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ÉBATS DE FOND

SOUS TERRE ON MEURT AUSSI, HANS KLUBER
LES HYÈNES DU DÉSERT, HARRY WOODLEY
LA FIN DES BRAVES, HERMANN SIEBEL
GERFAUT / GUERRE # 232, 242, 315 / 1973/74/77

L'affaire est entendue depuis longtemps. En matière de littérature populaire, la guerre des sexes n'aura pas lieu. Les moutons sont bien gardés, les genres parfaitement compartimentés.
Aux hommes les rafales qui crépitent, les gnons qui s'échangent et les bombes qui explosent. Aux femmes les déclarations enfiévrées, les embrassades au clair de lune et les oiseaux qui gazouillent tendrement.
Aux uns Spillane, aux autres Delly.
Pourtant, il existe une anomalie. Une collection qui, inconsciemment, tapa sur les deux tableaux.
De l'amour et de la violence, de l'action et de la romance.
Cette collection, c'était celle, emblématique, des éditions du Gerfaut. La collection Guerre. Un demi-millier de bouquins, poche ou grand format, et dont la grande majorité concernait les affrontements marquants de la seconde guerre mondiale. Front soviétique, déserts du moyen-orient, îles du pacifique, campagne d'italie, déroute berlinoise et tout le toutime.
Étonnamment, c'est en abordant ces conflits que les auteurs du sérail Gerfaut se sentirent subitement devenir fleur bleue. Le Vietnam ou l'Indochine, autre mamelle première de la collec', ça fleurait plutôt la sueur rance et la mauvaise haleine du juteux tapi au fond de la jungle. La seconde guerre mondiale, par contre, avec ses hordes de nazis et de S.S., de soviets et de partisans, d'anglais et de 'ricains, tous se canardant 220 pages durant et à qui mieux-mieux, ça sonnait plus romantique.
Prenons par exemple Sous Terre On Meurt Aussi, signé Hans Kluber. Le résumé au dos du livre promet des sensations dures. Les nazis assiègent Sebastopol, leurs canons crachent des obus " chargés de mort et de violence " et les Ruskoffs se sont réfugiés dans les égouts. Un seul moyen de les y déloger : les asphyxier à grandes rasades d'un gaz aussi mortel qu'expérimental. Un stratagème déloyal qui débecte notre héros, Karl Loster, un médecin allemand plutôt naïf. Il s'écrira même, en fridolin dans le texte, "Das ist eine Sauerei !" Et de rejoindre les cocos dans leurs égouts condamnés à la dératisation.
Et là, c'est la séquence émotion de l'ouvrage. Karl rencontre Tatiana, une belle infirmière russe. Pour lui, c'est le coup de foudre. Pour elle itou. Ils sont d'ailleurs tellement mordus l'un de l'autre qu'ils s'unissent tendrement, sous un ciel étoilé. Séquence émotion, disais-je...
"Levant les yeux vers le firmament, Tatiana sentit son coeur se serrer. La vie de la terre l'entourait de sa force et elle ressentait dans ses entrailles de femme cette même force, toute prête à accomplir la mission que la vie lui avait confiée en la faisant femme...
Un long frisson la parcourut.
Et alors, se dessinant sur le ciel étoilé, elle aperçut le visage du médecin allemand et elle sut que la semence de l'amour était tombée dans sa chair frémissante ; une chair que la mort aurait sans que le grand miracle de la vie se fût accompli
."
C'est beau, c'est grand, c'est triste. Et au demeurant, pour un roman Gerfaut Guerre, c'est loin d'être dégueulasse.
Mais toutes les infirmières ne sont pas soviétiques. Les rôles sont partagés. Dans les Hyènes du Désert (même auteur, ici caché sous le pseudonyme d'Harry Woodley), Frieda, Ilsa, Bora, Madeline et toutes leurs copines sont de courageuses fraulein en blanc qui, pour venger leurs petits-copains tués par des militaires anglais, s'engagent chez les S.S. et partent accomplir leur vendetta dans le désert saharien.
Malheureusement pour elles, nos nénettes tombent entre les pognes de brigands arabes qui s'empressent (forcement !) de les violer en masse. Déboule alors la première morale du roman puisque...
"...malgré leur bonne volonté et l'entraînement qu'elles avaient subi, elles n'étaient après tout que de pauvres femmes, incapables de se mesurer avec des forces terribles que seuls les hommes pouvaient défier..."
Traduction : y'a des jours, les mousmées, elles feraient mieux de ne pas quitter leur cuisine.
Heureusement, retournement de situation, des militaires anglais (ceux là même qui avaient zigouillé les petits copains allemands de nos petites infirmières S.S. au tout début du bouquin - c'est bon, t'arrives à suivre ?) des militaires anglais, disais-je, passaient dans le coin et, se doutant qu'un chpountz pas très catholique se tramait dans les parages, s'empressèrent d'aller libérer les nénettes...
...Enfin, d'aller libérer uniquement celles qui n'étaient pas encore passées à la casseroles des zigotos du désert façon couscous berbère, les autres étant définitivement irrécupérables, tu t'en doutes bien, inutile de te faire un dessin.
Bref, les gertrudes à l'hymen épargné tombent dans les bras de nos preux chevaliers anglais et c'est là que s'annonce la deuxième (et ultime) morale de ce chouette bouquin... " car tant qu'il y aura des hommes et des femmes qui se plairont mutuellement, l'humanité ne périra point ! "

Néanmoins, si le viol est un passage obligatoire pour l'infirmière dans les récits de guerre, il arrive parfois qu'elle en sorte indemne. Et par ses propres moyen.
Double surprise !
C'est ainsi le cas de l'allemande Sabrina qui, aux alentours du neuvième chapitre du roman La Fin des Braves d'Hermann Siebel, se voit à la fois séparée de ses compagnons (une joyeuse bande de Nazis pacifiques, comme cela est souvent le cas dans les romans Gerfaut) et séquestrée par un vil partisan ukrainien en mal d'amour.
L'affreux gustave, les sens totalement retournés par l'imposante poitrine de notre pauvre gretchen (cf. la couverture ci-contre), lui arrache sauvagement ses blanches frusques puis, en indécrottable romantique qu'il est, lui déclare la main sur le vier :
"Tu vas voir ce que tu vas voir, charogne ! Quand tu m'auras entre les jambes, ce sera bien pire !"
Encore un gniasse qui cause plus qu'il n'agit. Sabrina, par contre, ne perd pas le nord. Elle assomme l'abominable d'un coup de caillou bien ajusté sur le carafon puis, l'esprit toujours aussi pratique, s'en va recoudre son précieux uniforme derrière un buisson.
Pour une fois, la vertue du corps médical sort intacte d'un roman Gerfaut.
Ou comme l'affirme quelques pages plus loin le petit copain Fritz de notre héroïne :
"Es ist schon gut."

LE TRESOR DES NAZIS

Encore une histoire de trésor et de nazis, thème déjà lu (entre autre) chez Ange Bastiani (Le Trésor Des Nazis, Presses Noires 1969) et René Charvin (La Panthère Sait Nager, Arabesque 1968) et ici exploité en bande dessinée petit-format.
Une publication André Guerber (je présume) datée de 1978.
Le dessinateur n'est pas crédité, c'est con, il a une belle patte, entre Magnus, l'anonyme de Dossier X # 12 (en moins plantureux) et Jean Marie Arnon.
Donc, Le Trésor Des Nazis, c'est une aventure de Pussycat, souris d'hôtel nouveau genre, mélangeant au style Diabolik les fantasmes fétichistes de John Willie. Malheureusement, sa tenue de super-heroïne BDSM n'apparait que le temps de quelques cases. Le reste est passé en un deux-pièces ceinture et foulard d'aventurière fort classique. C'est triste.
Remercions tout de même la large échancrure de son chemisier. Il aide à la concentration.
Bref. Pussycat rencontre un gentil ex-nazi qui cherche à mettre la main sur le trésor de guerre qu'il avait dissimulé en Grèce. De méchants rejetons de nazis sont à ses trousses. Ils les combattent un peu. Il y a aussi de méchants arabes...
...et de la baise...
...et puis de la torture de jeune vierge.
C'est gratis, c'est sympa, c'est le point d'orgue du numéro.
Bilan : un petit format foutrement excellent, foutrement excitant même, à ne laisser passer sous aucun prétexte.
Quant à l'amateur de ce type d'histoire, je lui cite ce commentaire que Maciste, intrépide libraire populaire, posta ici :
"
Ceux qui affectionnent les histoires de trésors cachés par les SS et autres nazis, pourront aussi lire : L'oeil du monocle de Rémy (Hachette, 1962) [ et ] La quille d'or de Desmond Bagley (Robert Laffont, 1965; il s'agit ici du trésor de Mussolini)."
Voila qui est dit !

L'ANGE ET SES DETTES

NUAGES DE SANG, ANGE GABRIELLI
LES PRESSES NOIRES / ESPIONNAGE # 98, 1967

N'y allons pas par quatre chemins. J'ai déjà écrit tout le mal que je pensais des charlatans littéraires qui s'acharnent sans relâche sur la dépouille d'Ange Bastiani.
Je ne reviendrais pas là dessus.
En tout cas, pas directement.

Le cadavre, par contre, a toujours son mot à dire. Il s'exprime à travers le temps. Au detour d'un paragraphe, dans un roman oublié, Bastiani jette ainsi le doute.

Dans Nuages De Sang, second roman d'espionnage qu'il signa sous le pseudonyme transparent d'Ange Gabrielli (le premier étant Les Sirènes D'Anvers), l'auteur met en scène un certain Vic Vorlier. Le nom ne vous sera peut être pas inconnu. Il servit en effet de masque à Bastiani pour un seul et unique polar, Nous Irons En Enfer Ensemble, publié en 58 par Ferenczy en collection Feux Rouges.
Mais ici, Vic Vorlier n'est plus parure de plume. Il est protagoniste principal, agent secret français, " bâti en force, carré de coffre et de visage, le crâne passé à la pierre ponce, l'oeil bleu tour à tour féroce et candide, les lèvres charnues, sensuelles, découvrant volontiers pour un sourire d'homme qui ne sourit qu'aux femmes une double rangée de dents éblouissantes. "
Envoyé par son patron à Toulon, il est chargé de mettre le grappin sur une bande d'espions ennemis sévissant dans une base de recherche militaire française mais, pris au piège du moule géographique de son auteur, il passera finalement la majeure partie de ses phrases à se la trainer dans les mauvais lieux de la cote d'Azur.
Comme roman d'espionnage purement alimentaire, Nuages De Sang assure un spectacle hautement divertissant. Le style est effacé mais efficace, les personnages bien campés, l'action présente et le décor, forcement truculent.
Mais l'intérêt réside ailleurs.

Chapitre 2, Vic Vorlier fait la connaissance d'Irène, une indicatrice. Elle est censée lui servir de guide dans Toulon mais permet surtout à l'auteur d'évoquer une période sombre de l'histoire de France. Ainsi, questionnée par Vic Vorlier sur ses faits d'armes, elle répond : "je n'ai jamais eu affaire qu'à certains messieurs de la rue Lauriston, qui m'ont tailladé les seins au rasoir."
La rue Lauriston, et son numéro 93, de sinistre mémoire. C'était la que se trouvait la Carlingue, pendant l'occupation. Un repère de truands devenus collabos.
Certains oiseaux ont longtemps affirmé que Bastiani en était. Certains l'affirment encore. Comme si notre homme était de la même race que Loutrel, Masuy ou Lafont...

Mais reprenons.
Page 81, Vorlier rencontre un scientifique faisant l'objet de menaces de mort - des séries de petits mots sur lesquels sont écrits " SALE BOCHE ! ON AURA TA PEAU ! "

" une croix gammée paraphée la menace."
Et l'intéressé de s'exclamer :
"Sale Boche, [...] je n'ai jamais été nazi, monsieur, mon frere aîné, qui était colonel dans l'Afrika-Korps avec Rommel, a été fusillé par les S.S. en juillet 44. Pendant que j'étais prisonnier en France, ma femme, qui avait vingt ans à l'époque a été arrêté par la Gestapo, quelque mois avant la débâcle. Elle a eu de la chance, on l'a relâchée au bout d'une semaine. On avait dû la traiter sans doute avec de grands égards, elle a préféré se suicider dans les premières qui ont suivi sa remise en liberté. Voila le sale Boche dont on veut avoir la peau."

"Vic le regardait vitupérer, frappant la table de son poing. En si peu d'instants, il y avait eu un tel changement d'attitude chez cet homme qu'il se demandait jusqu'à quel point il ne se livrait pas à quelque comédie."
De tout cela, je ne tirerai aucunes conclusions. Aucune n'est d'ailleurs nécessaire. Ange Gabrielli ré-évoquera les troubles de l'occupation deux années plus tard, dans Le Trésor Des Nazis, et une seule certitude doit être à retenir. L'homme était une sacrée plume. Il s'agit désormais d'oublier ce que quelques connards essayent de nous faire gober.
Puis se plonger, avec angoisse et ravissement, dans ses œuvres.

Lisez Coup De Typhus. Lisez Arrêtes Ton Char Ben-Hur. Lisez Maurice Raphael. Lisez les deux Mauvais Lieux ou bien même, si vous avez un train à prendre prochainement, lisez Nuages De Sang.
Un écrivain de talent, on ne pinaille pas dessus.

LES SOVIETS ET LES NAZIS DE CHEZ GERFAUT

LA BARRIÈRE DE FEU, ANTON SEDOFF
GERFAUT / GUERRE # 312, 1977

Une jolie pépée à mitraillette orne la couverture. D'emblée, ça donne envie. Quasi-dépoitraillée et redoutablement armée.
Je sais pas toi mais moi, je bave sec. Ce type d'imagerie, ça a toujours eu le don de faire s'activer mes glandes salivaires.
Le texte, par contre, est plus frustre. On y trouve d'ailleurs aucune nymphette à étoile rouge. C'est triste mais je ne vais pas hurler à l'arnaque car, tout le long de ses 212 pages, La Barrière de Feu s'affirme comme une lecture fort agréable - double conséquence d'une intrigue et d'un traitement simple mais efficace.

Je résume : En pleine débâcle sur le front russe, six soldats soviétiques, 5 gugusses et une nana, se font passer pour des officiers allemands et rejoignent les lignes nazies en vue d'espionner l'ennemi de l'intérieur.
L'essentiel du roman se déroule donc dans un QG souterrain de la Wehrmacht. Nos 6 soviets masqués s'y intègrent sans accroc mais leur stratagème est rapidement éventé par un implacable oberstumfuhrer SS et voila alors nos braves héros du peuple livrés à eux-mêmes au milieu des loups.
A partir de cet instant, le roman tourne vaguement en rond, patauge un peu. Le décor est foncièrement exigu (un ascenseur, un mess d'officier, beaucoup de couloirs) et l'auteur peine à y développer à la fois ses personnages, leurs actions et son intrigue.
Heureusement, le format est court et l'ensemble rue brutalement sur les 50 dernières pages, à grand coup d'explosions et de fusillades.
Nettoyage par le feu et, au final, un bilan plutôt positif : ça se lit vite, c'est ultra-rudimentaire et c'est aussi satisfaisant qu'un film de guerre italien à petit budget.
Sommaire mais solide, en quelque sorte.
Et puis, tout de même, on ne va pas cracher sur une histoire de soldats russes déguisés en soldats nazis, dézinguant du soldat nazi dans un bunker nazi, le tout bien emballé par une poupée pulmonée et rudement armée, non ?


"NADIOUSKA", HANS KLÜBER
GERFAUT / GUERRE # 323, 1977

Reprenons notre sérieux.
Contrairement au roman précèdent, modeste (mais appétissant) forfait alimentaire, ce Gerfaut-là a du style. Un peu trop appuyé sur le pathos, peut être, mais du style tout de même.
En fait, "Nadiouska", de par sa construction et son écriture, semble presque transposer, sur une trame typique du récit de guerre, les formules hardboiled américaines des années 30 / 40.

Ainsi, dans le Berlin de l'après guerre, ville de cendres et de ruines, un homme, Karl Drummer, ancien officier de la Wahrmacht, traine ses haillons, hanté par le souvenir d'une femme et le désir d'une vengeance.
"Il avait couvé la haine si longtemps, qu'elle était devenue comme une deuxième nature chez lui, une sorte de drogue dont il n'aurait pu supporter le manque une seule minute. elle était là, lovée dans les fibres de son corps squelettique, fondue dans son épouvantable maigreur..."
La suite alterne, dans la plus pure tradition du roman noir, les séquences au présent (vagabondage dans Berlin, rencontre avec de vieilles connaissances) et les longs flashbacks d'une mission en Russie, durant l'hiver de 1941/42. Les deux fils temporels se répondent, s'entrecroisent et, peu à peu, s'éclaircissent mutuellement.
La formule est classique mais fonctionne. Logique.
Par contre, la seconde moitié du récit (une traque dans les bois enneigés de la Russie) manque du souffle épique de la littérature d'action, la confrontation finale est extrêmement prévisible et l'exécution de certaines scènes, par trop lacrymales ou faciles, laisse à désirer.
Néanmoins, et malgré ses nombreux defauts, "Nadiouska" reste un récit Gerfaut de très bonne facture, surprenant dans le style et largement au dessus du standard habituel de la collection.
Pour établir une comparaison oiseuse (mais, oh, je fais ce que je veux sur mon blog), "Nadiouska," c'est le Pendez-Moi Haut et Court de Geoffrey Homes, réécrit à la manière de Sven Hassel et simplifié pour les besoins d'une collection de gare bas de gamme.


FILS D'ARYENS, FRIEDRICH SOFFKER
GERFAUT / GUERRE # 366, 1980

Celui-là, par contre, je n'aurai pas grand chose à en dire.
Pour synthetiser le truc en deux coups de cuillère à pot, Fils D'Aryens, c'est l'histoire d'un super-SS ultra-fanatique qui se révèle être bon à rien (en trois mots, pas en deux) et cela, par la faute de sa mère, respectable bourgeoise de haute lignée allemande mais qui, deux décennies plus tôt, avait couché avec un petit saligaud d'épicier juif.
Fils D'Aryens, c'est donc l'histoire poignante et renversante de ce super-SS ultra-fanatique qui découvre un jour qu'il n'est pas totalement aryen mais plutôt juif à 50 % et qui, du coup, en vient à s'auto-détester et fini suicidaire-kamikaze pour l'honneur du Reich.
En bref, c'est grotesque mais, étonnamment, ce n'est pas si mal écrit.
Normal, diront les spécialistes.
Friedrich Soffker, c'est un pseudonyme de Gilles Maurice Poulain - un gars qui, question littérature de gare bien envoyée, connait son affaire sur le bout des doigts.

Malheureusement, et en dépit de tout le talent de son auteur, le bouquin ne décolle jamais vraiment. Le rythme est bon mais l'histoire s'enferre constamment dans sa volonté de faire chialer le lectorat...
D'une certaine manière, c'est là que réside le gros problème des productions Gerfaut Guerre signées Gilles Maurice Poulain : on a parfois l'impression de lire du Delly transposé sur les fronts de la seconde guerre mondiale.
Et ce coup-ci, pour mézigue et son petit cœur de baroudeur en fond de rayonnages, le résultat ne fut pas très folichon.
Surtout après "Nadiouska."
Ben oui, tu me connais. Les sentiments, c'est bien mais à répétition, ça me gonfle.

ÜBER-KOLOSSAL STALAG-FIKTION FÜR FRANZOSISCH MÄNNER !

FEMMES A SOLDATS, GEORGES ROQUES
EDITIONS CERBERE, 195?

Au cours des années 50, bien avant les séries de films eurotrash, de fumetti elvifrance ou de revues pornographiques hollandaises, la Nazisploitation fut un micro-genre littéraire pas très apprécié par la censure, un amalgame crapoteux d'érotisme cru et de récit de guerre sensationnaliste.
Probablement dans le but d'exacerber le goût douteux qui parfumait déjà le genre, les auteurs arboraient des noms subtilement germaniques, genre Vicker Wolf, Von Himeloff, Helms-Liesenhoff, Karl Vondorff ou, surprise, Georges Roques. Oui, Georges Roques, le fiston dégénéré de René.
Car si papa officiait dans l'érotisme de bon ton, les trucs pour nénettes sensibles, Georges, lui, préférait la déviance pas très proprette, la pornographie à la sauvette, le misérabilisme sexuel. Du coup, entre deux polars sexy et diverses autres choses à la manière de papa mais en moins reluisant, hop, Georgie pondait vite fait bien fait un petit 190 pages de Stalag Fiction, un genre dans lequel il était plutôt à son aise.
"Sa chevelure d'un blond doré encadrait un visage à l'ovale pur dont le front haut, les sourcils effilés, les yeux gris-fer, parcourus de reflets sauvages, évoquaient fidèlement le type idéal de la Fraulein nazie.
Elle s'appelait Greta !"
J'aurais beaucoup de difficultés à résumer ce Femmes à Soldats au déroulement plutôt chaotique. Georges fait dans la grande fresque historique, le machin ambitieux, avec une foultitude de personnages qui s'entrecroisent en pleine débâcle Allemande. En fait, c'est un tel bordel que Georges lui-même en oublie certains protagonistes en cours de route. Mais ça ne m'a pas dérangé outre mesure, car l'étourderie et le manque de rigueur, ça me connait !
Bref, pour ce qui est du roll-call approximatif, dans Femmes à Soldats, nous avons droit à une Femme de Réconfort russe bien décidé à regagner sa dignité, une résistante Polonaise spécialisée dans l'atomisation de Panzers, une jeune Française perdue dans les manigances de collaborateurs en fuite et une souteneuse Allemande aux affinités saphiques. A cela se rajoute, et jusqu'à épuisement, les centaines de figurants militaires, les Russes, les Mongols, les Nazis, les Américains et tout leurs petits copains armés jusqu'aux dents et qui n'hésitent pas à s'en payer une bonne tranche quand une Fraulein en détresse passe dans leur périmètre.
Car il faut bien justifier le titre, et le prix payé par un lecteur en manque... euh... d'amour ?
Donc : des soldats qui violentent des femmes. Et Georges qui se déchaîne sur son Olympia dernier modèle dans le gros n'importe quoi sexuel et sadique avec, partie 2 chapitre 3, une partouze militariste et familiale qui tourne assez vite au glauque.
"Brusquement, le soudard se saisit de l'enfant par un pied pour l'envoyer de toute ces forces s'écraser contre un mur.
- Petite ordure !
Hurlant de terreur, la mère voulut s'élancer vers le bébé qui n'était plus qu'un paquet de chairs informes. Mais déjà, lui ayant déchiré ses vêtements, le SS la renversait parmi les gravats.
- Gueule, ma belle... Gueule !
Eperdue, livide, la Polonaise n'ouvrait pas la bouche. Tout en la possédant, le SS lui piqua les hanches avec le yatagan. Cette fois, la jeune femme laissa échapper une plainte sourde.
- Plus fort, haleta la brute.
- Laissez-moi.
Sadiquement, le nazi plantait maintenant la lame dans les pointes roses des seins. Alors, perdant la raison, la malheureuse partit d'un rire hystérique.
A quelques pas de là, près d'un soldat de l'Armée Secrète qui, une affreuse blessure à la tempe, gémissait encore, un SS possédait furieusement sa victime, tandis qu'immobile devant le couple, un gamin fixait en pleurnichant cette femme, sa jupe déchirée sur les cuisses, cette femmes soulevée de honte, de haine et de dégoût...
Cette femme qui était sa mère.
Partout des scènes de ce genre se déroulaient. Les Polonaises étaient violées sous les yeux de leurs enfants, bien heureuses encore quand, par un surcroît de sadisme, prenant dans le spectacle de ces incestes un plaisir monstrueux, les Hitleriens n'obligeaient pas les jeunes garçons à participer aux orgies."
Et je m'arrête avant que ça devienne veritablement malsain (CF. les pages suivantes, pour ceux qui possèdent l'ouvrage en question...).
Puis Georges retrouve son calme, récupère les touches de clavier éparpillées par son massacre à deux doigts et reprend un rythme de croisière beaucoup plus raisonnable.
Femmes à Soldats enchaîne alors dans un Berlin investi par les Alliés, avec des maisons closes Russes permettant les discussions Marxistes et des bordels ricains où les partenaires mélangent leurs chairs sous fond de sirop jazzy. Le bonheur moderne.
N'ayant pas que ça a faire (ah ?), je termine ce post en quatrième vitesse : Nos héroïnes se prostituent dans ce nouveau Berlin, deviennent dépressives et se suicident.
Bref, la morale est sauve, mein herr.


Quant à la quatrième de couverture, elle réserve un joli petit bonus avec la liste des précédentes parutions des éditions Cerbère : Bourreaux De Femmes ? Femmes Sous La Torture ? Les Camps De L'Amour ? N'en jetez plus ! Mon quota de google-hits douteux est assuré pour les prochaines semaines.
Et pour les petits pervers pas zippés mais aux boutons de braguette encore intacts, voici un scan de cette quatrième de couv' über-alléchante :

Wouw ! Sacré programme ! Et quels résumés de folie ! J'en ai la lippe toute tremblotante et les mirettes exorbitées ! Vivement le jour de paye que j'aille faire des folies !