, les trompettes tonnent et la mixture détonne.

La mixture fit long feu mais dans les années 60, le brasier s'essoufflait. Simonin radotait ses comptines ancestrales, Le Breton chantonnait les mêmes rengaines de l'autre coté de la barre - celle des bédis et des képis - et les imitateurs avançaient du sous-produit faisandé.
Pierre Lesou, par contre, restait fidèle à ses accointances. Le truand n'était qu'un doule, mais la tête juste en dessous créait son univers propre, fait d'amitié, de trahison et de liberté.
Avance rapide. De tous les écrivains noir, il est, à mon sens, celui qui colle le plus au cinéma de Jean-Pierre Melville. Épuré, stylisé et viceral. Du B dans le A, et vice-versa.
En 1963, il amorce un premier virage avec La Virgule D'Acier (Fleuve Noir Spécial Police # 355, 1963 - bouquin justement dédié à Melville "en amical coup de doule") : son héros reste un gangster mais n'est plus un truand parigot. Fini la France et son folklore, bonjour l'international et ses ouvertures. C'est Jeff, réglant ses comptes à Londres.
La loi reste mais le milieu change.
Puis vint 1964 et voila notre auteur qui débute sa série mafieuse.
Nature.
À l'époque, le Grand Syndicat faisait de plus en plus parler de lui et la fiction commençait tout juste à se pencher sur son cas. Comme tout mercenaire de l'underwood puisant son inspiration dans un zeitgeist populeux, Lesou remplaça donc ses émules de Pierrot le Fou par ceux de Lucky Luciano ou Joe Adonis.
Taillée à l'américaine, sa petite escapade ne dura que 440 pages, soit le temps de deux romans, mais à les relire aujourd'hui, force est de constater que Pierre Lesou fut le Peter Rabe Français, c'est à dire l'outsider qui ébloui la travée, l'oublié qui esbaudi sans dégourer.
Mais calmos dans l'estrade. La soupe arrive.
"Je tue, c'est correct. Si on me tue, c'est correct."
Je Vous Salue Mafia débute tout en sobriété. Première page, Lesou cite ses sources. Société Anonyme Pour Assasinats, de Turkus et Feder, aux éditions de l'Air du Temps.
Ce roman, ce n'est donc pas du vécu, c'est du renseigné - comme un procureur transformé en petit bibliophile.
Qu'importe.
Tournes une page. Puis deux. Le héros s'amène. Il se nomme Phil Mum Phil. Membre de la légendaire Murder Inc. "Il n'était pas laid [...] mais son visage était inquiétant."
Il prend un ascenseur, monte vers l'interrupteur de son aventure : le chef de son organisation, qui lui assigne une mission et un partenaire.
Le partenaire : Walter Schaft. La mission : buter un type, Rudy Hamberg. Le meilleur ami de Phil.
Et la suite est tout bonnement magnifique.

Car la Mafia, dans toute cette histoire, on s'en fout. C'est un décor, c'est une panoplie. Des accessoires pour faire vrai, pour faire juste aux yeux du client borné, celui qui lit sans se casser la brique. Mais l'essentiel réside ailleurs, je l'ai déjà écrit, tu l'as déjà lu :
Amitié, trahison, liberté.
Reste qu'il faut assurer le décors. Le planter, dit-on, lui donner une certaine contenance (le pauvre !)
Le roman prend donc 40 pages pour démarrer et ses (trop nombreuses) notes de bas de pages encrassent légèrement sa dynamique mais une fois lancé, le voila qui agit comme un envoûtement. Lesou est enfin débarrassé du protocole. Les tueurs sont sur la route et la victime attend son heure. ENVOÛTEMENT !
"Ils étaient des tueurs et ils étaient des humains."
De son coté, le lecteur cherche à y voir clair. Il a beau être envapé, il sent une magouille, quelque chose de sous-jacent, quelque chose de plus complexe. Et Rudy qui attend toujours ses tueurs et ses tueurs qui, sur la route, discutent à bâtons rompus.
"De temps en temps, faut bien causer un peu..."
200 pages étirées comme un élastique. Une tension de western, truquée comme ce duel final dans Pour Quelques Dollars de Plus, avec sa petite musique qui avale les secondes.
"Time is fiction."
Bien entendu, il y a le carcan du roman Fleuve Noir. Une pagination imposée que Lesou tente de satisfaire. Un cahier en moins, 16 feuillets éliminés, et le roman aurait été un chef-d'oeuvre absolu. Tel quel, cela reste néanmoins un polar fantastique, un polar simple et sans prétention, un polar direct comme une droite dans la gueule.
Ce n'est pas un discours, c'est un coup franc. Un coup après lequel jamais plus le klaxon d'une voiture ne sonnera de la même façon dans tes esgourdes.

Mais reprenons. Ce que Lesou étire dans Je Vous Salue Mafia, il le compresse dans Deux Mafiosi, second volet de sa série Mafieuse.
Phil Mum Phil en est absent mais se voit mentionné au détour de quelques pages. À sa place, ce sont Gian et Mario qui officient sur la scène - avec toujours les membres du syndicat aux premières loges. Bourreaux impassibles, ombres dans la narration.
Gian a un contrat sur la tronche. Mario, son meilleur ami, tente de le sauver. Tous deux sont membres de la Mafia et chacune de leurs actions ne va faire qu'empirer la donne.
"Et, tout ça, parce que l'Organisation était une mécanique trop bien réglée, sans âme, qui ne tenait compte d'aucun problème humain."
Il y a d'abord cette sécheresse qui évoque Je Vous Salue Mafia (le désert, la poussière - magnifique prologue), il y a ensuite la poisse de Mario, écho lointain des affres de Laurent Hennique dans Main Pleine (même auteur, en Série Noire), il y a enfin cette course contre la montre qui entérine toute la tension accumulée.
Et cette ambiance de roman d'hommes. Passage à tabac, rouage de coups. "Pas une seule fois il n'avait émis une plainte."
Les évènements se bousculent. L'intensité, comme un étau qui se resserre, étouffe le lecteur. Le bouquin semble comme chargé à bloc. Exact inverse de l'exérèse narrative pratiquée sur Je Vous Salue Mafia, il matraque ses retournements de situation à une cadence folle.
Écrit dans l'urgence aussi - j'imagine - Lesou sans le sou, reprenant l'écriture au domicile de sa sœur Gisèle après avoir claqué en Amérique Latine, deux années durant, tout le pognon accumulé grâce à l'adaptation cinématographique de Je Vous Salue Mafia par Raoul Levy...

Mais ce qui surprend le plus, dans ce texte, c'est sa faculté à capturer, non pas l'essence des Etats Unis mais bien l'essence même de la littérature "dure" Américaine, à la manière de ce que Terry Stewart accomplissait quinze années plus tôt dans ses 4 (très beaux) Série Noire.
Ce n'est ni du pastiche, ni de l'imitation
mais un
pardeuss' aux coutures irréprochables et à la classe impeccable.
Il n'y a pas à rougir. Truands, gangsters ou mafieux, Pierre Vial Lesou servait la mythologie noire moderne avec une force d'inspiration peu commune, propre à laisser, une fois dévorée, son lecteur pantelant, souffle court et pognes moites.
Et je m'arrête là.
C'est brusque mais il faut parfois savoir couper court aux
interminables effusions de compliments. D'autant plus que, concernant Pierre Vial Lesou, je pourrai très bien me montrer intarissable jusqu'à t'en dégouter.
Ce serait idiot, non ?

L'ART DU DÉSORDRE IDÉOLOGIQUE

SANS SOMMATION, PIERRE VIAL-LESOU
FLEUVE NOIR SPÉCIAL POLICE # 1038, 1973

Avant-dernier roman de Pierre Vial-Lesou (l'auteur ne ressurgira qu'une dizaine d'années plus tard pour un ultime titre, Viva Zapatouille), Sans Sommation poursuit la veine politique amorcée par La Mort D'un Condé et, de fait, se retrouve placé une nouvelle fois sous le signe de cette citation de Napoléon : " L'art de la police est de ne pas voir ce qu'il est inutile qu'elle voit."

Roman d'action sous-tendant une réflexion sociale, Sans Sommation semble néanmoins, à l'aune des convenances (encore balbutiantes) du polar contestataire des années 70, relever de l'anomalie voulue et consommée.
Ici, le discours est indistinct, la pensée chaotique. Le propos n'est pas engagé comme il se devrait de l'être mais bien "dégagé" de toute appartenance, donc aussi ambigu que problématique.
De cette conduite étrangement floue, le texte s'érige à la fois comme le pendant négatif du Nada de Jean-Patrick Manchette et comme une suite informelle aux thématiques que La Mort D'Un Condé cherchait à renouveler dans un bain de modernité - Toute cette imagerie du flic et du truand, de l'autorité et des codes, de l'amitié et de la trahison, en bref : toute cette somme d'antagonismes classiques que l'auteur applique à une trame politique-fictionnelle contemporaine et pertinente.
En résulte un roman détonnant mais pas toujours défendable. Un peu comme si la bande à Baader était dirigée par Pierre Loutrel et qu'Action Directe obéissait à la logique virile d'un nouveau Rififi chez les hommes.


Ainsi, dans Sans Sommation, un groupe de terroristes est traqué par la police d'état (" une gentille armada de truands-sadiques et d'espions-grillés, tous promus exécuteurs au nom de l'intérêt public ") tout en essayant de monter un (dernier) gros coup.
Les prémices font penser à Nada. Concomitance créative, les deux romans furent écrit la même année. Celui de Lesou sorti plus tardivement, pour accompagner le film que Bruno Gantillon en tirait.
Mais contrairement à Nada, les révoltés de Sans Sommation ne sont pas des anarchistes armés ou des idéalistes exaltés. Ce sont d'anciens militaires, lâchés par leur patrie, lâchés par leur époque, et continuant à se battre pour leurs idéaux - ou bien même : leur absence d'idéaux - se battant ainsi parce que c'est tout ce qu'il leur reste et aussi parce que c'est tout ce qu'ils savent faire.
Ce ne sont pas des gauchistes, ce sont des réactionnaires. Ils combattent le progrès, concept à l'origine de la trahison dont ils furent victimes. Le spectre d'OAS n'est pas très loin, c'est le troupeau des morts s'en prenant à celui des vivants pour répondre à un code de l'honneur désormais obsolète.
Fantômes contre fantoches, âmes perdues contre sans âmes - il n'y a rien ni personne à sauver ici, juste des salauds et des fous, pour reprendre l'expression d'Alphonse Bourdard.

Sans Sommation se tire donc une balle dans les deux pieds. Un flic manipulateur dit : " vos raisonnements démagogiques me déçoivent. " Un commandant rebelle lance : " je n'aime pas l'hypocrisie, surtout quand elle gouverne. " Le personnage principal lui répond alors : " dans la bouche d'un militaire, c'est plutôt marrant à entendre. "
Sans attaches, le bouquin chancelle. Pour certains, il semblera absurde. Pour d'autres, "fasciste" sera le gros mot à employer. Dans Mystère Magazine, Alain Garsault écrivit qu'il s'agissait d'une "démonstration politique du plus mauvais aloi." C'est passer à coté de l'essentiel. Voire même tomber dans le panneau.
Ou comme le déclare une pute en page 67 : " Z'etes cons, les hommes, avec votre politique [...] Z'avez tous la prétention de détenir la vérité dans vos petites cervelles d'insectes."

Car au delà des curieuses intentions (aberrantes ou néfastes) que l'on pourrait lui prêter, Sans Sommation s'affirme avant tout comme un roman sur les diverses gammes du mensonges. Et comment se regarder ensuite dans une glace.
" L'amitié, tu vois, ça fait partie de la panoplie des illusions, comme toutes les idéologies. "
Argumentation intellectuellement insaisissable mais émotionnellement probante, le roman est beau comme un ratage spontané qui hurlerait phrase après phrase sa franchise maladroite mais nécessaire.
Le suspense initial (qui est le lieutenant Kieffer ?) est adroitement mené, la fin (marquée d'une résignation en faux semblant) se fait amère et l'écriture de Pierre Vial-Lesou se découvre aussi enragée qu'efficace.
Il est juste regrettable qu'une lourdeur dans l'exécution de certaines scènes et qu'un manque d'ambition dans le développement final de l'action (deux travers sans doute imputables aux considérations budgétaires imposées par le format cinématographique - le roman ayant été à l'origine conçu comme un scenario) empêchent Sans Sommation d'atteindre à la perfection du bouquin de gare en 240 pages.

Quant au film de Bruno Gantillon (réalisateur du très beau long-métrage fantastique Morgane et Ses Nymphes), il accentue toutes les faiblesses du roman original et se paye aussi le luxe de rater les scènes d'action. Je pense à l'attaque (brouillonne et trop vite expédiée) du fourgon carcéral et à l'embuscade héliportée dans un champ, censée être le clou du spectacle et pourtant manquant cruellement de tension.
Tout aussi déplorable : la conclusion au tête à tête final entre Maury et Capra, dans la Ford, sur la route, en fumant un clope et qui passe à coté de toute la tranquille poésie du mécanisme de mort dans l'œuvre de Pierre Lesou.
Néanmoins, cette légère absence de souffle ne gâche pas entièrement le spectacle. Bien au contraire. Les dialogues de Lesou sont solides, Gantillon capte à merveille les instants mélancoliques et les acteurs sont excellents.
Mention spéciale à Maurice Ronet et ses airs d'alcoolique suicidaire. Il porte littéralement le film sur ses épaules de pauvre type désabusé, uniquement préoccupé par l'accomplissement d'une soulographie très active - un délice !
Pour le reste, Mario Adorf est toujours aussi fort, Bruno Cremer est ultra-cool et Annie Duperey super belle pour qui aime les filles plates et élancées.
J'aurai du mal à en dire plus de bien mais, en dépit de ses (énormes ?) defauts, Sans Sommation reste un polar seventies de facture très honnête.
En tout cas, prenez-moi pour un dingo si vous les souhaitez mais je ne l'échangerai jamais contre un Costa-Gavras de la grande époque.
Et j'y peux rien, je suis comme ça... mais je m'assume !

SPÉCIAL SPÉCIAL-POLICE # 1

Je m'en suis rendu compte il y a de cela quelques mois - c'est mortifiant mais ça en est ainsi : je n'ai quasiment jamais causé dans ses pages de la collection Spécial-Police du Fleuve Noir, véritable pilier du roman noir moderne et dont la spécificité majeure résidait dans une production intégralement fournie par des auteurs francophones
(...à une ou deux micro-exceptions près - mais ne nous égarons pas, ceci n'est pas le sujet !)

Je répare donc l'oubli aujourd'hui avec 6 Spécial-Police du début des années 60, chroniqué dans l'urgence because (rayer la (ou les) mention(s) inutile(s)) :
petit 1 ) je ne suis pas très inspiré
petit 2 ) je suis à jeun
petit 3 ) je souhaitais émuler ces petits textes expéditifs qu'Igor B. Maslowski signait dans le cadre de sa rubrique critique pour Mystère Magazine : " Le Crime Passe En Jugement "
petit 4 ) je fais mon intéressant
Bref, ce n'est qu'une mise en bouche : d'autres billets de ce type suivront certainement et peut être seront-ils plus réussi...
En attendant, en garde, j'attaque !


ROMAN DE DUR ET MÉLODRAME

Deuxième roman policier de Pierre Vial Lesou pour le compte du Fleuve Noir, après trois polars de truands en Série Noire (dont les mythiques Le Doulos et Main Pleine) et une escapade du coté de chez André Martel, collection Le Caribou (mais qu'était-il donc allé foutre là bas ?), Nocturne Pour Un Cadavre (Spécial-Police # 284, 1961) débute comme le tout venant de la production noire de la fin des années 50 :
Un homme retrouve la liberté après 7 années passées en prison et décide de se venger. On a lu cela chez Héléna, Le Breton et tous les autres, une bonne centaine de fois multiplié à l'infini. La recette est gouteuse mais il y a un piège : Lesou bifurque très rapidement (" au fond, de sa vengeance, il s'en foutait ") et Nocturne Pour Un Cadavre se transforme en la collision hasardeuse de deux individus que tout sépare : le truand fraichement libéré des premières pages et un salaud ordinaire, raciste, pochard et violent, qui commet un meurtre et cherche à le maquiller.
C'est aussi, d'une certaine manière, la collision entre deux genres de fictions avec, d'un coté, le style truand hérité de Le Breton et employé par Lesou en Série Noire, et de l'autre coté, le style maison des polars du Fleuve Noir, ces petits suspenses de cadre-moyens qui plongent, parfois malgré eux, dans de sordides frasques criminelles, qui se reçoivent des tuiles à répétitions sur le bout de la tronche, qui se retrouvent victimes des manigances de leurs proches ou bien qui s'enferrent bêtement dans leurs propres sales combines.
On peut lire ce genre de récits chez André Lay, Alain Page, Pierre Courcel et une bonne vingtaine d'autres mais Nocturne Pour Un Cadavre fait surtout penser aux romans de Peter Randa - même période, même éditeur.
Simon Daclin, le triste salaud mis en scène par Lesou, n'est rien de moins qu'une version négative des héros habituels à Randa, ces mecs ultra-conservateurs, la quarantaine vigoureuse, anciens baroudeurs tendance "le bon temps des colonies" et convoitant continuellement des petites jeunettes dont ils pourraient fort bien être les paternels.
Reste un troisième élément de ce roman à évoquer : c'est celui du mélo, personnifié ici par une femme qui se révèle peu à peu être le protagoniste central de ce drame.
Lesou s'était déjà essayé au genre en Série Noire, avec le très féminin Cœur D'Hareng. Sa tentative avait foiré dès le premier tiers. Dans Nocturne Pour Un Cadavre, et même si l'écriture se fait par endroit un peu trop lacrymale, il réussit enfin son coup. La petite mécanique fonctionne. Le roman ne fait pas que distraire. Il accroche et, à la fin, réussi à toucher.


SUSPENSE ET MORD-MOI-L'NŒUD

Je n'ai jamais abordé sur le Muller-Fokker le cas Serge Laforest, un auteur que j'apprécie énormément, injustement négligé par les amateurs de polar alors qu'il fut le premier français à avoir été publié en Série Noire.
Pour faire vite, je dirais que le problème de Laforest (de son vrai nom : Serge Arcouët) reside dans sa propension à trop écrire, à trop tirer à la ligne, et finalement à parfois trop se diluer, se perdre dans les eaux tièdes des petites réussites sans panaches - lui qui, à ses débuts, fut considéré par la critique comme l'égal d'un Horace McCoy.
Mais ne tergiversons pas plus longtemps.
Dans l'œuvre d'Arcouët / Laforest, Le Paniquard (Spécial-Police # 288, 1962) est à ranger définitivement dans la catégorie des médiocrités sympathiques.
Le roman se déroule dans une université américaine. Un étudiant, membre de l'équipe de foot US locale, est assassiné et Ken Bolton, capitaine de cette même équipe, mène l'enquête. Tout le campus passe donc à la question, la vase est remuée et quelques vieux secrets resurgissent.
L'assassin, bien entendu, c'est le paniquard du titre, "un pauvre type mordu par la jalousie, une jalousie maladive dont le crescendo tend vers la haine la plus froide et la moins justifiable."
Je n'en dis pas plus. Son identité n'est pas bien difficile à deviner, Laforest ayant recourt à une ficelle un brin grotesque.
Pourtant, malgré cette faiblesse révélatrice - et surtout, malgré ses protagonistes à la très sportive et très idiote adolescence, Le Paniquard s'affirme comme une lecture plaisante.
Du 220 pages de récit de gare qui passent comme une vache regardant un train.
Ça ne suffira par contre pas à en faire un "bon" Serge Laforest, ce grand auteur nous ayant habitué tout au long de sa carrière à des choses nettement plus flamboyantes et retournantes que cette bien gentille romance d'agrément.

Autre Fleuve Noir classique, sans surprise, pas réussi pour un sou mais pas dégueulasse pour autant, Point De Fuite (Spécial-Police # 291, 1962) est signé Alain Page (futur auteur de Tacho Pantin) et conte, comme de bien entendu, une histoire de petit mec de la classe moyenne (" il n'était qu'un homme comme les autres, un homme comme il y en avait plein les rues, avec ses petits ennuis, ses petites joies, son avenir tout dessiné ") qui tente un gros coup et se retrouve piégé dans un engrenage de stupidité et de fatalité.
Il se débat 200 pages durant mais fini, comme de bien entendu bis repetita, broyé de tous les cotés - que ce soit par l'amour d'une femme possessive, par le désir de vengeance d'un truand foireux ou bien encore par l'habituelle procédure policière, menée par le non moins habituel inspecteur lymphatique aux lents mais implacables raisonnements.
(le raisonnement étant ici : nous n'avons aucune preuve, laissons donc cet idiot de personnage principal se démasquer lui-même, nous le cueillerons à la sortie.)
Bref, rien de très important à signaler si ce n'est que, je me répète mais ça rempli de l'espace : Point De Fuite est agréablement lisible, porte bien son titre mais aurait tout aussi bien pu s'appeler Le Paniquard.


ATMOSPHÈRE ET AVENTURE

On se reprend avec un G.J. Arnaud, valeur sûre de la collection, et qui donne avec Agonie (Spécial-Police # 303, 1962) dans le roman noir ultra-rural.
Comme souvent chez l'auteur, le récit se déroule entre Narbonne et Béziers et privilégie à l'action les rapports humains, les tensions, l'incompréhension et l'isolement qui en découlent.
C'est un huis-clos en plein air, dans une campagne reculée qui se meurt.
C'est la lutte silencieuse d'un vieillard pour sauver sa ferme.
C'est aussi l'affrontement discret de deux sœurs pour un homme.
Mais c'est surtout l'opposition tacite de deux conceptions du monde, celle qui tend à disparaitre, avec ses vieilles traditions et sa morale éculée, et celle qui s'étend, qui cherche à renouveler les campagnes et qui, ici, est représenté par une jeunesse déboussolée, complexe, moderne - une jeunesse un peu perdue qu'Arnaud caractérise sans fard ni duplicité.
On pense parfois à ses premiers polars, ceux écrit dans une veine simenonesque, type "Seule La Mort" (Arabesque / Crime Parfait ?) ou "Du Sel Sur Les Plaies" (Ferenczi / Feux Rouges) mais aussi à ce que Pierre Pelot produira vingt années plus tard pour le compte du même éditeur.
Quant à la dernière phrase du roman, il s'agit bien entendu d'un de ces couperets secs et amers qu'Arnaud savait si bien monter en Spécial-Police.

Si Arnaud est une valeur sûre, André Lay, quant à lui, représente l'exact contraire : la valeur incertaine.
Avec ce gros routard du gare made in Fleuve Noir (126 romans au compteur), on ne sait en effet jamais trop à quoi s'attendre. L'ennui mortel, la purge en bonne et due forme, la petite distraction qui tient éveillée ou bien encore la sympathique petite surprise qui se tombe en deux heures fastoche.
Blizzard (Spécial-Police # 307, 1962) se classe aisément dans la troisième catégorie mais ne crions pas victoire si tôt, voyons plutôt si tu survis à mon résumé :
Donc, lors d'une violente tempête de neige, à la frontière entre les USA et le Canada, un gentil trappeur est pris en otage par deux truands. Nos sales gonzes (un dandy et un violent) se disputent des toiles de maitres volées à un musée et tentent d'échapper à la police américaine. Le trappeur compte les points et André Lay corse l'affaire en y rajoutant une jeune poulette.
Elle est belle et naïve, notre héros en tombe amoureux et, pour lui faire pétiller le fond des yeux, se mesure alors aux deux truands.
A la fin (je n'ai aucune honte, je révèle tout !), il gagne et la poupée lui tombe toute chaude dans les bras. On attend un revirement de dernière minute vaguement cruel et on en est pour ses frais. Rien ne vient, rien ne viendra, rien n'est venu.
C'est bon, gars, tu peux le refermer ton bouquin.
Car, (eh oui !) c'est du André Lay. C'est à dire du boulot de petit artisan, du boulot sans génie, du boulot économique mais honnête. Les grand-pères et les grand-mères souffreteux du palpitant seront aux anges : Blizzard, c'est de la littérature bien molle qui s'avale sans mâcher.
N'oublions tout de même pas qu'il en faut pour tous les gouts et tous les râteliers.


POLAR JAUNE POUR NANAS ROSSES

Et justement, puisque l'on cause de gouts, bifurquons en direction des couleurs avec un excellent petit suspense que l'on pourrait croire rose bonbon comme un Harlequin, un Nous Deux ou bien encore un Delphine sixties et qui se révèle peu à peu jaune comme un giallo de la grande époque, maniéré et féminin, la sexualité déviante et gratuite en moins, la subtilité et le sensible en plus.
Le roman se nomme Lamento (Spécial-Police # 411) et est signé Jean-Pierre Ferrière, une plume experte dans les jeux d'influences et de manipulations.
L'histoire met en scène deux femmes éprises d'un même homme et qui, au lieu de se haïr, deviennent camarades, puis complices et fomentent enfin l'assassinat d'un vieil homme.
La suite est encore plus trépidante et Ferrière trompe son lectorat avec autant de génie que ses personnages en mettent pour se manœuvrer les uns les autres.
Lamento est donc un roman noir pour nanas, mais pas pour n'importe quelles nanas.
Les amatrices de choses gentilles noteront avec plaisir de très justes évocations des sentiments adolescents et de la vie provinciale, les autres, les tordues et les perverses, se régaleront de cette descente aux enfers qui, du rose pétale des amourettes, vire implacablement au carmin sanguinolent des tragédies.
Quant à moi j'avouerai sans difficulté aucune que la scène de l'enterrement et son très déroutant flou cauchemardesque m'ont foutu une belle claque.


CONCLUSION ?
3 belles réussites sur 6 bouquins, aucun désastre avéré, pas trop d'ennui, zéro assoupissement : dans le genre j'appelle ça une très bonne pioche.

INTRODUCTION PARTIELLE AU MYTHE PIERRE VIAL LESOU

Comme toutes les bonnes choses dans la vie (ou presque, n'exagérons pas !), j'ai découvert Pierre Lesou, Pierre Vial, Pierre Vial Lesou, Pierre G. Lesou dans une poubelle de bouquiniste. J'appelle poubelle de bouquiniste les bacs à 20 centimes qui ornent aux grès des intempéries les devantures de certains magasins résolument orientés décharges géantes du livre. Une belle planque pour résidus érotico-espionno-polardeux en voie de décomposition. Mon élément naturel, en quelque sorte.
Ce jour là, le hasard avait bien fait les choses. Pierre Vial et moi, on ne se connaissait pas mais on s'était tout de suite plu. Enfin, j'imagine. Difficile d'attester de la réciprocité des sentiments dans une rencontre avec un vieux bouquin...
Son petit nom, c'était L'Ardoise D'Un Apache. Il s'était maquillé en Spécial Police, noir et rouge, bel état, couverture de Gourdon et surtout, texte majestueux. Un truc à t'accrocher à vie. je peux en témoigner. Après ces 220 pages, je n'étais plus le même homme. J'étais passé camé, totalement envapé, dépendant au Pierre Vial - je te l'ai déjà dit. J'aurai même été jusqu'à me faire tatouer son nom sur le bras mais vu ma frêle condition, ce n'était pas possible. Un cœur à 360 degrés, ça la fout mal. Passons. J'ai bien d'autres choses à te raconter, des choses plus importantes que mes mensurations. Par exemple : Pierre Vial Lesou, c'est du tonnerre, du bonheur, de la pure, pourquoi n'essaye-tu donc pas, n'essaye donc tu pas, n'essaye pas tu donc, hein ?
Je sais, je sais, je me répète, ça saoule mais c'est nécessaire (ah ?). Disons, pour redevenir sérieux, qu'il y a des oubliés tragiques du roman noir - pas forcement pour les vécus mais plutôt pour les conditions de leur oubli - et que Lesou est de ceux là.
Un auteur injustement négligé. Un auteur que les spécialistes citent rarement - et lorsqu'ils le font, c'est toujours du bout des lèvres.
Pire, certains grincheux - et là, ce n'est plus de l'amnésie polie, c'est de l'assassinat - l'assimilent de temps à autres à un sous-Lebreton, un Lebreton du pauvre, un Lebreton de seconde zone.

Faudrait peut être pas abuser.
Lesou, c'est une toute autre came que Lebreton. Même origine chimique, résolument, mais effets différents. Époque différente surtout. Lesou semble porter le polar des truands vers le modernisme. Années 60. années 70. Lebreton, si tu cherches le chef-d'oeuvre, tu restera bloqué en 1953. C'est Du Rififi Chez Les Hommes. Et ce bouquin-là, ce monument, cet indispensable, c'est le niveau type de la moitié de la production à Pierrot. Quant à l'autre moité, elle vaut aisément Le Rouge Est Mis.
Voila pour le mètre-étalon. Rajoute à ça un premier bouquin, Le Doulos, magistralement adapté au cinéma par Jean Pierre Melville et maintenant, explique-moi pourquoi Lesou se la traine encore aux cotés des forçats en guenilles de la littérature poubelle ?

J'avance l'hypothèse du passage de la maison Gallimard au Fleuve Noire. Une transition qui ne pardonne jamais. Prends Serge Arcouet, Ange Bastiani, André Duquesne. Le marathon est meurtrier.
Peut aussi s'agir de l'effet José Giovanni. Un autre coup dur. Car c'est lui, c'est bien lui, aux yeux des critiques, le seul et unique héritier de Lebreton. Les autres peuvent crever, on tient la relève, mon pote. J'te jure, c'est du sérieux ! cui-là, Il a fait de la prison, il argotise simplet et il sait placer des mots à la suite. Houra collectif ! (En plus, t'imagines, Deuxième Souffle, c'est presque métaphorique...)
Calmez votre enthousiasme, les gars. C'est sacrement joli les poster-boys mais faudrait peut être penser aux copains. Lesou mérite bien mieux que son cachot de poussière.
Voila un styliste impeccable, un auteur viscéral, un raconteur implacable. L'architecture de ses intrigues est renversante de simplicité (ça s'appelle un polar, poulette) mais ses bouquins font toujours l'effet de couperets. La tranche est nette, sans bavure, la mise à mort, automatique. Elle en devient presque figure de style, surplombant toutes les autres. On trouve bien entendu les thématiques habituelles du polars à truands - amitiés viriles, trahison, évasion du ch'tar, vengeance tiède - mais le coup de la grande faucheuse reste l'axe primordial, la marque de fabrique, la signature que Lesou exécute au mont-blanc et uniquement pour les grandes occases.

Car chez Lesou, le bouillon de 11 heure est une affaire sérieuse. On ne clamse pas en deux lignes, on crève en cinq pages. Le plat est consistant. Le western spaghetti peut se rhabiller. Ce n'est pas une farandole grand-guignolesque, c'est un ballet cosmique, une distorsion temporelle. C'est Jeff Harles dans La Virgule D'Acier, le corps empli de plombs et qui ne se résout pas à tomber alors qu'il n'a plus rien d'autre à faire, c'est Viletti face à Favenin dans La Mort D'Un Condé et qui ne cesse de se relever pour honorer l'intégralité du barillet, c'est Roy dans Main Pleine qui virevolte dans les airs en cherchant à réparer l'inattendu outrage tandis que son corps se perce de toute part. C'est un souffle qui se repend à l'infini, une micro-seconde en suspension et les pages peuvent se tourner, la mort reste, elle crée son propre microcosme, elle subsiste comme subsisterait une impression rétinienne. L'artifice est saisissant, dépasse la simple tension narrative et oui, finalement, nous ne sommes pas très loin d'un Sergio Leone en apesanteur.
Je pense alors au duel final de Je Vous Salue Mafia, ce duel final et les coups de klaxons qui s'ensuivent, qui s'amplifient, qui étouffent le lecteur jusqu'au mot FIN. Dix pages en apnée. On comprend pourquoi Lesou scénarisa beaucoup pour le cinéma. Le sens du rythme est impartial... mais cela ne doit pas entacher la partie écrite, publiée, la partie litteraire de son œuvre.
Les bouquins de Lesou ne sont pas des brouillons de scénarios. L'homme a du style et des idées. Exactement comme Héléna, comme Bastiani parfois, comme Lebreton en Série Noire. Le moteur ne tourne pas dans le vide.
Je reprends l'exemple de Je Vous Salue Mafia. Il est difficile de croire que ce bouquin ait pu être écrit en 1964. Non pas pour son sujet, qui devance de presque dix ans la mode du tout Mafieux dans le roman d'action, mais plutôt pour son infrastructure narrative. Ces deux exécuteurs en route vers une mission d'équarrissage et qui échangent sporadiquement des réflexions sur leur vie, leur boulot, leurs aspirations.
Drame intimiste sur quatre roues avant déchainement d'ultra-violence mélodramatique.
Lesou ne fait pas dans le froid. Il ne fait pas non plus dans le détournement du genre.
Le genre, il le dépouille, il le gonfle, il le renforce à l'extrême et sans en dénigrer les éléments populaires. Je disais : Il modernise. Dans la forme comme dans le fond. Son argot est léger, ces artifices sont fougueux. Ce sont les même tragédies, mais jouées sur un nouvelle partition. Et dans le cas de Lesou, disons simplement que l'interprète est magistral.
Je m'arrête là.
Il y a beaucoup de choses à dire sur Lesou. J'en ai dit certaines. C'est mineur mais j'y reviendrai. J'essaierai d'en développer d'autres (par exemple Manchette / Lesou). En attendant, espérons que cette longue divagation ne fut point ennuyeuse pour vous et fera pour certains office d'introduction à un auteur d'exception étonnamment dénigré.

TROMBINOSCOPE S.N.

Trois gueules, trois auteurs majeurs ayant débutés dans le polar en Série Noire (SN). Je donne les indices et vous me sortez les noms. Pensez à Questions pour un Champion. Vous en êtes capable, je le sais ! Ce n'est même pas difficile... allé, TOP !

Auteur au passé trouble et poète méridional, je me fais connaitre par des écrits fiévreux, rate le Goncourt, publie une trilogie noire abyssimale et surréaliste puis signe quatre romans en SN avant de partir voir ailleurs si l'herbe est plus verte. Tout comme mon compère André Duquesne, j'accumule les pseudonymes et petits éditeurs, m'acoquinant même avec André Guerber qui piratera bon nombre de mes ouvrages. Pécuniairement intéressé mais amateur de curiosités et de sensationnel, je dresse une cartographie des mauvais lieux français avant de sobrement quitter la scène.

Chantre du milieu, de l'argot et du verlen ("Verlen avec un e comme envers et pas verlan avec un a comme ils l'écrivent tous. Je les vois à la télé maintenant, les snobinards, ils chantent en verlen, ils s'en gargarisent...").
Parrainé par Marcel Sauvage, je débute à la SN avec un roman fondateur, essentiel, mythique. En signe deux autres puis part aux Presses de la Cité où je publie mes mémoires, quelques polars documentaires et un dictionnaire. Je retrouve Roger Duchesne pour Melville. Je scénarise un peu partout. Je voyage. Je donne dans le réchauffé en Un Mystère, je cède aux sirènes de la facilité et je termine chez Gérard de Villiers.

Je suis le grand oublié du roman noir français. Trois bouquins en SN, dont le premier adapté par Melville. Je passe ensuite au Caribou pour un titre. Continue au Fleuve Noir Spécial Police. Je donne alors au genre une dizaine de romans forts, précis et implacables. Artisan méticuleux, je suis connu pour cisailler des récits intimistes sur le milieu, la truanderie et les destinées tragiques. Scénariste pour Michel Deville, Raoul Levy, Yves Boisset, Claude Chabrol, Bruno Gantillon, je disparais sans crier gare à l'orée des années 80.
Mon nom est...
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UPDATE :
comme l'a dit POP9, il s'agit donc de
1 : Ange Bastiani, 2 : Auguste Lebreton et 3 : Pierre Lesou.

NOVEMBRE NOIR

Novembre, sur le Muller-Fokker Pulpbot Effect, c'est le mois thématique.
L'année dernière, novembre était "le mois du membre", 100% porno routard et vulgaire. Cette année, novembre est le mois du noir, du polar, du hardboiled et du roman d'action pour mec. Je vais essayer d'assurer, le programme est chargé : il faudra causer des américains énervés, des producteurs français de fascicules à la chaine, des petits maitres injustement oubliés, de cinéma noir, d'Eddie Constantine, d'Henry Silva, de Peter Rabe, de séries noires, de détectives privés, de filous, d'arnaqueurs, de Pierre Vial Lesou, de Frank Gruber et de pas mal d'autres choses.
On verra bien si ça tient...