Affichage des articles dont le libellé est [AUTEUR] YVES DERMEZE. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est [AUTEUR] YVES DERMEZE. Afficher tous les articles

YVES DERMÈZE SANS CARTIER

CORRIDA POUR UNE ESPIONNE, YVES DERMÈZE
OPERATION À FROID, YVES DERMÈZE
LIQUIDÉ... L'ESPION, YVES DERMÈZE
S.E.G. / SERVICE-SECRET # 102, 109, 114, 1968/69

Yves Dermèze œuvra beaucoup dans l'espionnage populaire des petites collections années 50 et 60. Je l'expliquais dans le billet précèdent, j'y reviens aujourd'hui sous un autre angle.
Car contrairement à la majorité des auteurs investis dans le genre et fixés sur un seul et unique héros, Dermèze variait aussi les plaisirs en écrivant de temps à autres pour la S.E.G. des romans d'espionnage au générique desquels Archibald Cartier, son super agent secret sixties habituel, ne figurait pas.

C'est le cas de Corrida Pour Une Espionne et dans lequel un certain Tony, espion américain, court après Hilda, une ex-espionne en possession d'un document extrêmement important.
L'action se déroule aux alentours de Caracas, les services Russe font leur apparition sous les traits d'un certain Borodine et Dermèze se concentre sur son habituelle formule de la poursuite infernale comme squelette d'intrigues.
Le décors change à la vitesse (très pointue) des protagonistes et les alliances varient d'un chapitre à l'autre.

Trahisons, bagarres, crocodiles affamés, fusillades.
En dépit de quelques grosses ficelles, d'une certaine lassitude pointant pendant le dernier quart du récit et d'un final expédié sans finesse, le lecteur féru d'aventures trépidantes pourra s'estimer satisfait.

C'est aussi le cas de Liquidé... L'Espion. Le héros s'y prénomme Laurent. Agent Français. Il travaille en collaboration avec Madrier, un gonze qu'aurait fait un assez bon second rôle du coté de chez San Antonio, et Cloclo, une modette twisteuse de bonne famille façon Salut Les Copains - Sylvie Vartan jouant les baroudeuses B.C.B.G.

D'entrée (ou presque), Dermèze cite La Double Vie de Théophraste Longuet, le premier Gaston Leroux, et lance son roman sur des prémices pour le moins interloquant.
Aux habituels imbroglio d'espions, il substitue en effet une histoire à dormir debout d'indicateur fantôme.
Les agents secrets de la SDECE s'adonnant aux joies du spiritisme et à l'invocation d'esprits de l'au-delà. Tables tournantes et ouija en lieu et place des micro-émetteurs et des fréquences radio.
Du jamais lu !

Hélas, la suite rationalise le tout. C'est malheureux. On aurait pu espérer un vrai roman d'espionnage fantastique (à ma connaissance, un sous-genre inexistant) mais, oh ! Dermèze connait suffisamment son boulot pour nous servir une jaffe plus qu'appréciable et le plaisir de lecture, pour peu que l'on se montre indulgent, y est bien présent.


C'est enfin le cas de Opération À Froid, dernier bouquin de notre série et meilleure surprise de cette triple pioche.
Cette fois, le héros se nomme Leo Baumerin, dit Le Canard en raison de sa patte folle, la gauche.
Il ne marche pas, il clopine, notre espion. Qu'importe. Il est envoyé au nord du Groenland, saute en parachute et atterri dans une base US.
Sa mission ? Dénicher un traitre. L'auteur et les évènements aidant, il y dénichera bien plus.

"Tout ceci était parfaitement irréel : le silence, la nuit, cette neige qui ouatait le bruit des pas. Une scène de cinéma de 1925. Manquait le piano d'accompagnement, mais peut-être allait-il se déchainer d'une seconde à l'autre, un piano bien rythmé et fracassant."
La sauce est relevée par un groupe de scientifiques Russes chapeauté par une espionne retorse, Maria Petrovna, "la star classique, l'obligatoire élément féminin."
Reclus dans un paquebot prisonnier des glaces, nos soviétiques mènent sur la population locale d'inquiétantes expériences, droguant et charcutant les esquimaux du coin.
Climat oppressant. Angoissant même. L'isolement dans la nuit infinie du Groenland et le piano qui monte crescendo.
Opération À Froid fonctionne comme
Western polaire. Affrontements tacites puis déchaînement inouï de violence... jusqu'à la mort.
À ce titre, le chapitre final est exemplaire puisqu'il parvient à respecter les règles du roman d'espionnage sans pour autant désamorcer les ressorts dramatiques sous-tendus par le décor et développés par l'intrigue.
Mais faisons simple.
Lorsque le lecteur est captivé par les exploits qui lui sont présenté, se trouve maintenu en position d'équilibre sur le bord de son siège par des effets répétés de tension et en vient à se faire du soucis quant au destin du personnage principal, alors on peut affirmer que l'auteur a abattu son turbin avec un taux de réussite dépassant le 100 %.

Le baromètre de contentement proche de l'explosion, je me permettrai néanmoins de rajouter que, question espionnage d'après guerre, Opération À Froid est à ranger dans le même panier que le Silence, Clinique ! d'Eddy Ghilain.
Ou comment un art de la routine sur papier se découvre de merveilleuses ressources d'efficacité et de rythme, accomplissant sans prétention aucune mais avec classe et assurance le contrat-confiance du divertissement en hall de gare ou fauteuil-club - c'est à dire :
2 HEURES D'ENCHANTEMENT NON-STOP

YVES DERMÈZE, LE ROI DE L'AVENTURE

Si il y eu, en France, un grand spécialiste de la littérature d'aventure et d'action, de la littérature pour garçons qui distrait et fait rêver, de la littérature trépidante et consommable en moins de 2 petites heures dans un fauteuil, ce fut sans aucun doute Yves Dermèze.
De son vrai nom Paul Bérato, Dermèze débuta dans les années 40 avec des feuilletons exotiques et mystérieux publiés dans Coq Hardi ou le journal de Mickey. Il s'essaya parallèlement au roman policier classique et à la romance pour tous puis trébucha enfin sur la littérature d'espionnage.

Début 50, on l'aperçoit ainsi aux éditions Jacquier, collection La Loupe Espionnage avec les aventures du Grand Mec puis, en 56, et alors qu'il vient de donner successivement deux chef-d'œuvres à la SF Française (Le Titan de L'Espace et Via Velpa, tout deux publiés par les éditions Métal en Série 2000), il entre à la S.E.G., petite maison spécialisée dans le petit format - ces livres extrêmement fragiles, constitués de trois cahiers de 16 feuillets à la consistance d'un papier toilette premier prix et agrafés à une couverture légèrement glacée. Une illustration criarde figure en dessous du logo de la collection : 078 Service Secret.
S'en suivront alors, pour Dermèze, et jusqu'à la fin des années 60, une bonne soixante-dizaine de romans - et cela, uniquement dans le genre de l'espionnage. À coté, Bérato poursuit son œuvre dans la littérature d'aventure au sens large.
Il passe de la SF aux récits de cape et d'épée sans sourciller.

Ce n'est pas un homme, ce gars-là, c'est une machine !
On comprend aisément qu'il eut fasciné Michel Jeury, lorsque ce dernier, tout jeunot, aspirait à la profession d'écrivain du merveilleux.

"Paul Bérato-Dermèze habitait en Lot-et-Garonne comme moi ! Mes parents exploitaient une petite métairie dans l'extrême nord du département… Je n'ai pas pensé tout de suite que je pourrais lui rendre visite. Je digérais lentement cette chose ahurissante : on pouvait être un romancier d'aventures et habiter en Lot-et-Garonne. Cela semblait incroyable. Mais tous les espoirs m'étaient permis. Ma vocation date peut-être de ce choc…"
Michel Jeury, entretien uchronique paru dans Opzone # 1, 1979

Mais revenons-en à l'espionnage. De 56 à 61, Bérato allonge du texte sous le pseudonyme de Francis Richard. L'année suivante, il se fixe définitivement sur celui d'Yves Dermèze.
À cette époque, la littérature d'agents secrets truste le marché du divertissement. La concurrence se fait rude sur le secteur et La S.E.G. abandonne alors le fascicule jetable, bien trop démodé, pour le livre de poche. Le nombre de feuillets augmente, la couverture se retrouve imprimée sur du carton souple mais l'illustration tapageuse demeure.
Certaines recettes ne changent pas.

Comme les autres auteurs turbinant dans le genre, Dermèze se crée un héros récurrent, quelque chose d'aussi emblématique que de transparent.
Il lui donne le nom d'Archibald Cartier, le fait travailler pour une branche de la C.I.A. dirigée par un certain Mr Smith. Rien ne distinguera cet espion de ses collègues super-stars si ce n'est que, écrit par Dermèze, sa lecture est mille fois plus passionnante qu'un OSS 117 ou un Francis Coplan lambda.
Bien entendu, les affaires sont routinières. D'un auteur à l'autre, nos hommes de l'ombre se démènent continuellement dans des intrigues aux ficelles identiques.
Ainsi, selon l'humeur du moment, Cartier doit protéger un scientifique, démasquer un traitre, récupérer une formule secrète ou bien encore empêcher une nation ennemie de déclencher une nouvelle guerre mondiale.

Ce qui fait la différence ? Le rythme auquel ces exploits sont narrés. Climax à chaque fin de chapitre et renouvellement constant de l'action et des enjeux.
Si il existe une idée qui résume parfaitement l'art de l'écriture chez Dermèze, ce serait celle du mouvement perpétuel. Ses personnages se courent les uns après les autres jusqu'à épuisement (de l'espace d'impression) et l'histoire s'en trouve parfois réduite à une seule et unique poursuite de 200 pages.
Chasse à l'homme ou course contre la montre.
C'est la fuite en avant, la fuite vers l'aventure.

Toute l'œuvre de Bérato-Dermèze est bâtie sur cette notion, ne laissant à aucune des parties investies dans son déroulement (auteur, lecteur, protagonistes) le temps de récupérer son souffle.

Et c'est bien cela qui constitue la grande force de Dermèze, artisan aussi solide que sublime du récit d'aventure : il roule vite et ne s'arrête jamais. L'intrigue est une route, les incohérences des nids de poule. À la vitesse à laquelle il va, ne se ressentent alors plus que quelques légers cahots.
Et tout le reste n'est qu'illusion de grand spectacle, un tableau d'automates à la mécanique aussi bien huilée que parfaitement saisissante, la littérature d'évasion dans toute sa splendeur.

SCI-FI ((( Z ))) POP # 10 : LES ELFES ANTICIPATION


LA LEGENDE DES MUTANTS, NICOLAS DOAZIT
LES ENVOYÉS DU PARADIS, YVES DERMEZE
EDITIONS ATLANTIC / LES ELFES ANTICIPATION, 1963

Au début des années 60, en dehors du Fleuve Noir, les amateurs de SF Française pas très sérieuse n'avaient pas grand chose à se mettre sous la dent. La plus part des petites collections ne dépassaient pas la demi-dizaine de volumes - voire bien moins comme Les Elfes Anticipation et leur superbe record de deux uniques romans en une année d'existence.
Mais avec un nom aussi craignos (Les Elfes, quelle idée !), fallait tout de même pas s'attendre à faire beaucoup mieux.
Nous les remercierons tout de même pour la facilité avec laquelle il est possible de compléter sa collection.
Et aussi pour leurs couvertures très Jack Kirby-ienne (je parle, bien entendu, de la photocopie spatiale en fond) signées Jef De Wulf.
Et finalement, pour leurs deux pauvres ouvrages, qui, à bien y regarder, ne sont pas si mauvais que ce que j'aurai pu croire.
(A vrai dire, ils sont aussi appréciables qu'un bon Anticipation de la période blanche. Ça ne tient peut être pas la comparaison avec du hard science parano-speculatif anglo-saxon mais ça se lit avec plaisir et en souriant des idées farfelues qui façonnent aproximativement l'intrigue.)
"Vous savez tous ce que fut le Grand Désastre. Les différents peuples [...] se livraient une guerre froide qui les entraînait à faire des stocks sans cesse plus importants d'explosifs nucléaires. Un jour, la terre a traversé un nuage de rayons cosmiques et tout ces explosifs ont éclaté en même temps, et la radioactivité a causé des ravages épouvantables."
Ça, c'est le début de La Légende Des Mutants de Nicolas Doazit, pseudonyme de Maurice Vernon, un rescapé des éditions métal (mais j'en parlerais plus en détail une prochaine fois).
Le coup des rayons cosmiques qui font exploser tout l'arsenal atomique US et Russe est super cool. Encore une facétie à mettre sur le compte de cette satanée ceinture de Van Allen.
(Rock n roll dude !)
Pour le reste, La Légende Des Mutants est un roman un peu fantasque, très naïf et surtout très très gentil. Rien à voir avec Docteur Bloodmoney ou du Joël Houssin. Si vous aimait l'ultra-violence, le sexe brutal et le gore à profusion, passez votre chemin. Nicolas Doazit fait du post-nuke à la sauce Oui-Oui ou Bilbo le Hobbit. C'est un truc (presque) pour gamin, plutôt bien troussé, assez attachant et sans temps morts mais qui ressemble tout de même plus à La Petite Prairie Radioactive qu'à L'Autoroute Sauvage.
Ayant la flemme de le résumer, disons que ça concerne un gentil mutant télépathe amoureux d'une jolie humaine et combattant de méchants monstres pour sauver sa maman et ses amis.

Plus réussi et pourtant moins divertissant (un comble ?), c'est Les Envoyés du Paradis signé par un vieux routier du gare français, Yves Dermèze.
Dermèze, les amateurs de SF le connaissent principalement sous son pseudonyme certifié Fleuve Noir de Paul Bera. Mais ça, c'est dans les années 70. En 1963, Dermèze est surtout fournisseur en gros d'espionnage sautillant pour la SEG et compagnie. Bref, pas encore un spécialiste de SF poubelle et fantastique jetable.
Du coup, Les Envoyés Du Paradis fait très prototype des Fleuve Noir / Paul Bera à venir. On y retrouve le même mélange d'aventures spatiales débridés et d'espionnage fantaisiste - C'est en quelque sorte du SEG collection Service Secret avec des vaisseaux galactiques et des pouvoirs psychiques en sus. Et des extraterrestres en remplacement des sempiternels communistes.

Une bonne chose pour les allergiques aux intrigues du rideau de fer.

L'autre bon point du bouquin, c'est sa première partie, une course-poursuite urbaine très enlevé, avec un climax à chaque fin de chapitre. Des effets faciles, parfois un peu poussifs, mais le traitement est exemplaire, assumant totalement la gratuité de sa surenchère dans le spectaculaire. Et puis, il faut l'avouer, c'est exactement cette exploitation sans retenue de ficelles usées qui fait tout le charme de la littérature populaire.
Malheureusement, une fois passé le dixième chapitre et jusqu'à ses dernières pages, Les Envoyés Du Paradis arbore un rythme beaucoup plus ronronnant. Un coup dur pour l'intérêt du lecteur. D'autant qu'au même moment, le bouquin souffre d'un autre problème assez sérieux : L'auteur n'a pas de grand méchant à opposer au héros. Pas de scientifique fou, pas de tyran mégalomane, juste un conflit spatial un peu flou.
Mais où est Peter Randa quand on a besoin de sa finesse ?

Bref, une absence d'enjeux clairs (ou tout simplement caricaturaux), de l'action pas forcement trépidante, tout ça jure avec l'exécution quasi-parfaite des 90 premières pages. Mais ça ne devrait pas déranger outre mesure les habitués de la production Fleuve Noir Anticipation. Les baisses de rythmes, les secondes parties qui traînent en longueur, les déroulements laborieux, c'est une spécificité majeure des productions de ce type.
Ils paraîtrait même que certains lecteurs en viennent à l'apprécier...

ESPIONNAGE AU RABAIS POUR LECTEURS EN DETRESSE (SUITE)

UN DOIGT DE VODKA, YVES DERMEZE
S.E.G. ESPIONNAGE / SERVICE-SECRET # 18, 1963

L'espionnage est certainement le registre littéraire le plus pauvre, qualitativement parlant, des années 50 à 70.
Pour la quantité, c'est l'inverse. Le genre a été produit jusqu'à épuisement. Quant à l'intérêt actuel que peuvent lui porter les lecteurs de romans populaire, il est proche de zéro.
Car l'espionnage, c'est un genre sans âme, sans chef-d'œuvre et sans ambitions. C'est la branche Fleuve Noir la moins cotée. C'est auss
i une gigantesque production d'époque type L'Arabesque qui se récupère pour quelques dizaines de centimes dans des vides-greniers miteux - Ce qui n'empêche pas de découvrir de temps à autres quelques petites réussites du genre, comme ce Doigt de Vodka signé Yves Dermeze, vieux routier du populaire capable du très distrayant comme du plutôt ennuyeux.

Une double-surprise donc, avec un titre pas très raccord. Ça ne parle pas de vodka et les habituels conflits Est / Ouest servent uniquement de point de départ pour un petit drame noir joliment monté. Le reste, c'est deux agents de la CIA contraint à collaborer.
Le premier, Paulo Fischer, est un tueur froid et calculateur, un type effacé et silencieux, un juif qui a connu tout jeune les camps. Le second, Ernst Gobord, est un diplomate, un être lâche et nerveux, un ancien SS de Varsovie qui tente d'effacer son passé.
Leur travail en commun consiste à escorter en vacances Arturo Figueras, un scientifique à la solde de la NASA et convoité par les Soviétiques. Sauf qu'Arturo n'a pas que les vacances en vue - il ne
s'agit que d'un pretexte pour accomplir une vengence personnelle. Et Ernst Gobord n'est pas seulement employé par la CIA. Du coup, tout dérape et Paulo Fischer, l'implacable tueur, se charge du ménage.

Les ficelles sont usées mais, de par son rythme assez trépidant à enchainement de coups de théâtre, ce petit gare se montre constamment surprenant.
Dans le genre, c'est un minimum syndical qui n'est jamais respecté; la preuve avec quatre autres ouvrages à la médiocrité douloureuse...


L'HONORABLE AGENT DOUBLE, GIL BREHAT
S.E.G. ESPIONNAGE / SERVICE-SECRET # 07, 1962

Commençons en douceur.
Nick Kisly est un super espion américain de la CIA chargé d'une mission super tarabiscotée. Avec son avion U2 super sophistiqué dernier modèle,
il doit survoler certaines zones russes top secrètes, les photographier sur une pellicule qui n'accroche pas puis de s'écraser dans la Tounga pour permettre aux cocos de récupérer l'avion, de l'examiner et de se rendre compte qu'en fait, il n'est pas si super que ça (car la pellicule qui n'accroche pas, c'est une ruse)...
Sauf que le plan méticuleusement orchestré foire pour de vrai et Nick, coincé chez ces salauds de Ruskoffs, se retrouve dans la super merde.
Heureusem
ent que de gentils paysans lui offrent une cache - et aussi leur fille, une petite boulotte super conciliante.
Du coup, Nick passe la moitié du bouquin dans la grange, derrière un tas de foin.

Bilan, un roman pas très super dans lequel, vous l'aurez compris, il ne se passe strictement rien. Et, circonstances aggravantes, le titre et la couverture sont mensongers. Vous ne trouverez dans cet ouvrage ni nénés, ni agents doubles. Une vraie escroquerie.

Dans le genre super-naze, autant lire du Frank Peter Belinda.


LE SOUFFLE DE LA BAGARRE, FRANK PETER BELINDA
LA LOUPE ESPIONNAGE # 52, 1958

Justement, voici Frankie Belinda, le plus grand de tout les agents de gribouillages secrets, l'esthète du bétonnage stylistique, le belge de l'écriture partie en vrille, loin, très loin dans l'absence totale de retenue et de bon gout.
Mais laissons plutôt la parole à son éditeur, qui a des choses très importantes à nous communiquer :

"Il est des auteurs dont on dit qu'ils produisent dix livres sans pour cela accrocher le vaste public et qui sombrent dans l'oubli après un instant de gloire, mais il en est dont on dit qu'ils produiront cinquante livres tout en récoltant toujours plus de lecteurs. Notre maison, qui a lancé Frankie Belinda, savait bien ce qu'elle faisait.
Non seulement il est devenu l'un des meilleurs auteurs d'action d'après-guerre, mais encore continue-t-il à écrire des manuscrits qui accrochent, qui ont tous un son nouveau et se détachent nettement de la littérature contemporaine.
Le cinquante-huitième manuscrit de l'auteur en fait foi. Il vous tiendra haletant pendant plusieurs tours d'horloge. Il vous obligera à reconnaitre que son Souffle de la Bagarre est réel, puissant, unique et promu à un grand avenir, tout comme tous ses autres livres d'action d'ailleurs."
Merci, Messieurs la Loupe.
(Nous noterons au passage que l'éditeur écrit aussi bien que son auteur fétiche...)

Mais abordons tout de même ce fameux Souffle de la Bagarre - un souffle d'asthmatique, si je puis me permettre, vu le niveau pas très élevé d'action et de suspense censé parsemer avec vigueur ses 250 longues pages.
En fait, le bouquin fait plutôt dans le guide touristique de Lièges et de ses environs. Un truc somme toute pas très palpitant : John Kallum, notre héros Belgo-Ricain, passe plus de temps à boire des barons de bière blanche installé à des terrasses liégeoises qu'à traquer le gros espion allemand Herr Gruber et son sbire polonais, le veule Larko.

Comme l'affirme Belinda dans les mentions légales, "le seul but de l'auteur est de promener le lecteur dans l'une des villes qu'il aime et d'y construire une histoire basée entièrement sur la fiction."
Pour le reste, ça ressemble à du Paul Kenny des débuts, mais en bien plus fatigué, écrit dans l'inimitable style lourdingue de Belinda et avec son habituelle ambiance débile. Pour lui trouver une qualité, je dirais que c'est tout de même bien plus drôle que du Kenny. Quant à l'aspect "touristique" de l'ensemble, c'est par moment assez savoureux.
Une petite description de Lièges pour la route ?
"Lièges, ville de souvenir, de grandes choses, de belles choses.
Lièges, une ville riante, un paris en réduction qui s'étend sur les bords de la mouvante Meuse comme les bras d'une maman serrent la poitrine d'un enfant.
Liège, vivant portrait de la Walonnie fière et méritante, combative, ardente, et aussi bonne, aussi douce, aussi agréable qu'un cœur sur la main et que du beurre doré sur une tartine blanche.
Liège, altière Cité martyre de toutes les guerres, de tous les fléaux qui, une fois de plus, s'était reconstituée redressée et avait rapidement pansé ses blessures profondes.
Lièges, ville qui, sous la pluie ou dans la brume recélait la même prenante sentimentalité que Paris ou Lyon, un identique romantisme inaltérable qui en faisait la ville des amoureux, des quais charmants, des pigeons roucoulants nourris par la foule au grand cœur, des mamans promenant leurs gosses, des badauds et des touristes.
John adorait Lièges."
Quelle intensité ! Malheureusement, ce splendide passage (page 24 et 25 pour ceux qui suivent) ne sera jamais égalé dans les 220 pages suivantes. La magie Belinda a parfois des ratés...


MÉFIEZ-VOUS DES PIN-UP, FRANK PETER BELINDA
LA LOUPE ESPIONNAGE # 55, 1958

Celui-ci, c'est tout le contraire. Un vrai roman d'action, violent, tragique, nerveux - dans les limites du Belinda, bien entendu.
Surtout, c'est un roman à message. Un message contenu dans le titre et illustré par trois fois dans le texte. Car Méfiez-Vous Des Pin-Up aurait très bien pu se nommer Les Femmes Sont Toutes Des Salopes.
Je résume rapido.


John Kallum est envoyé clandestinement en Russie pour recuperer un scientifique. "Du boulot préalablement mâché... C'est trop simple..." déclare Kallum, à qui on ne la fait pas.

Il n'a pas tord. Une fois débarqué là-bas, il fait l'expérience du rude tempérament féminin. Car la femme aime faire l'amour, mais la femme parle trop, la femme dénonce, la femme trahit. Et John Kallum, traqué par les politzionners cocos, manquera d'y laisser la peau et d'achever irrémédiablement son pauvre lecteur insomniaque.

Bref, c'est assommant et, pour du Belinda, pas super drôle.
Une déception éducative, tout de même, si l'on considère les quelques rudiments de psychologie féminine que ce roman m'a inculqué (maman, tu avais raison).



LA MONTAGNE INFERNALE, ROL FREDERN
LE COBRA ESPIONNAGE #5, 1960

Le meilleur pour la fin...
Non, je blague.
Vous avez vu cette couverture ? Imaginez le texte maintenant. OK. Vous n'êtes pas très loin de la vérité. Le tout est un petit peu plus tarabiscoté (ça concerne la découverte de l'arche de noé et le sabotage d'un puits de pétrole américain par des fanatiques musulmans), gentiment débile et régulièrement enrichi par un érotisme peu évolué (notre espion, Robert, passe son temps à sauter de jolis petits lots comme si il se trouvait dans un bouquin des éditions de la Tarente).

Pour faire vite, c'est plutôt nul et moyennement infernal. Je suis désolé mais en dire plus est tout simplement au dessus de mes forces.

(Voila ce que nous pouvons appeller un long post inutile... je ferais mieux la prochaine fois, promis !)