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RÉGRESSION À MAIN ARMÉE

L'HOLOCAUSTE CALIFORNIEN, DON PENDLETON
PÉRIL EN FLORIDE, DON PENDLETON
FUREUR À MIAMI, DON PENDLETON
GDV / L’EXÉCUTEUR # 45, 46 & 48, 1983/84

Pour le lecteur décérébré que je suis, c'est toujours un maousse plaisir que de s'envoyer en plein été une triple ration d'aventures viriles en provenance directe de l’Amérique reaganienne des années 80.
En fait, c'est un peu comme de s'ouvrir un pack de 33 export bien tièdes et bien secouées, un après midi ensoleillé, dans un parc au gazon constellé de déchets plastiques et de crottes fossilisées. Cette même sensation d'un bonheur bon marché, à la portée du premier gogo venu et pourtant si inaccessible au commun des mortels, cette bande de nazes qui, sous les conseils des numéros estivaux des revues littéraires, préfèrent investir dans ces putains de polars norvégiens et autres pavés prétentieux à 30 euros la ramette de 500 pages.
L’Exécuteur, lui, ne paye pas de mine. Ne coute pas lerche non plus. Ni à produire, ni à consommer. C'est du discount usiné à la chaine et qui affiche fièrement son systématisme dès la couverture.
Une poulette denudée au dessus d'un titre interchangeable, basé sur cette imparable équation du roman populaire qui combine un mot violent avec une indication géographique.
Résultat instantané sans trop se fouler : Massacre à New-York, Carnage Canadien, Destruction à Berlin, Atomisation Napolitaine ou encore Choucroute garnie chez Grand-Mère.
Le programme du bidule est aussi limpide que ce qu'évoque le sur-blaze du héros mis en scène. Lorsque l'on s'appelle L’Exécuteur, on n'est là ni pour cueillir des pâquerettes, ni pour conter fleurette... mais plutôt pour faire bouffer les pissenlits par la racine à ses ennemis.
Un secteur d'activité qui ne connait pas la crise.
Après 38 numéros passés à dézinguer du rital mafieux, Mack Bolan, dit L’Exécuteur, est racheté par les éditions Harlequin, via leur filiale Hunter, spécialisée dans la litterature virile, et chanstique de cible.
Fini les magouilleurs moustachus, place à l'extermination des terroristes de tout poil et toute obédience.
"En abandonnant sa guerre personnelle contre la Mafia, Bolan n'avait pas songé un instant à jouir enfin d'un repos bien mérité. Au contraire, il avait délaissé un ennemi pour mieux s'acharner sur un autre, plus insidieux, plus redoutable encore : le terrorisme.
Un monde où s'opposent les races, les religions, les idéologies, offre un terrain  idéal pour les fanatiques, paranoïaques, mégalomanes cherchant à semer la terreur parmi leurs frères humains. Et depuis trop longtemps, des bandes de ces nouveaux cannibales, agissant souvent sans idéologie ou politique cohérentes, tenaient le monde en alerte, laissant les pays libres impuissants devant la montée inexorable de la violence.
L'heure avait donc sonné pour Mack Bolan d'entrer dans l'arène..."
Mais revenons-en à la triple ration du jour. Je débute avec L'Holocauste Californien (en V.O. : Flesh Wounds).
Mack Bolan et sa petite amie, Rose d'Avril (ça fleure bon le Harlequin, ça !) y combattent une joyeuse bande de réactionnaires d'extrême-droite qui fument des joints tout en écoutant Pink Floyd.
Sacré cocktail.
Mais on est pas là pour finasser.
L'auteur, un certain Ray Obstfeld, enchaine les chapitres comme d'autres empilent les niveaux d'un shoot'em up retro. Il a la plume ultra-balourde (chez lui, les voitures freinent constamment des quatre roues !) mais s'exerce parfois (et avec un certain talent de scribouillard anémique) à la douce poésie du plomb brulant qui déchire implacablement la viande des corps honnis.
Ainsi, en page 40 :
"les balles dessinèrent un trait vertical parfait depuis le bas de son sternum jusqu'à la naissance de son cou, le thorax du gars s'ouvrit béant, comme une orchidée à l'instant de sa floraison."
Un peu plus tard, page 126, c'est un nouveau thorax qui, sous le coup d'une nouvelle rafale verticale, s'ouvre cette fois "comme une grenade bien mûre."
Quant au boss de fin, un vilain espion soviétique ayant projeté de bazarder une pluie de napalm sur un festival de country-rock, il a droit, page 201, à une balle de Beretta en plein dans la tronche. Résultat : sa gueule s'ouvre alors "comme un feu d'artifice de chair, d'os et de sang mêlés."
C'est beau.

Tout aussi bas du front, Péril en Floride (Paramilitary Plot, signé Mike Newton) s'affirme dès ses premières lignes comme un super-hit de la littérature commando.
C'est bien simple, dans ce bouquin, il n'y a pas d'histoire. Ou plutôt : pas de scénario. Juste 220 pages de Mack Bolan qui fait tonner, au fin fond des Everglades, son Beretta, son Auto-mag et son M-16 modifié.
Blam blam blam ! Tchaka-tchak ! Badaboum !
Face à lui, un trio de méchants machiavéliques et leur armée de mercenaires patibulaires. Les affreux séquestrent un vieux scientifique et menacent de répandre sur Saint-Domingue un virus mutant issu du bacille de la peste. Heureusement, à la toute fin, ils sont réduits en bouillie par notre héros chevauchant gaillardement un hélico. Ra-ta-tat ! Tchaka-zooooum ! Méga-boum !
Le style rappelle particulièrement celui des premiers Don Pendleton, avec ces longs paragraphes emphatiques et ces phrases qui t'en foutent plein la vue, façon "une fois de plus, Mack Bolan avait rendez vous avec l'Enfer" ou encore : "Il avait rendez-vous avec des prédateurs infiniment plus dangereux que les grands fauves qui hantent la jungle. Il avait rendez-vous avec le mal, l'injustice, la violence..."
Que du bonheur !
Les amateurs des Exécuteurs # 10 (Châtiment aux Caraïbes) ou # 25 (Le Commando du Colorado) seront largement rassasié, question infiltrations, explosions et dézingage de masse.
Je termine rapidement avec Fureur à Miami (Blood Dues, toujours signé Mike Newton). Des trois, c'est le moins distrayant. Bolan s'y farci des truands cubains et des mafieux à moustache comme au bon vieux temps des années 70... et c'est justement là que le bat blesse. Ça ne vaut pas Typhon sur Miami (L’Exécuteur # 4, auquel ce volume fait souvent référence) et c'est parfois presque aussi mauvais qu'un épisode signé Gerard Cambri.
Surtout, ça manque de blam blam blam, de ra-ta-tat, de zoum-zoum-whaap, de takataka-brrraaap-a-bam et de fiouuuu-kraaaakaaatchoum-bim-boum, bref, ça manque de punch.
Et là, pour le coup, j'ai envie de dire : Aaaarg !

ÇA VA BLITZER !

FUSILLADE A SAN FRANCISCO, DON PENDLETON
PLON / L'EXECUTEUR # 11, 1976

Peut-on rester insensible à la franche connerie sous testostérone d'un épisode de la série L'Exécuteur ? Je veux dire, à moins d'être une femme, un pacifiste ou bien un type pas très viril aux encoignures... Non, vraiment, c'est impossible. On ne peut pas resister. Voila un gars, l'Exécuteur, dit Mack Bolan, qui passe ses 220 pages mensuelles à dézinguer comme un enragé du mafieux pourri, soutenu par une écriture aussi lourdement sentencieuse que le staccato d'une batterie de mitrailleuses le soir au fond de la jungle vietnamienne. Que demander de plus ? De la finesse ? Laissez-moi rire.
A titre d'exemple pratique, saisissons-nous de Fusillade A San Francisco, onzième volume des très répétitives aventures de Mack Bolan. Ouvrons l'ouvrage en page 7, chapitre 1. "Le moment de faire la guerre était venu." Ça, c'est la première phrase du bouquin. Ça donne le ton mais la suite est bien meilleure, jugez un peu :
"Mack Bolan était prêt. Il allait blitzer, provoquer un orage terrifiant plein d'éclairs et de roulements de tonnerre, faire pleuvoir la mort et la destruction, laisser ruisseler la peur et la panique. Il allait passer à l'attaque."
Voila une introduction géniale, saisissante, totalement sturm und drang, totalement jouissive, totalement... totale ! Un paragraphe entier, juste pour dire au lecteur : "Mack Bolan allait buter des mecs, comme d'habitude."
Et comme d'habitude, ça ne tarde pas. Page 11, Mack Bolan fait exploser un tripot. Page 13, Mack Bolan achève les survivants. Page 17, sa mission terminée, le roman peut commencer. Un Exécuteur, période guerre à la mafia (c'est à dire les 38 premiers volumes), suit toujours le même schéma. L'affaire est réglée comme du papier à musique. Mise en bouche d'une vingtaine de page en un court assaut commando mené par l'Exécuteur. Puis une pause de 60 à 80 pages pendant laquelle 1) les mafieux font des tractations entre eux 2) Bolan rencontre (mais sans arrières pensées aucunes) des filles de petites ou moyennes vertus 3) la police du coin patauge. Le lecteur patiente donc jusqu'au milieu du roman, moment parfait pour lancer un deuxième baroud solo, plus long et plus violent. Bolan dessoude ainsi la moitié des truands de la ville qu'il visite et fait très peur aux autres qui redoublent de tractations. Ensuite, ça s'enchaîne implacablement. Les filles qu'il avait rencontré se font kidnapper, les mafieux multiplient les coups bas, Bolan délivre les gonzesses, tue quelques dizaines de salauds de plus, prépare sa prochaine attaque. Nous sommes page 180, c'est l'heure de l'ultime assaut contre la place forte des vilains avant l'épilogue. "Il ne baissa son arme qu'après avoir vidé le chargeur. Ils étaient tous morts, étendus, déchiquetés. Un monstrueux tas d'ordure."
Et tout cela, ad vitam æternam.
(putain, waouw, du latin, quelque culture que j'ai !)
Mais la routine n'empêche pas les variations qualitatives. Somme toute, en oubliant l'excellence tapageuse de son introduction, Fusillade A San Francisco est un Exécuteur plutôt décevant : trop de sous-intrigues disparates (les chinois) et trop de protagonistes inutiles (les chinois), le tout conclu à la va-vite par une révélation finale calquée sur le volume précèdent, Châtiment Aux Caraïbes, un morceau de bravoure para-militariste bas du front bien plus recommandable que cette Fusillade San Franciscaine gentiment médiocre. Mais la médiocrité n'empêche pas le plaisir, c'est ce que je me répète chaque matin.



LE BLITZ DE BOSTON, DON PENDLETON
PLON / L'EXÉCUTEUR # 12, 1976

Tant que nous y sommes, et avant que je fasse une dépression, abordons rapidement le volume suivant, Le Blitz De Boston, un épisode assez satisfaisant en dépit d'une introduction fort sobre. Il nous faut en effet patienter jusqu'au quatrième chapitre, page 57, pour que des voitures explosent, des maisons s'effondrent et des mafieux moustachus se fassent trouer la couenne comme des malpropres. C'est long, mais ça vaut néanmoins le coup d'attendre. Car page 57, Mack Bolan déloge une horde de mafieux de leur club-house à coup de mortier.
"Toutes les trois secondes le mortier toussait et un morceau d'enfer planait au dessus du parc avant de s'écraser avec une explosion dévastatrice. Après l'envoi du dernier obus il observa les résultats qui auraient rempli de fierté une compagnie d'artilleurs. Puis il saisit de nouveau le détonateur à télécommande et fit sauter le club."
La finesse, une valeur en baisse.
En tout cas, page 57, le bouquin est enfin sur ses rails. Pendleton, ouvrier consciencieux de la littérature pour mectons frustres, honore syndicalement son contrat. Le Blitz De Boston porte bien son titre mais n'ira pas faire trop de zèle sur le terrain de la surenchère. Quoi qu'il arrive, un roman l'Exécuteur sait rester carré, propre, droit, sans excès.
Donc, dans cet épisode, Mack Bolan, notre one-man army proto-punisher favori, est à la recherche de son jeune frère et de sa petite copine, kidnappés (tiens donc !) par un mafieux pas très futé. Je dis pas très futé puisque le gonze malfaisant, non seulement il ne sait pas quoi faire de ses otages (un comble !) mais en plus il ira jusqu'à faire croire à Bolan qu'il les a tués ! Mauvaise idée, ça.
"Ce n'était plus une guerre.
Ce n'était plus une exécution.
Ce n'était plus l'Exécuteur s'acheminant sûrement vers l'ennemi.
C'était Mack Bolan, le frère de Johnny, l'amant de Val, qui fonçait sur les meurtriers des êtres qu'il avait aimés, qui allait les tuer.
[...] Et pour une fois, il allait tuer avec plaisir."
Bref, voila l'Exécuteur en super-rogne, qui détruit tout sur son passage, extermine les pourris par centaines et délivre les otages à la fin. Comme d'habitude, en somme ?

Oui, comme d'habitude. Un roman totalement con, prévisible, routinier, avec des gars qui se canardent comme si il s'agissait d'un sport olympique, du mobilier urbain qui vole en éclat à chaque nouvelle bataille et un flot intarissable d'hémoglobine sicilienne qui menacerait presque en fin de roman de submerger la ville.
Étrangement, aussi idiot que cela puisse paraître, c'est une formule dont je n'arrive pas à me lasser.

C'ETAIT MIEUX AVANT...

SABRER N'EST PAS JOUER, DON PENDLETON
PANIQUE A REYNOSA, DON PENDLETON
VAUVENARGUE / L'EXÉCUTEUR # 248 & 249, 2008

Après m'être administré, coup sur coup, deux très bons Pendleton des débuts, respectivement le 6 et le 18 de la collection, je me suis posé une question, essentielle, "ça vaut quoi, l'Exécuteur aujourd'hui ?"
La réponse fusa, avec rapidité : pas grand chose, non, vraiment pas grand chose.
Mais développons, développons.

1980, Don Pendleton, l'original, premier du nom, commence à se lasser de sa série à succès. Des romans de l'Exécuteur, le bonhomme en a allongé 37 sur une période de 11 ans. Pas vraiment une sinécure que de se renouveler à ce rythme... et avec une donne de départ aussi basique. Car, après 38 romans, Mack Bolan dit l'Exécuteur a approximativement dessoudé tout les membres de la mafia en activité, ceux à la retraite, leurs complices de tout bords, leurs associés, leurs femmes, leurs moujingues, leurs animaux de compagnie et tout les cousins éloignés jusqu'à la cinquième génération. Un petit peu comme Charles Bronson dans les trois derniers Death Wish, ce n'est plus l'essoufflement, c'est une apoplexie foudroyante qui guette au détour de chaque épisode.
Bref, Pendleton décide de l'écraser. Un dernier petit tour en forme de semaine sainte apocalyptique et il brade sa série et son nom d'auteur à Hunter Books, filiale masculine de Harlequin.
Voila donc Pendleton transformé en house-name derrière lequel séviront inlassablement des hordes de ghost-writers en frais locatifs, véritables machines à écrire sans âmes officiant dans tout les azimuts de la litt' pop', du western à l'espionnage en passant par la science-fiction. Salut Stakhanov. En un peu moins de 30 ans, la franchise Mack Bolan effectue un bond de 600 (et des brouettes) épisodes. ça fait beaucoup de salades pour un gars dont le seul et unique hobby consiste à maraver sans sommations des truands italiens.
Mais voila, il y a un twist. La grosse surprise. Dès son transfert chez Hunter Books, Bolan saute le requin, pour paraphraser les fans de Happy Days. Changement d'activité radical et Fini les pizzaioli qui magouillent, bonjour les terroristes internationaux. Les russes, les chinois, les cocos - au départ. Ensuite, un peu de tout. L'Exécuteur se globalise méchamment. Aujourd'hui, ce sont les Arabes et les Mexicains qui ont les faveurs des Pendleton Anonymes.

Ainsi, dans Sabrer N'est Pas Jouer (Hard Pursuit, signé Douglas P Wojtowicz), Bolan est mandaté par les USA pour mettre fin aux activités d'un islamiste barbu et sa bande de ninja Al-Qaida montés sur meules Honda. Mais n'est pas American Ninja IV qui veut et cet Exécuteur-là se traine sur 250 pages d'un ennuyeux marathon désertique écrit par un rescapé des forums de fan-fiction. En résulte quelques séries de références prétendument branchées mais véritablement lourdingue au Seigneur Des Anneaux, aux films de John Woo, à Matrix. Ce genre de chose...Le reste, entre deux explosions d'hélicoptères au bazooka, est comblé par d'interminables listing d'armes à feu. J'appelle ça de la virilité poudre aux yeux. Dans le style action, Sabrer N'est Pas Jouer est saboulé comme une romance pour ado mal paluché et se défargue de sa camelote sans entrain ni étincelles.

Comparé à l'affreux du paragraphe precedent, Panique à Reynosa (Hostile Crossing, Jerry vanCook), second Exécuteur nouvelle donne du mois, s'en retrouve un peu mieux troussé mais ne se montre certainement pas plus glorieux dans son déroulement. C'est un enchevêtrement peu inspiré de grosses ficelles éculées et de câbles d'ascenseurs hors-services, une jaffe indigeste dans laquelle surnagent quelques bribes d'action pachydermique et de psychologie tendance paté en croute de série télé.
Cette fois, les mexicains sont à l'honneur. De satanées ordures, avec leurs magouilles politiques et leur trafics. Drogues, armes, immigrants. Tout le monde connait leur mauvaise réputation. J'ai vu pas mal de reportages sur le câble, ça concorde vachement avec les faits que rencarde ce machin.
Heureusement, comme dans Invasion USA, Bolan est là pour empêcher les piques-assiettes basanés de surpeupler son beau pays, d'y travailler au noir pour un salaire de misere et de dealer de la chnouf à la jeunesse incrédule afin d'arrondir les fins de mois difficiles.
Mais comme si ce point de départ n'était pas suffisant (moi, en tout cas, ça me suffisait amplement, les mexicains), l'auteur s'empresse de rajouter à son gros bordel une bande d'étudiants américains gauchistes révolutionnaires en manque de spring-break et qui, avec l'aide des méchant mexicains mafieux (faut bien qu'ils servent à quelque chose, ces crouillats-là), decident de foutre à feu et à sang les états unis.
Dit comme ça, Panique à Reynosa peut donner l'impression d'auticher le palpitant à moindres frais mais c'est en vérité un sacré concentré d'emmerdement littéraire dilué à l'extrême - à éviter de toute urgence. D'ailleurs, cette dernière constatation s'applique aussi à Sabrer N'est Pas Jouer comme à l'ensemble - enfin, j'imagine mais je n'irai pas vérifier - de la production Hunter.
Bref, si le Don Pendleton original faisait dans le sous-Mickey Spillane, avec cette même roublardise, ces légers accents réactionnaires et toute la panoplie populaire qui va avec, les franchisés Hunter, eux, font dans le sous-Tom Clancy. Forcement, l'ersatz a moins de charme. Et même en tenant compte de l'augmentation pulmonaire des moulures de couverture dont nous gratifie pour les éditions françaises ce bon vieux Gérard de Villiers, ça ne passe pas. Sincèrement, mieux vaut investir dans un hors-série des filles de playboy. Ou dans l'un des 38 premiers Exécuteur, tous disponibles en grosse quantité chez les mauvais bouquinistes pour quelques dizaines de centimes.

DANS TA FACE !

ASSAUT SUR SOHO, DON PENDLETON
TEMPÊTE AU TEXAS, DON PENDLETON
PLON / L'EXECUTEUR # 6 & 18, 1975/1977

Contrairement à ce que pourraient nous faire croire les sublimes couvertures concoctées par ce gros roublard de Gerard de Villiers, toujours aussi efficace lorsqu'il s'agit de refourguer sa camelote de supérette au français moyen, la série L'Exécuteur ne raconte pas (mais alors pas du tout !) les péripéties possiblement palpitantes d'un vieux pervers épiant de jeunes californiennes dévergondées avec la lunette de visée d'un fusil de sniper.
Désolé de vous décevoir, les mecs.

D'ailleurs, puisqu'on en est justement à l'heure des mises au point, faut que vous le sachiez, le niveau de chasteté littéraire d'un volume de L'Exécuteur est étonnamment élevé. Vous l'achèterez peut être pour la photo de couverture mais vous ne trouverez rien de semblable à l'intérieur.
Bien entendu, vous aurez droit, de-ci de-là, à quelques nymphettes blondes vaguement exhibitionnistes, des jeunes filles de millionnaires capturées par les méchant "avec des jambes fines et interminables, des cuisses soyeuses [et] des seins agressifs comme des obus" (les jeunes filles, pas les méchants) mais ça n'ira pas plus loin. Pour le sexe, il faudra repasser, ou plutôt toquer à la porte des publications voisines.
L'Exécuteur, ce n'est ni la Brigade Mondaine, ni La Police Des Mœurs et encore moins SAS. C'est simplement de la testostérone garantie coït-free pour gros puceaux burnés, les aventures ultra-énergiques d'un ex-marine, vétéran du Vietnam, fétichiste de l'armement à outrance, adepte des combinaisons noires intégrales, spécialiste de la blitzkrieg en solitaire et bien décidé à exterminer sans pitié tout les membres de la Mafia, l'organisation responsable de la mort brutale de sa petite famille. Bref, L'Exécuteur, c'est le Punisher avant la lettre et sans le crane de mort sur la poitrine.

La meilleure série Plon/GdV/Vauvenargue avec l'Implacable.
Le super pied.

Ainsi, dans les 38 premiers volumes de la série, tous (excepté le 16) signés de la main du Don Pendleton original avant qu'il ne cède les droits à Harlequin/Hunter et sa horde de ghost writers for hire, Mack Bolan dit l'Exécuteur traque du mafiosi à travers l'ensemble des états unis, de Pittsburg à Detroit, et parfois même à l'international comme en témoigne le présent volume, Assaut Sur Soho qui, vous l'avez deviné, se déroule dans le Londres groovy des seventies.

Cet épisode, sur l'ensemble de la série, fait en quelque sorte figure de fill-in, une pause entre deux massacres et, si il n'en est pas moins désagréable, manque singulièrement de punch.
Primo, Bolan est franchement déprimé. "Depuis un certain temps, sa vie se déroulait avec une violence constante qui finissait par sembler monotone; il avait fini par accepter le fait sinistre que chaque lieu où il se trouvait devenait un champ de bataille."
Et donc, bourré de tranxene, Bolan ne fout malheureusement pas grande chose à Soho. Tout juste se charge-t-il de deux ou trois petites fusillades de pas grand choses, presque bâclées dans l'exécution, et puis s'en va. Ce n'est pas un assaut, c'est une sieste.
Le lecteur, avide de spectaculaire abrutissant, en restera sur sa faim.
Ensuite, Le club SM, les sex-shops, les boites branchées du Soho 70, tout ça n'est que vaguement effleuré, comme si il s'agissait d'un arrière-plan flou, indistinct, sans le moindre intérêt. C'est, faut l'avouer, pas franchement bien campé. Pendleton, auteur de droite dans l'absolu, semble préférer des décors moins fantaisistes pour raconter son histoire générique - une histoire qui se résume toujours à : Mack Bolan débarque dans un coin envahi par des mafieux, en bute certains, se fait traquer par d'autres, les bute à leurs tours, fait tout sauter à grand coup d'explosifs comme au bon vieux temps du 'Nam puis s'en va, ailleurs, vers de nouvelles aventures identiques.
A ce train là, on peut admettre que notre héros soit ,de temps à autre, quelque peu blasé par ses fonctions.

Mais moi, blasé ? Pas du tout !
Car les frasques pyrotechniques de l'Exécuteur sont toujours servies à grand renfort de catch-lines du tonnere et de fin de chapitres fulgurantes. Et à ce petit jeu, Tempête Au Texas peut faire figure de morceau de choix, avec son introduction en forme de baroud d'honneur
bigger than life : Bolan débarquant au milieu des puits de pétroles texans, dézinguant du rital comme si la réalité s'était soudain recalculée à l'image d'une cartouche d'arcade Metal Slug III, tandis que l'auteur, ce merveilleux robot du recit de gare ultra-calibré, balance à tout-va de petites fulgurances jouissives et immatures du type :
"Il y avait quelque chose de pourri au royaume du Texas. Bolan le savait, mais il ne savait pas exactement ce qui pourrissait l'air texan."
Plus fort que les haïkus à mémé !
Et le reste est à l'avenant, surtout si vous appreciez le chant du lance rocket, le soir au fond du bois. Car L'Executeur old-school Pendleton-style, ça ressemble un peu à une bonne vieille bande de la Cannon - un truc bien troussé, sans trop d'excès mais avec suffisamment de gueule pour garantir le spectacle. Ce n'est peut être pas à la hauteur d'un SCUM mais ça vaut largement mieux que les 900 pages habituelles d'un Dantec desormais bien incapable de reproduire le prologue de son Babylon Babies.
Ce dernier exemple étant totalement gratuit, on va faire plus simple : vous aimez Charles Bronson periode Golan/Globus ? The Exterminator ? Le Punisher entre les années 80 et 90 ? Alors Mack Bolan, c'est du tout cuit pour vos gueules, les mecs.