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DU ROBOT FOU ET DE LA DÉFONCE INTERSIDÉRALE, PREMIÈRE PARTIE

HEIL HIBBLER, RON GOULART
OPTA / GALAXIE-BIS # 102, 1984

Statz Kazee, présentateur vedette aux cent quarante million de téléspectateurs, est assassiné alors qu'il s'apprêtait à révéler sur les ondes un " incroyable scandale dans le milieu des affaires."
Pour élucider ce crime et découvrir ce que Kazee avait appris, le gouvernement américain embauche Jake et Hildy Pace, le super couple à la tête de l'agence Enquêtes Bizarres Inc., duo héroïque que Ron Goulart ne prendra pas la peine de nous présenter en profondeur car, voyez-vous, Jake et Hildy, ce sont des héros, ils sont forts et ils sont beaux et c'est véritablement tout ce que l'on a besoin de savoir avant de commencer sa lecture, N'EST-CE PAS ?
(à moins que, mais là c'est ton problème, que tu ne lises que ces trucs emmerdants où aucun espion n'empêche aucun plan de domination mondiale d'aucun vilain et que l'auteur, souvent une gonzesse (la pauvre) ou un vieux fossile radoteur, passe son temps à déblatérer sur des trucs que tu pourrai vivre si tu sortais dehors au lieu de bouquiner, DUGLAND, VA !)
JE REPRENDS / Jake et Hildy suivent la piste. Elle est simple et bien balisée, elle ressemble à un jeu de l'oie revu et corrigé par un artiste de comic loufdingue qui aurait passé un peu trop de temps aux gaugues à feuilleter du Milton Canif et du Wally Wood.
Chaque chapitre correspond donc à un strip et chaque strip relate un évènement et une rencontre.
Comme toujours chez Goulart, l'intérêt nait des décors et des personnages secondaires. Inutile d'analyser. Je l'avais déjà fait 304 messages plus tôt. La suite de cet article a donc été repensé en un mini-listing non-exhaustif des protagonistes fantaisistes apparaissant dans ce roman. C'est moche mais c'est simple, et c'est surtout plus efficace.

AINSI, DANS HEIL HIBBLER, TU TROUVERA :
- Jake, Hildy et pleins de robots !
MAIS TU TROUVERA AUSSI :
- Roots Stackhouse, un politicien souffrant d'un dédoublement de personnalité fort stupide,
- Harlow Lolo (" dans ma lointaine enfance, nous aurions bien rigolé d'un blaze pareil "), un producteur télé qui se déguise en cowboy et vante à longueur de temps son arbre généalogique (" les Lolos ont joué un rôle de premier plan dans le développement de notre nation ")
- Angel Tolliver, une nana que Jake et Hildy recherchent (en réalité, elle se nomme Amanda Tenn et porte un faux nez de patate)
- Billiejean Folly, son amie, spécialiste du tir au bazooka en fête foraine
- Adolph Hibbler, grand expert du Rayon de la Mort, congelé, trimbalé pendant 20 piges comme curiosité par une fête foraine ambulante
ET N'OUBLIONS PAS NON PLUS LES FIGURANTS !
- Steranko le siphonneur
- un major-d'homme anglais aux bras métalliques multi-usages
- un robot gardien de parking souffrant d'un problème d'élocution, la faute à "un axe de bielle défectueux"
- des punks du troisième age officiant dans le Los Angeles du futur
- la classique horde d'androïdes meurtriers ("ces enculées de machines sont toutes au bord de la déjante totale")
- un tueur à gage qui s'est fait tatouer sur tout le corps " une adaptation de l'Ancien Testament en BD quadrichromique."
J'EN PASSE ET DES MEILLEURES, MON POTE !
Mais maintenant, faut conclure. Et en vitesse.

Ainsi, comme un tube de Michel Sardou réorchestré Zizique Zinzin (Looney Tunes en V.O.), Ron Goulart, c'est de la S-F BROADWAY.

Ce n'est peut être pas la vraie de vraie, mais c'est celle qui me plait.
Tu piges ?

SCI-FI ((( Z ))) POP # 0 : RON GOULART, ECRIVAIN ROBOTIQUE

Ron Goulart, je l'ai découvert un été au détours du bac de livres à 50 centimes d'un bouquiniste de plage. Il s'agissait de 'Séparation de Corps' (Dr Scottflaw en v.o.), un récit de 79 publié chez les presses de la cité dans la défunte collection Futurama de Jean Patrick Manchette, celle avec la grosse typo 3D mega-seventies - un truc qui accroche méchamment l'oeil, surtout quant il se retrouve couplé à une illustration de couverture démente mêlant barbouillage de pulp old-school et iconographie 'résidentielle' du gros bonhomme métallique avec un oeil géant à la place de la tête. Forcement, je ne pouvais pas passer à coté de ça.
A l'intérieur, ça parle d'un écrivain baroudeur parcourant la galaxie à la recherche d'un malfrat robotique sur le point d'être reconstitué pièce par pièce. Le supporting-cast est composé d'une nana débrouillarde probablement attiré par notre héros et d'un photographe tendance national geographic gentiment obsédé par les nichons. C'est de la vraie saloperie littéraire qui se respecte et ne s'embarrasse pas d'artifices pour dissimuler aux lecteurs ses ficelles éculées. C'est 160 pages grassement écrites par un automate du roman de gare aux connexions neurales vrillées par la lecture de trop nombreux comic-books du golden-age et qui remplace une bonne partie de ses descriptions par des onomatopées hyper-inventives faites de thunk!, zowie!, whap! et autres sloop!. L'ensemble encadre à la va-vite une intrigue ultra-linéaire, qui se déroule à un rythme moyennement effréné, et dont la seule finalité est d'assembler avec le plus de souplesse possible une masse assez imposante de situations stupides et de personnages aussi cocasses que grotesques.

Je résume approximativement Séparation de Corps mais les trois précédentes phrases peuvent tout aussi bien s'appliquer à n'importe quel autre roman de ce chantre de la déjante bon marché - qu'il s'agisse d'un super-ordinateur voulant empêcher un coup d'état millénariste, d'un enquêteur flegmatique poursuivant une bande de féministes ultra-belliqueuses ou d'un couple d'espions sixties déjouant les terribles plans d'un savant fou allemand. Car l'intrigue n'est, chez Ron Goulart, qu'un simple prétexte pour écrire à peu près tout sur n'importe quoi, n'importe comment. En fait, l'intrigue est tellement secondaire que l'auteur se permet parfois de passer outre le climax final, un peu comme si le chapitre narrant la sacro-sainte confrontation héros/vilain avait été élagué par l'éditeur pour gagner du temps et atterrir directement en page d'épilogue.
Autant dire que la première fois, arrivé page 155, c'est assez surprenant.

Cette bizarrerie narrative, cette dizaine de pages (volontairement ?) manquantes, est assez emblématique de l'oeuvre de Ron Goulart : on n'ouvre pas ses livres pour vibrer à d'hypothétiques effets de tensions ni pour apprécier la folle originalité de l'intrigue mais juste pour s'amuser, tel un petit androïde acidifié, de ces gros amas de bêtises qui nous sont si gentiment jetés en pâture. Et pour ce qui est des conneries, Goulart est plutôt doué - surtout quant elles ont trait à ses deux domaines de prédilection : les robots et la pop culture. Ce qui donne, entre autre et en vrac, des ordinateurs facétieux, des hypnotiseurs de machines, des androïdes de la mort, des cyborgs baiseurs, Harlan Ellison, un tarzan mercenaire,
des scénaristes de western patriotico-pédérastique, un sigmund freud automatisé, du jazz à marteau-piqueurs et machines à laver, des nazis de fête foraine, tout ça et bien d'autres choses encore plus indescriptibles, parfois indigestes mais toujours délirantes pour peu que l'on soit sensible au post-modernisme débridé des années 70.

Malheureusement, l'aspect décalé (voire faussement pauvre) de son écriture, couplé à son absence totale de sérieux, n'ont jamais permis à Ron Goulart d'effectuer "une percée décisive" (dixit Stan Baret in le Science-Fictionnaire volume 1) sur le marché Français, ni même sur le marché de la Science-Fiction tout court. Authentiquement triste. La couverture U.S. de After Things Fell (Après la Déglingue) plaçait au dessus du titre cette citation promotionnelle de Philip K. Dick : "a sheer delight to read." Et c'était vrai !
Seuls 6 romans de science-fiction Goulartienne furent traduits en français, entre 1973 et 1984. On peut donc se démener pour trouver l'excellent Après La Déglingue (Opta / Anti-Monde, avec une sublime couverture de Caza), Heil Hibbler (Nouvelles Éditions Opta / Galaxie Bis - à noter une superbe typo arial taille 12, parfait pour les lecteurs aux yeux fatigués), L'Effet Garou (Marabout), Sacré Cyborg, L'Empereur des Derniers Jours et Séparations de Corps (tout trois aux Presses de la Cité / Futurama 2, tout trois aussi géniaux les uns que les autres, vraiment !). Aucun n'a depuis été réédité.
Certains de ses romans policiers (dont La Chasse à la B.D. - j'en parlerais prochainement...) furent publiés en Gallimard / Série Noire au début des années 90 mais n'en sont pas moins difficiles à dénicher.

Et si on a du courage, on peut s'amuser à traquer ses novelisations US sous pseudonyme de Vampirella, Flash Gordon (traduit en france) et Captain America, sa série Star Hawk aux cotés de Gil Kane et ses ouvrages d'histoires consacrés aux pulps et aux comics.