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ESPION D'AVRIL : VOILA L'PROGRAMME !

L'année dernière, le mois d'Avril avait été 100 % Viril avec une thématique axée sur nos amis les musclés du roman de gare des années 70 et 80 : Exécuteurs, Destructeurs, Pénétrateurs et autres Bousilleurs de papier bon marché.
Cette année, rebelote, mais avec un sujet légèrement différent. Ainsi, pendant 30 jours, il ne sera pas question de nos amis les barbares modernes sur-armés et sur-entrainés mais de leurs proches parents, ceux qui, 20 ans durant, pavèrent la voie du roman de super-marché :

ESPIONS, AGENTS SECRETS, BARBOUZES ET SOLDATS DE L'OMBRE.

Car l'espionnage
, du début des années 50 aux années 70, constitua l'avant-dernier stade d'une littérature d'aventure revue et corrigée en simple divertissement alimentaire, la littérature vendue comme une marque de shampooing ou de lessive, la littérature en boite et en conserve, aussi facilement consommable que rapidement jetable.


À l'instar des romans de guerre, des romances pour nanas et des westerns pour garçons (et contrairement à la SF ou au polar), l'espionnage populaire ne chercha ni ne connut aucune reconnaissance critique. Normal. Le genre ne répondait qu'à des critères de rendements et de gains, en suivant des règles narratives et structurelles aussi simplistes que strictes, renforcées par un formatage à l'économie du style d'écriture - la production en série ne peut être permise que par un emploi de tournures de phrases ultra-rudimentaire. 190 pages mensuelles ne s'écrivent pas en soignant ses effets de plume.
Le genre était donc usiné au kilomètre
, cousu comme une tapisserie monotone, vendu aux masses laborieuses trop fatiguées pour réfléchir. Sur presque 20 ans (à la louche, de 50 à 70), il opéra une courbe ascensionnelle qui entraina la sur-production d'ersatz et (ça va de pair) la lassitude du public.
Un marché envahi par des quantités aberrantes de bouquins et de collections, comme si il s'agissait là d'une véritable course à l'armement.
Ça ne pardonne pas.
Après une décennie d'or (les sixties et le règne de l'espionnite sur tous les supports disponibles - cinéma, bd, radio, télévision, livres), l'espionnage se cassa enfin la gueule. Débandade générale. Les auteurs se recasèrent comme ils le purent. En 1970, la majorité des collections avaient passées l'arme à gauche, seuls quelques mammouths éditoriaux résistaient - les autres se reconvertirent dans le porno ou le viril. L'espionnage devint donc sexpionnage.
Et ce fut l'agonie douce...

(...parallèle, d'ailleurs, à celle que le roman de gare commençait à subir, ses parts de popularités bouffées par son grand concurrent, cet appareil qui s'imposa (tout comme l'espionnage) en pleine période de modernité atomique et de progrès domotique : la télévision.)
Bref, pendant un mois, on ne causera que d'espionnage. Espionnage, espionnage, espionnage.
ESPION D'AVRIL, donc.
Ou, par le menu : Filatures dans la nuit, voitures de courses, filles dans le vent, discours protectionnistes, twist parties endiablées, gadgets hi-tech, drogues et sérums de vérité, tortures en tout genre, noms de code chiffrés, pugilats héroïques, mitraillages intensifs, explosions nucléaires, secrets militaires et tout le bourzouf.
Ça va surement en barber certains mais tant pis pour eux.
Et puis, qui sait ? Peut être arriverai-je, pendant ce mois d'Espion D'Avril, a convaincre une ou deux personnes du bien fait authentique de ces petits bouquins de série signé Gil Darcy, Roland Piguet, Yves Dermeze ou Ernie Clerk et que l'on trouve si facilement en pagaille, à 20 centimes la pièce, dans les foires, les brocantes, les vides greniers, les emmaüs et autres marchés aux puces de province ?

Un petit effort.
Dites "OUI !" au roman de gare bas de gamme.
[ ICONOGRAPHIE : 1 - une photographie extraite de la réédition du roman La Gonio À L'Agonie de Pierre Genève (Euredif, 1970) , 2 - la couverture du Mystere Magazine # 265 avec George Lazenby / James Bond en couverture (1970), 3 - la scene finale de Furia à Bahia (1965), mon film OSS 117 favori, un André Hunebelle avec Frederick Stafford et Mylène Demongeot. ]

INTERLUDE : CHOSES EN VRAC

ITEM ! Je n'ai rien posté ces deux dernières semaines, mais ce n'est pas ma faute, j'ai un mot d'excuse : c'est la faute à la connexion wi-fi que je pique aux voisins - ils deviennent radins, les salauds, ils se protègent avec des mots de passe ou bien disparaissent tout bonnement de la circulation.
Quant aux quelques généreux pourvoyeurs d'internet gratos qui survivent dans le loinqué, leurs ondes accusent une vitesse de croisière comparable à celle d'un 100 mètres haies pour octogénaires asthmatiques en déambulateurs et pieds de perfusion sur roulettes.

Traduction : quand j'arrive à lancer la page d'accueil google, j'ai aussi le temps de lire l'intégrale des œuvres de Nathalie Henneberg.
Mais je ne suis pas là pour te raconter mes malheurs... postons utile, postons rapide.

ITEM ! Le billet le plus consulté, sur ce blog, c'est le Belinda Contre Les Manges-Disques de Guido Crepax. Ça me permet donc de poster aujourd'hui cette jolie case d'ouverture au récit Reflets, paru en mars 1976 dans Charlie Mensuel # 86. Ça me permet surtout de signaler que la Galerie Gilles Peyroulet à Paris exposera du 12 mars au 30 avril 2011 "une trentaine de planches originales de 1966 à 1991 de Valentina."
A noter aussi que les galeristes seront "présents au Salon du Dessin au Carrousel du Louvre du 25 au 28 mars 2011 avec d'autres histoires, Anita, Emmanuelle, Histoire d'O, Venus à la Fourrure..."
Les amateurs parisiens de Crepax seront aux anges... les veinards !

ITEM ! En novembre dernier, j'avais scanné quelques ( (très) belles) cases d'un comic-pocket Coplan FX-18, le numéro 8 de 1971, Recours Au Meurtre.
Dans les commentaires, Benoit Bavin m'avait renseigné quant à l'identité du dessinateur, l'espagnol José De Huescar, et dernièrement Zaïtchick m'a fait suivre un lien vers son (excellent) article concernant l'Agence Eureka, une série signée du même auteur et publiée dans Pif Gadget.
Bon, eh bien... va falloir que je les traque, ces numéros du chien communiste à joujou débile en plastoc, because l'Agence Eureka, ça a véritablement l'air d'être un truc du tonnerre !

ITEM ! J'ai ouvert un compte facebook. Je sais, c'est l'angoisse complètement mais j'essaye de vaincre ma solitude. Puis faut bien avouer que facebook, c'est un tantinet moins glauque que l'association pour personnes seules de la rue des Chartreux, 1000 Bruxelles.
Bon, à l'heure actuelle, je n'ai rien vaincu du tout.
Par contre, j'ai perdu énormément de temps à lire qu'untel mangeait un œuf en téléchargeant la saison 5 de sa série favorite et que tel autre revenait de la supérette d'en bas de chez lui, première à droite (celle avec les légumes en devanture) et qu'il y avait fait la rencontre de truc-muche, son voisin de quatrième, lui aussi inscrit sur facebook - choix judicieux pour ce dernier : il a ainsi pu cliquer sur "j'aime" dans les commentaires.


ITEM ! Le bouquin "Savoir Se Faire Des Amis" a été trouvé dans une des nombreuses poubelles de la place du Jeu de Balle, 1000 Bruxelles. Malheureusement, il date de 1973. Il contient donc aucuns tips quant à l'emploi que l'on peut faire des réseaux sociaux en ligne pour rendre sa vie plus palpitante.

ITEM ! Losfeld du blog Au Carrefour Étrange trouve lui aussi de superbes choses dans les poubelles. En témoigne ce numéro de Ciné Revue Photo consacré à la belle Marisa Mell.
J'ai envie de dire : Ouba Ouba !


ITEM ! Un petit dernier pour la route. Filo Loco, éditeur sérieux, informe ses souscripteurs via mail : "voici en exclusivité, une intervention filmée de monsieur bier, qui fait le point sur les avancées de ses travaux concernant le dictionnaire !"
Le dictionnaire en question, c'est (of course) le dictionnaire des films français érotiques et pornographiques 16 et 35 mm.
Et la vidéo (qui peut se voir sur youtube) est très bien. J'apprécie particulièrement la double étagère remplie de petit-formats Elvifrance.
C'est ça, la bourgeoisie post-moderne ;)


Voila pour les liens en vrac. Je te dis donc : à demain, si ma connexion-clandestine le veut bien (normalement, je suis censé causer du PDG de Gerald Moreau... le bonheur !) et merci à DrBis pour ses nombreux commentaires du jour
(...j'aimerai bien savoir qui se cache sous ce pseudonyme...)

I'M BACK, BABY, I'M BACK !

ITEM ! Après deux mois d'absence, je suis de retour. Et non, je n'étais pas en vacances. Ou en dépression. Mon scanner était clamsé, Belinda Contre Les Manges-Disques l'avait exténué, 27 pages d'affilées, il ne s'en était pas remis. Bilan, il a fallu le temps d'en trouver un nouveau à la portée de mes maigres moyens (5 euros, grosso-modo mon budget nourriture pour la semaine) et qui, c'est la moindre des choses, fonctionne. C'est désormais chose faite.
Bon, on dirait vaguement, lorsqu'il lance ses capteurs CCD à l'assaut du document à numériser, un grand-père asmatique à la sortie d'un bal dominical un peu trop arrosé mais bon, ça va, il abat vaillamment son turbin, la preuve :
ITEM ! J'aimerai remercier un certain Tedial, pour son commentaire d'encouragement posté il y a un peu moins d'un mois. Et du coup, je me permets d'y répondre ici.
Donc, cher Terdial : "Message reçu 5 sur 5 ! Je vais essayer de parler un peu plus souvent des productions Gérard De Villiers. Par contre, je dois avouer n'avoir jamais lu de Police Des Moeurs. Mais l'erreur sera réparée prochainement, je viens d'en dégotter un petit lot à 10 centimes la pièce."


ITEM ! Et Puisque l'on cause Gérard De Villiers, avez-vous remarqué que le nouvel illustrateur de la Brigade Mondaine n'est autre que ... Denis Sire ? Hé oui ! Quand il le veut, Gégé, il assure un max

ITEM ! Attends, je le répète en caplocks activé pour les durs des mirettes et les distraits de l'arial taille dix, donc (hum hum, éclaircissement de voix ) : DENIS SIRE ILLUSTRE LES COUVERTURES DES NOUVEAUX BRIGADE MONDAINE !

Hop, c'est bon, je vois Filo bander.


ITEM ! Mais ne nous emballons pas ! Avant de causer des séries de police érotique, j'aurais pas mal de choses à caser. La pile des romans à numériser et à disserter est maousse. D'ici, je vois du Richard S. Prather (auteur des aventures de Shell Scott), du Fleuve Noir Spécial Police, du Francis Tigrone (en mode sexpionnage OSSEX), du John Eagle Expeditor (avec une gonzesse en couverture que tu connais certainement...), du Nick Carter Kill Master, du western à gogo, américain, français, italien, du Luc Ferran, du Vic St Val, du Zodiaque, du André Caroff, du Bastiani, du Lesou, du Moorcock, du polar sexy, de l'humour populo et puis d'autres choses aussi mais je m'arrête là sinon j'y passerai la journée et on n'avancera pas.
ITEM ! Bref, j'ai du pain sur le manche. Mais avant de te laisser, une petite précision concernant les deux couvertures scannées. L'amateur y aura reconnu le relooking seventies des aventures de la môme Double Shot - devenue ici Vicky Vamp. L'auteur n'en était plus George Maxwell mais Jack Bradley, "traduit et adapté de l'américain" par un certain Joseph Benoist qui, dans la même collec' (Transworld Publication International Pocket), donnait à lire la série du Talonneur.
Le premier volume, Vicky Vamp, est une réécriture de Fallait Pas Me Doubler. Je n'ai par contre pas identifié le deuxième, Un Sac De Noeuds mais je pense qu'il doit s'agir d'un mélange de Va Te Faire Voir et de Y Manque Une Brique. De toute façon, rien ne vaut les originaux.

ITEM ! Je suis poli. Je termine donc en vous disant : à bientôt !

BILAN MFPE 2008 / 2009

Deux ans d'expédition dans les friches de la littérature populaire marginale, à essayer de cartographier l'inutile, à accumuler du déchet en pagaille avant de les distinguer, de les apprécier, de les noter, les comparer, les lier, les indexer, forcement, à l'arrivée, 200 messages derrière soi, il faut effectuer un tri. Quels romans valent vraiment le coup sur le Muller-Fokker ? Quels sont mes indispensables de la littérature populaire marginale ? Si je devais partir sur une île déserte, lesquels gratifieraient de leur présence mes bagages ?
Voici donc quelques éléments de réponses, divers pistes hyper-textuelles en gris et aussi une tentative nébuleuse de définition de ce que je nomme la littérature des poubelles, des marges et du pauvre - le tout à la manière d'un bon vieux Marvel Bullpen Bulletins. J'en ai toujours rêvé, voila que je le fais, 'nuff said !

ITEM ! Comment débuter autrement ce bilan qu'en encensant monsieur littérature coup-de-poing, j'ai nommé Joël Houssin, le maître du défonçage de tronche, de l'éclatage de tripes, de l'électrocution de couilles et de l'ultra-flipp' cosmichromique 3000, le chantre de la trépanation crasseuse comme art de vivre en temps de guérilla urbaine généralisée, le roi des mutants situs et des barbares spontex qui écoutent Throbbing Gristle tout en matant des post-nuke rital à la télé.
J'ai déjà parlé de son sublime premier roman, Locomotive Rictus, de trois de ses Anticipation les plus essentiels, Blue, City, Game Over, de ses deux Gore sensationnelement gerbandantissimes, L'Autoroute Du Massacre et L'Echo Des Suppliciés mais surtout, surtout, j'ai parlé de sa série SCUM, écrite sous le pseudonyme de David Rome et traçant sa voix dans le genre du sous-Rambo II, éclatant au poteau du mauvais goût et du bigger-than-everything tous les prétendants... et même l'original. Car face à David Rome, face à Joël Houssin, Stallone ne fait pas le poids. Scum, c'est de la dynamite. Speedball d'ovomaltine. Prosternez-vous devant le maître. Joël Houssin super-star. Au coolometre cosmique de la félicité littéraire, je lui décerne la première place.


ITEM ! Puis-je oublier Voyage Au Bout Du Jour de Behemioth, dit Kââ, dit Corselien, dit Pascal Marignac et qui signait là un roman d'horreur très étrange avec des pieuvres géantes, les plages bretonnes et un cadre homicidaire en pleine dépression, un roman détaché de tout, misanthrope, extrêmement drôle et qui constitua l'une de mes plus belle découverte de 2008 - bref pouvais-je l'oublier ? Certainement pas. L'avez-vous lu depuis le temps ? Je l'espère bien. De toute manière, je reparlerai de Marignac en 2010...

ITEM ! Ça y est, le porno est de nouveau à la mode mais, bon dieu, qu'est-ce-qu'on s'y fait chier. A en mourir - le bouquin dans les pognes, le zob en berne. Lisez Esparbec, vous comprendrez ma douleur.
Ah oui, c'est bien écrit, c'est vaguement subversif comme du Pauvert et c'est classouille comme de la litt' blanche, d'ailleurs on en trouve facilement dans les rayonnages des librairies bien sous tout rapport, des librairies propres sur elles, des librairies de snobinards, avec en plus les couvertures qui font sérieux, super-sérieux même, genre érotisme aubade en couleur, le tout légitimé par la critique de bon goût et c'est bien là le problème.
Rendez-nous nos prolétaires du culs, nos camionneurs en rut, nos écrivains alcoolisés qui, face à l'échéance du loyer, s'acharnaient sur leurs underwoods respectives et bouclaient 180 feuillets de copulation par dessus la jambe en quelques jours... car c'est justement dans cette fange là, celle des sex-shop et des poubelles, que poussent les plus belles fleurs hallucinées et enthousiasmantes du genre.
Oui, redécouvrons-les, ces scribouillards oubliés de la fesse et qui, dans leurs égarements stylistiques, nous offraient d'incroyables bijoux. C'est Une Belle Gonzesse de Regis Lary, bouquin hétéro-débile s'érigeant en véritable San-Antonio de la baise club-med qui dégénère. C'est Lord Bionic Sort De L'Ombre de Jo Barrack, au rythme assez mollasson mais sauvé par la présence en premier rôle d'une super-trique électronique qui tire des rayons laser. C'est Les 7 Merveilles Du Monstre de Gilles Derais, aux péripéties spectaculaires et délirantes - mais qui ne fait pas le poids face à un autre Derais dont j'espère pouvoir parler prochainement, Tout Feu Tout Femme, chef d'oeuvre ultime du genre porno-fou-furieux. C'est L'Une Dans L'Autre de Ricardo Vanguardia, à l'humour décapant et au style de haute volée - Ricardo Vanguardia, ce galérien de la vulgarité et dont il faudra un jour réhabiliter l'oeuvre car même dans ses plus mauvais moments, il reste foutrement génial. Lisez n'importe quel roman de ce malfaisant, vous verrez de quoi je cause.
C'est aussi des choses dont il faudra bien que je vous entretienne un de ces jours. Les 2 romans anarcho-loufoques de Hurl Barbe aux éditions de la Brigandine. Les 5 pornos essentiels de Jean-Pierre Bouyxou, toujours à la Brigandine. La série des Pascal signée Ugo Solenza, alias G.J. Arnaud, en Euredif. La liste est longue, sautons à la ligne...


ITEM ! ... mais restons dans le sexe alimentaire et, pour une vision assez particulière, poétique, subjective, retournante du porno de la belle époque, du porno des années 70, et pour aussi se faire une idée de ce que le genre aurait pu devenir si on ne l'avait pas coupé en deux, une partie pour les intellos, une partie pour les beaufs - cloisonnons, dépouillons, rentabilisons - il faut lire Cine X de Pat Delbe, sous-titré "Le petit manuel des usagers du hard" et qui se doit de figurer sur la table de chevet de tout pornophile qui se respecte. Vraiment. Je ne blague pas.

ITEM ! Dans un tout autre registre - quoique, cela reste discutable - parlons alcoolisme, un sujet qui, vous le savez peut être déjà, me touche de très près. Vous ne croyez tout de même pas que j'écris ces billets en étant sobre, non ? Eh bien, sachez que c'est exactement pareil pour un écrivain des poubelles. Il faut savoir se motiver, s'inspirer, se donner du courage - et pour cela, rien de mieux qu'un peu d'alcool dans le sang. 1 gramme, 2 grammes, 3 grammes, attention, 4 grammes, on atteint les premières cimes du délirium littéraire, on ne sait plus ce qu'on écrit, on part en roue libre, fautes de frappes, incohérences en pagaille et maltraitance narrative à foison.
Grand apôtre du genre ? Jean Normand et son Juana Est Dans Le Coup, récit policier aussi imbuvable qu'improbable, sombrant verre après verre dans un involontaire comique de situation.
Outsider à ne pas perdre de vue ? L'acteur écrivain, flambeur magnifique Roger Duchesne et qui, avec son polar Eddie Constantinnien bien imbibé Faut Les Avoir Bien Accrochées, m'avait provoqué quelques fou-rires pas piqués des hannetons. En effet, fallait les avoir bien accrochées, les amygdales.


ITEM ! Alcoolisés, les navets des éditions Promodifa ? Pas forcement mais, pour le spéléologue en littérature poubelle, voila une série de bouquins essentielle car permettant une compréhension assez complète des aspirations négatives du genre. Intrigues totalement idiotes, sexualité pathétique, personnages insignifiant, tares d'écriture consternantes, racisme de bon aloi, même les poubelles ont un fond et il semblerait bien qu'entre 74 et 78, les production Promodifa cherchait à le forer, toujours plus loin, toujours plus profondément. Interversion qualitative : les bouquins Promodifa ne sont pas médiocres, ils sont génialement mauvais.

ITEM ! Toujours alcoolisé, mais dans un genre très différent, celui de la science-fiction primitive, comique, balourde et satirique, il faut absolument se farcir La Dixième Planète, de Charles-Henri Badet, et dans lequel un clochard amateur de pastis part dans l'espace en fusée spatiale, découvre une planète peuplée de jolies filles à poils et initie ces très sympathiques autochtones aux joies des boissons fermentées. Immanquable.

ITEM ! Immanquable aussi, l'ensemble de la collection Visions Futures aux éditions de la Flamme D'Or et qui, hormis un assez bon André Ruellan sous pseudonyme (son premier roman, d'ailleurs), ne propose que de la bouillie de SF illisible. Mention spéciale à Stop à L'Invasion, auquel je n'ai strictement rien compris, et à Planète Atlante, du mortel duo Keller et Brainin, un bouquin qui enfonce sans difficultés aucunes n'importe quel Jimmy Guieu azimuté puisque nous gratifiant d'une explication du mystère atlante tout en balançant dans la mêlée aztèques énervés, pharaons spatiaux-temporels et martiens belliqueux. Et le pire dans tout ça, c'est que Planète Atlante est certifié 100% sans alcool. Comme quoi, parfois, sans alcool, la fête peut être tout aussi folle.

ITEM ! Et la SF de qualité dans tout ça ? Elle n'est pas oubliée. J'ai ouvert ce blog avec un billet sur le génial Ron Goulart dont les trois Futurama, les deux Opta et le Marabout sont des must-have pour les fans de Sheckley et de Sladek. Quant à l'amateur de new-thing planante un brin parano, il ferait bien de se pencher sur l'excellent L'Envol De La Locomotive Sacrée de Richard Lupoff, reprise spy-fi loufoque et détonante du Starship des Motor City 5 ("Starship / Starship take me / Take me where I wanna go !") et que Michel Demuth qualifiait de "chronique extravagante de la science-fiction au sommet de son âge psychédélique. Ouvrage quasi mythique sur les rapports du synthétiseur et du cosmos." La seconde phrase est mensongère mais qu'importe, L'Envol De La Locomotive Sacrée est un putain de grand bouquin, une preuve irréfutable de l'excellence de la SF dans les années 60/70, période pendant laquelle le genre ne se connaissait aucune crise d'identité puisque ne se prenait pas au sérieux et n'essayait pas de se définir ni de contenir ses excès ou de ranger ses auteurs dans des cases. Assurément une bien belle époque.

ITEM ! Mouais... Ne nous emballons pas. Tout n'était pas rose. C'était aussi une époque qui vit Samuel Delany faire le grand saut, passer de la SF au porno et se retrouver conspué par ses admirateurs. Vraiment, suis-je le seul à avoir aimé Vice Versa ? Des fois, j'en ai quelque peu l'impression. Par exemple, dans Metal Hurlant # 5, numéro orienté cul pourtant (avec une belle couv' de Nicollet), Dionnet écrivait : "accumulation répétitive et prétentieuse de phantasmes sexuels, écriture expérimentale comme on en voudrait plus chez les attardés de la maison Gallimard ça serait drôle, si ce n'était pas du Delany et si ça n'était pas abusivement publié dans une collection de S-F."
c'est vrai, Vice Versa, ce n'est pas de la S-F. C'est du fantastique déconstruit à forte valeur pornographique nécro pédo homo zoo - quatre adjectifs mystérieux qui lui valurent certains problèmes aux états unis. Mais Vice Versa, c'est surtout un roman qui se défend très bien tout seul : "C'est un livre magique. Les mots veulent dire des choses. Quand on les met ensemble, ils parlent. Oui, parfois ils se nivellent et rien de ce qu'ils disent n'est réel, et c'est une sorte de magie. Mais parfois une vision en jaillira, grincera et fera sonner ses ailes fort comme la machure de sueur sur le papier sous votre pouce. Et c'est une autre sorte. Je crois que les deux ont quelque chose à voir l'une avec l'autre et avec l'attention mais je ne sais pas."
C'est aussi le roman qui m'apporte une phrase de conclusion résumant assez bien l'esprit de cette entreprise bénévole dans laquelle je me suis lancée depuis deux ans - ou depuis tout une vie, allez savoir... Peut être est-ce malheureux, peut être est-ce faux mais "sans doute serai-je éternellement voué à appliquer à la restauration des vieilles choses l'énergie que je voudrais destiner aux nouvelles."

DEUX ANS DE MULLER-FOKKER

... Enfin, deux ans, pas exactement. Plutôt deux ans et dix-huit jours, vu que le mois du noir a tout chamboulé dans mon planning ultra-serré (oui, oui, j'ai un planning. Jamais respecté, soit, mais j'ai un planning, c'est l'intention qui compte, voila voila, fermeture de parenthèse) et je reprends :
2 ans de Muller-Fokker soit 199 billets, soit plus de 400 bouquins lus, soit approximativement 142 bouquins critiqués. Peut mieux faire, je sais, cela figurera d'ailleurs en bonne place dans mes résolutions pour l'année à venir. En attendant, comme le dit si bien la môme double mouche, remettez-ça c'est ma tournée. J'en reprends même pour deux années. J'espère que vous ne serez pas contre. Sachez d'ailleurs que le programme reste inchangé. Le Muller-Fokker continuera de remuer cette fange sucrée acidulée, hallucinée décomplexée, enthousiasmée et captivante qu'est la littérature poubelle de qualité et ses romans pour prolos et idiots, pour snobs et marginaux, ses espionnages débiles et sa pornographie renversante, ses polars qui claquent et sa SF qui flippe. Pas de quartier. Pauper et sans reproche. Car c'est justement dans la littérature dénigrée que l'on se fait le plus mousser le cervelet. Jusqu'à ébullition. Explosion. Dégradation. Que dis-je ? Dévolution ! Pis ! Perte totale des facultés cognitives normalement acceptés par les tenants du bon goût. Après ça, impossible de se recalibrer. Z'êtes devenus des morlocks de la chose imprimée. C'est agents secrets qui se tirent dessus en faisant du ski-nautique, virées sub-atomiques vers des micro-galaxies multicolores, nazis sadiques en goguette, monstres mutants super-membrés et nanas girondes à la mentalité roman-photo ou RIEN !
N'acceptons pas les compromis, et encore moins les hauteurs auteurisantes de la sécurité intellectuelle - je déteste l'idée d'être d'accord avec Godard mais il avait raison : ce sont bien les marges qui tiennent les pages d'un livre. Trop con qu'il ne l'ait pas compris en s'y frottant, aux marges, justement.

Et puis, si l'on se moque de vos penchants déviants, de votre goût pour l'absurde et du sérieux avec lequel vous lisez vos torchons, demandez à la grincheuse personne qui vous apostrophe un échantillon de ses propres lectures. Ça ne pourra jamais valoir un bon vieux roman poubelle à quat' sous de détective privé formaté 190 pages, bourré de coquilles et avec moulure vulgos blonde platine à oilpé en couverture. Parole de robo.

Quant aux prochains mois sur le Muller-Fokker, je vais essayer de rendre hommage à deux genres que j'ai injustement oublié jusqu'à présent. Tout d'abord le western, qui dans les années 50/60 fut le pendant aventureux du polar américain, et ensuite (à moins que je fasse l'inverse...) les romans humoristiques. Qu'ils soient vulgaires, poujadistes, illisibles, pas drôles ou étonnamment poétiques, ils forment à n'en point douter un pan majeur de la littérature populaire du 20eme siècle et ce serait tout de même plutôt bête de passer à coté.

Avant de terminer, deux choses (et puis demain, je reviens faire le point sur les bons, les très bons, les vraiment très bons romans abordés au cours de ces deux années de pulpbot...)

1 ) J'aimerai remercier les gens qui suivent, depuis deux ans ou depuis deux semaines, ce blog. Ce n'est pas une foule (environs 80 personnes par jour, mais il faudrait évacuer de ce compte les 40 pervers qui se pointent en tapant sur un moteur de recherche "femme + sodomie + chien"), mais cela me fait tout de même plaisir. Je suis pas doué pour les remerciements mais, euh, voila, merci beaucoup. Même les 40 pervers, finalement. Merci merci. J'apprécie votre tournure d'esprit.

2 ) la photo juste au dessus n'est pas de moi. Elle a été prise il y a quelques semaines à Paris, rue Jussieu, par un Espagnol et non, désolé, ce ne sont pas exactement des poubelles comme les autres. C'est le résultat des actions conjuguées d'un brocanteur et de la pluie sur la collection de BD et la correspondance professionnelle de Claude Moliterni. Je viens de découvrir la nouvelle sur le site de Rich Johnston et j'ai beau assister à ce type de spectacle à une fréquence quasi-journalière aux puces de Bruxelles, j'ai beau fréquenter assidument les poubelles et m'en repaitre abondamment, encombrant ainsi mon appartement en déchets inutiles et nauséabonds (je blague), pour le coup, appelez-moi petite nature si ça vous chante, mais ça fait un choc.
Claude Moliterni, tout de même !
(ah merde, on se quitte sur une note triste... désolé...)

FRANCE ANGLADE

En attendant les prochains updates du fokker, un photo très rétro de la mignonne actrice sixties France Anglade (dont j'aimerai bien un jour apprécier sur dvd le spy-rital James Tont : Operazione D.U.E.).
Pour information, l'image provient d'un 33 tours d'easy-listenning sobrement intitulé Danse Party Chez France Anglade, compilation de standards massacrés par des orchestres de baloches et leurs trompettes-héros (vaguement) déchaînés et à laquelle France ne fait que prêter son nom et sa jolie frimousse. Rien de plus. On notera aussi, dans la même collection, un Danse Party Chez Estella Blain et un Danse Party Chez Dalhia (sic) Lavi. Entre autres...
Avis aux amateurs.