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UN MOUSSEUX GOÛT RAISINÉ

DU SANG DANS LE CHAMPAGNE, GEORGE MAXWELL
LE CONDOR / LA MÔME DOUBLE-SHOT # 16, 1953

Quelle femme, cette môme Double-Shot ! Pourtant, ce "n'est pas un personnage de légende," nous informe l'éditeur en quatrième de couv', non, non, "c'est une fille comme beaucoup d'autres, un peu mieux roulée avec un côté curieux qui fait qu'on s'attache à elle dès qu'elle entre en scène."
Oh ! Arrêtes ton char. Ça joue les modestes mais on démasque bien vite tes intentions. Droit au but : Rien que les descriptions qui nous sont faites de la poitrine de l'héroïne annoncent la couleur. "C'est plus une devanture, c'est une balustrade !"
La môme Double-Shot, c'est donc une fille bigger-than-life. Elle vous fouette le sang pire qu'une poignée d'orties. On dirait Bill Ward illustrant un strip de papy Spillane. Et ses aventures sortent du même canon. Le calibre improbable, lourd à porter. C'est généreux et idiot. Trop généreux et trop idiot. Pas forcement bon pour la santé non plus.

Bref. Dans l'épisode du jour (Du Sang Dans Le Champagne), la môme enquête dans le Chinatown San-Franciscain. Accompagné par son fidèle gorille (vrai nom : Charly Brown), elle cherche un mystérieux meurtrier, un dangereux dealer, un sinistre sectateur.
Possible que les trois ne soient en réalité qu'une seule et même personne : le Dragon Noir. Un gugusse peu recommandable. Les fanas de George Maxwell qui se sont déjà tartinés quelques aventure de Miss One-Shot, la fille de Double-Shot, savent à quoi s'en tenir. On assiste ici à la naissance d'une certaine continuité dans l'œuvre de Maxwell. L'arbre généalogique prend racine, et d'une façon que la bienséance reprouve. GO, MAXWELL, GO !

Mais reprenons. La môme traine dans Chinatown by night et son périple se transforme très rapidement en une belle étude de ces clichés so-fifties concernant l'exportation aux USA de l'homme asiatique et de sa culture si particulière, si fascinante, si pas-comme-la-notre.
Car le Chinois est un être fondamentalement étrange. Faut le savoir.
Il est jaune, de petite taille, silencieux (sauf en groupe - là, "on se croirait enfermés dans une voliere de cacatoès"), fourbe, cruel et malin. Il a un code de l'honneur bien à lui, cause un dialecte barbare pleins de niak-niak et produit une cuistance qu'à une drôle d'allure. Surtout, les chinetoques, avec leurs petits yeux bridés et leurs faces de macaques savants, se ressemblent tous comme deux gouttes d'eau.
Difficile alors, avec pareils olibrius, de mener décemment son enquête. L'investigation piétine. Concernant ses activités occultes dans des tripots servant de couvertures à d'inquiétantes sociétés secrètes, le Chinois se tient coi.
Muet comme une carpe.
On n'en attendait pas moins de sa part.

Et pendant ce temps-là, George Maxwell fait reluire ses artifices habituels. Sexe et sadisme, délires et déviances. Page 41-46, Hopy Travers est droguée puis violée par le Dragon Noir. "Et quand je pense qu'avec ça j'ai pris mon fade comme un bourrin..." dit-elle avant de rajouter, sentencieuse :
"Bordel de putes borgnes !"
Hélas pour elle, les choses ne vont pas en s'améliorant. 20 pages plus loin, bâillonnée, tenue en respect, elle subie les derniers outrages en matière de médecine gynécologique. On explore "le fond du fond de la môme Travers" et Maxwell débloque dur. C'est l'origine du monde à mots couverts... "et pourtant, tu peux croire qu'ils n'ont pas mis des gants pour me chanstiquer la cramouille, ces mirontons de malheur !"
Après ça, forcement, comme le disait très justement Hassan i Sabbah à ses potes de défonce, là haut sur la montagne, ouais, après ça, tout est permis.
Nature.
Les Chinois, histoire de démontrer qu'ils ne donnent pas que dans la torture raffinée des berlingots de ces dames, se mettent à œuvrer dans le sévices salement graphiques.

Ainsi, tandis qu'un équarrissage de guibole à la scie musicale égaille le chapitre 14, voila le chapitre 15 qui nous compile en 2 pages top chrono un hit parade renversant d'atrocités gerbouilleuses. Le sol n'est plus inondé de jus de barbaque, c'est la pièce entière qu'est devenue une piscine aux tons carmins.
Du Sang Dans Le Champagne ?
Plutôt quelques gouttes de mousseux dans des hectolitres d'hémoglobine
.

Et George Maxwell qui tire à la ligne.

Ou plutôt : mitraille à la page. Mitraille la page itou. On le sent patiner. Faut remplir, et le contrat, et les feuillets, tout ça pour pas lerche.
Alors c'est l'imagination qui morfle.
La môme est ainsi faite prisonnière par les Chinois tous les 3 ou 4 chapitres
. Sur les 31 que compte le bouquin, ça laisse la place à une belle pelletée de répétitions. Hope Travers ligotée, bâillonnée, fourragée, noyée, lâchée dans une fosse à serpents, tenue en respect par une sarbacane qui débite de l'obus d'artillerie. Tout le répertoire y passe et le lecteur non-averti trépasse. Le pauvre.
Il n'aura pas tenu jusqu'à la fusillade finale.

"Alors là, mes aïeux, ça crache la mort dans tous les azimuts."
Tu l'as dit bouffi. Et le roman qui se clôture enfin. Il n'a satisfait aucune intelligence mais, entre son amoncellement de bidoche trouée et de rigoles de raisiné, a permit à quelques beaux morceaux de phrases, tantôt vulgaires tantôt poétiques, d'éclore. Il faut les chercher longuement. Comme une truffe dans la fange, ça nourrira surtout les cochons. Et c'est justement pour cela qu'on aime George Maxwell. Ça, et aussi parce que La Môme Double-Shot est un défouloir hystérique unique en son genre.
C'est indigent et indigeste, certes, mais c'est aussi fabuleux que fantasmatique. Ça fout la barrabille dans le bon goût et ça ne s'explique pas.
On aime ou on décarre.
Point à la ligne.

JEAN ROLLIN ET LA LITT' POP'

Jean Rollin n'est plus. Coïncidence étrange (?), hier au soir, le Blog of Terror lui consacrait un très bel article. "Jean Rollin voit un monde triste qu'il tente de réenchanter, de rendre à nouveau désirable."
Aujourd'hui, les hommages pleuvent. L'exercice est bien souvent creux. Pour citer monsieur Medusa, "c'est comme ça ici bas, on se rend compte de la valeur des gens une fois qu'ils sont partis !"
Je préfèrerai ne donc pas m'attarder sur le territoire des afflictions patrimoniales. Malheureusement, il existe une facette de Jean Rollin que l'on évoque très rarement alors qu'elle constitue une composante essentielle de son œuvre. C'est celle du Jean Rollin amateur de littérature populaire, toqué de Fantômas, fondu de romans à quat'sous.
Je ne parle pas du Jean Rollin écrivain (une poignée de romans au Fleuve Noir et chez Florent-Massot) mais bien du Jean Rollin lecteur, éponge à mots et à images, formé à la "marginalité anarchisante " par les publications dénigrées du roman de gare.
Exploitation sur papier. Explosion imprimée de fantasmes, de poésie, de folie.
"C'est vrai que cette littérature bon marché à influencé les adolescents que nous étions."
On le savait amoureux des sulfureuses héroïnes de George Maxwell, du style désespéré de Claude Ferny, du Salauds ! de Anta Grey.
De cette éducation en dehors des sentiers battus, Jean Rollin tirera une très belle postface. Elle accompagne la réédition des Anges De La Mort d'André Helena (Fanval Noir, 1988) et si l'écrivain narbonnais occupe dans cette évocation une place centrale, Rollin aborde tout de même une très large portion de sa fascination pour les feuillets poussiéreux des mauvais genres.

"Il ne nous serait jamais venu à l'idée d'acheter un livre neuf."
En quelques phrases, en quelques pages, il donne littéralement corps à cette passion bizarre que la bibliophilie normale récuse, à cette errance/recherche de trésors oubliés, à cette obsession étrange pour des textes qui, aux yeux de tous, ne suggèrent "rien qui vaille."









Et si Jean Rollin n'est plus, rien ne m'empêche cependant d'imaginer que, dans une dimension parallèle à la notre, il réalisa pour le grand écran une adaptation cinématographique des aventures de la Môme Double-Shot avec Brigitte Lahaie dans le rôle-titre.
Chacun son truc, non ?...

ÇA S'TERMINE TOUJOURS MAL !

FILLES A LOUER (CALL-GIRLS), RALPH WILSON
ÉDITIONS JEAN FROISSART, 1955

La première page du récit a comme des relents de George Maxwell. On y trouve d'ailleurs deux mots bien connus des fanatiques de la Môme Double-Shot : belvédère et plymouth.
La deuxième page donne le ton et m'excite violemment. "Les gars, c'est pas le moment de s'endormir, sortez les sulfateuses, ça va cracher ! "
Quant à la troisième page, elle balance un nouveau relent maxwellien avec l'apparition d'une De Soto bleue. Il ne manquerait plus qu'une poupée blonde à double détente à son bord et ce serait dans la fouille.
Mais voila, Filles à Louer n'est pas une aventure de la môme Double Mouche. Et Filles à Louer n'est probablement pas non plus un texte de George Maxwell - tout du moins si l'on considère la bibliographie établie par Pierre Cabriot comme exhaustive à 100 %.

Car dans Filles à Louer, nous ne sommes jamais très loin du roman sexy-swing propre au grand Maxwell.
Ça va vite, ça parle fort, ça mitraille au kilomètre et ça se poursuit constamment, à l'aide d'une armada de bagnoles rutilantes et trafiquées, qui déraillent parfois dans d'hallucinantes pointes de vitesses, partent dans le décor et explosent, brulant ainsi jusqu'à ce que mort s'en suive leurs passagers agonisants aux membres disloqués.
L'intrigue qui enrobe tous ces exploits fait bien entendu dans le classique. Filles à Louer, c'est encore une histoire de gangs rivaux qui se canardent à qui mieux mieux avec, d'un coté, les gentils méchants qui prostituent des filles de luxe et de l'autre, les méchants méchants qui, eux, veulent piquer les putes aux autres pour se faire un max de pèze.
Le roman est donc usiné à l'économie et ne donne à lire que deux types de scènettes.
Primo, des passages d'action assez peu épicés car principalement retranscrit en dialogues, comme si il s'agissait d'une pièce de théâtre ou d'un film ultra-fauché, et secundo (le plus important), des passages sexy affriolants, illustrant la vie quotidienne de nos call-girls :
longues séquences de strip-teases aguicheurs, baisés langoureux, préliminaires suaves - c'est mignon tout plein et jamais porno. On pense aux nudie-cuties des années 50/60, avec cette même hypocrisie canaille, ce ton de documentaire bidon sur des moeurs immorales à l'attention des pervers timides.
Disons que Filles à Louer a un peu la gueule d'un mondo scénarisé par George Maxwell.
Rajoutons à ce cocktail une foultitude de mots en anglais pour faire vrai (because ça se déroule aux states), des expressions argotiques parfois mal employées ("rififi" ne signifie pas "oseille"), un truand rital à l'accent rigolo ("zé veux lé lessiver cetté crapoule ! "), diverses références cinématographiques, des tenues de marlous improbables (notamment quelques descriptions de cravates pas piquées de hannetons), des hectolitres d'alcools forts ingurgités page après page et, forcement, l'inévitable misogynie entretenue par ce type de littérature.
"Une souris ? mais c'est une machine à gagner de l'argent. Vous connaissez ces appareils automatiques étincelants dans les drug-stores. Vous glissez une pièce dans la fente et vous obtenez au choix des hot-dogs, un plat préparé, un verre de lait, un coca-cola, etc... La différence avec une putain est-elle bien grande ? Peut être dans le nombre de dollars à dépenser."
Filles à Louer donnerait donc presque envie de se lancer dans le bizness des fleurs de bitume. "Rien ne vaut une belle môme bien roulée pour gagner du fric," déclare d'ailleurs le héros, un spécialiste du dérouillage de gonzesses récalcitrantes.
Malheureusement, à la fin, pour cézigue, ça se termine très mal et le lecteur, forcement intéressé par une brillante carrière dans le secteur du maquignonnage de femelles, se rend alors compte que ce boulot de rêve (buter ses rivaux, frapper ses femmes, coucher avec les plus girondes, se faire des couilles en or) n'est pas tout à fait sans risques.
C'est con mais c'est la vie.

Quittons-nous tout de même sur une note positive car, en dépit de ce final décevant, bâclé sur l'air fatigué du Crime Does Not Pay par un auteur ne sachant pas vraiment comment conclure son affaire, il faut bien avouer que Filles à Louer est un excellent roman stupide, je dirais même plus : un roman profondément et surtout joyeusement débile, plein d'une idiotie désinvolte et d'un mauvais gout aussi revigorant que bas du front.
En bref : de la came de premier choix pour les désaxés du sexy-noir.
Mais ça, j'en suis sûr, tu l'avais déjà compris !

I'M BACK, BABY, I'M BACK !

ITEM ! Après deux mois d'absence, je suis de retour. Et non, je n'étais pas en vacances. Ou en dépression. Mon scanner était clamsé, Belinda Contre Les Manges-Disques l'avait exténué, 27 pages d'affilées, il ne s'en était pas remis. Bilan, il a fallu le temps d'en trouver un nouveau à la portée de mes maigres moyens (5 euros, grosso-modo mon budget nourriture pour la semaine) et qui, c'est la moindre des choses, fonctionne. C'est désormais chose faite.
Bon, on dirait vaguement, lorsqu'il lance ses capteurs CCD à l'assaut du document à numériser, un grand-père asmatique à la sortie d'un bal dominical un peu trop arrosé mais bon, ça va, il abat vaillamment son turbin, la preuve :
ITEM ! J'aimerai remercier un certain Tedial, pour son commentaire d'encouragement posté il y a un peu moins d'un mois. Et du coup, je me permets d'y répondre ici.
Donc, cher Terdial : "Message reçu 5 sur 5 ! Je vais essayer de parler un peu plus souvent des productions Gérard De Villiers. Par contre, je dois avouer n'avoir jamais lu de Police Des Moeurs. Mais l'erreur sera réparée prochainement, je viens d'en dégotter un petit lot à 10 centimes la pièce."


ITEM ! Et Puisque l'on cause Gérard De Villiers, avez-vous remarqué que le nouvel illustrateur de la Brigade Mondaine n'est autre que ... Denis Sire ? Hé oui ! Quand il le veut, Gégé, il assure un max

ITEM ! Attends, je le répète en caplocks activé pour les durs des mirettes et les distraits de l'arial taille dix, donc (hum hum, éclaircissement de voix ) : DENIS SIRE ILLUSTRE LES COUVERTURES DES NOUVEAUX BRIGADE MONDAINE !

Hop, c'est bon, je vois Filo bander.


ITEM ! Mais ne nous emballons pas ! Avant de causer des séries de police érotique, j'aurais pas mal de choses à caser. La pile des romans à numériser et à disserter est maousse. D'ici, je vois du Richard S. Prather (auteur des aventures de Shell Scott), du Fleuve Noir Spécial Police, du Francis Tigrone (en mode sexpionnage OSSEX), du John Eagle Expeditor (avec une gonzesse en couverture que tu connais certainement...), du Nick Carter Kill Master, du western à gogo, américain, français, italien, du Luc Ferran, du Vic St Val, du Zodiaque, du André Caroff, du Bastiani, du Lesou, du Moorcock, du polar sexy, de l'humour populo et puis d'autres choses aussi mais je m'arrête là sinon j'y passerai la journée et on n'avancera pas.
ITEM ! Bref, j'ai du pain sur le manche. Mais avant de te laisser, une petite précision concernant les deux couvertures scannées. L'amateur y aura reconnu le relooking seventies des aventures de la môme Double Shot - devenue ici Vicky Vamp. L'auteur n'en était plus George Maxwell mais Jack Bradley, "traduit et adapté de l'américain" par un certain Joseph Benoist qui, dans la même collec' (Transworld Publication International Pocket), donnait à lire la série du Talonneur.
Le premier volume, Vicky Vamp, est une réécriture de Fallait Pas Me Doubler. Je n'ai par contre pas identifié le deuxième, Un Sac De Noeuds mais je pense qu'il doit s'agir d'un mélange de Va Te Faire Voir et de Y Manque Une Brique. De toute façon, rien ne vaut les originaux.

ITEM ! Je suis poli. Je termine donc en vous disant : à bientôt !

GEORGE MAXWELL RÈGLE SES COMPTES EN DOUCE...

TIREZ A VUE, GEORGE MAXWELL
LE PONT-NEUF / MISS LUGER # 1, 1958

En relisant dernièrement du George Maxwell, je me suis rappelé d'un détail que j'avais omis de mentionner et qui pourtant présente un certain intérêt.


Ainsi, vous vous en souvenez peut être, dans son étude consacré à l'auteur de la Môme Double Shot, Tonton Pierre nous apprenait que le manager de Maxwell n'était autre que François Richard - une figure bien connue des amateurs du Fleuve Noir puisqu'il en fut le directeur littéraire de 1949 à 1978 tout en signant (?) aux cotés d'Henri Bessière des romans d'Anticipation et d'Espionnage sous les pseudonymes transparents de F.H. Ribes et F. Richard-Bessière.
François Richard, pour écrire les choses simplement, sans s'embarrasser d'équivoques tout en prenant le risque d'émettre un jugement hâtif et en parti erroné, François Richard, donc, ce n'est pas vraiment le genre de gonze que je pourrai qualifier d'honnête homme.
Henri Bessière l'a d'ailleurs déjà dit à de nombreuses reprises et ce qu'il pense du personnage est suffisamment éloquent pour dresser le portrait d'un agent littéraire aux pratiques et aux procédés largement discutables, bien qu'extrêmement ordinaires.

Grosso modo : François Richard n'était qu'un filou de plus dans le monde de l'édition populaire.

Mais François Richard était aussi le manager de Georges Esposito, dit George Maxwell, et dont les romans, pendant la période aux éditions du Trotteur et du Condor (soit de 1952 à 1954), furent faussement adaptés de l'américain par un certain Richard Esposito.
(...Richard comme François Richard et Esposito comme Georges Esposito... mais tu avais déjà dû piger l'astuce, excuse-moi de te prendre pour un loquedu...)
Par la suite, lorsque George Maxwell passa à la Sogedide, puis au Pont Neuf, le nom de Richard Esposito disparut des mentions d'adaptation.
Le contrat entre Richard et Esposito/Maxwell avait-t-il été rompu ?

Tonton Pierre semble, dans son étude, indiquer le contraire. Je ne m'hasarderai pas à le contredire. Pourtant, la question mériterait d'être posée puisque c'est justement à cette période qu'un personnage de papier fait son apparition dans l'œuvre de George Maxwell.

On le remarque à peine. On pourrait même dire qu'il est insignifiant. Et personnellement, je ne l'ai rencontré que deux petites fois.
La première, ce fut dans la série du Jaguar, sous les traits de l'espion Frank Richard, un proto-James Bond falot et phallocrate, brutal, idiot et vaguement détestable. C'était en quelque sorte le dindon de la farce, un pathétique agent américain qui s'ingéniait, mais sans aucun succès, à contrer la sublime et sinistre anti-heroïne du texte, le Jaguar, femme-espion indomptable et pleine de ressources.
La seconde apparition fut plus intéressante... bien que plus courte.
On la découvre dans Tirez à Vue, le premier volume de la série Miss Luger, ultime variante un peu fatigué de la Môme Double Shot.

Cette fois, l'individu s'appelle Francis Ricardi. C'est un gars qui bosse dans une imprimerie comme correcteur. C'est surtout un triste salaud, veule et lâche. On apprend d'ailleurs qu'il a "tout de la carpette un jour de pluie.

Ses petits yeux porcins luisent dans sa trogne graisseuse."

Charmant bonhomme, n'est-il pas ?
D'ailleurs, George Maxwell lui réserve un traitement maison expeditif. Francis Ricardi apparait en page 40, se fait dessouder en page 60. Entre temps, il a reçut une petite correction de la part du gorille et de double-mouche.
On sent qu'il était aimé de l'auteur, le Francis Ricardi... Et son blaze ne trompe pas. Il désigne clairement quelqu'un du doigt.
Mais vous connaissez la formule...
"Toute ressemblance avec des personnages ayant existé n'est que pure coïncidence, etc, etc..."

GEORGE MAXWELL UNCOVERED

J'aurai dû parler de cela il y a déjà quelques temps. Au moins un mois. Peut être un mois et demi. Mais je ne suis pas quelqu'un de très fiable. Je m'en excuse. Parler de quoi, exactement ? De George Maxwell évidement.
Car enfin, enfin, la lumière a été faite sur cet auteur qui me tient tant à cœur et qui justifia, une année et quelques mois auparavant, la création de ce blog.
Là dessus, je ne peux que remercier Tonton Pierre, ou Pierre Cabriot, selon que vous soyez dans le registre du familier ou pas. En effet, ce pilier de l'excellent et essentiel forum à propos de litterature populaire s'est fendu très récemment d'une superbe monographie sur l'homme derrière la môme double shot. On ne savait rien (ou presque) sur l'étrange George Maxwell et désormais, nous savons presque tout. Son nom, sa vie, son œuvre (71 romans ?) et son destin tragique... pour faire dans le pathos. Mais Cabriot évite cet écueil. Du trajet professionnel de Maxwell, il trace les grandes lignes, révèle de nombreuses œuvres cachées, ses liens avec François Richard (ça aurait été quelque chose que Maxwell au Fleuve !), Edmond Nouveau, Roger Dermé. Entre autres. De sa vie, il ne garde que la fin, en une chute étourdissante. The last shot, comme il l'écrit lui-même. Sacrée affaire... Pour les passionnés de polar-sexy des années 50, le texte et la bibliographie sont incontournables. Vous pouvez trouvez cela à cette adresse http://litteraturepopulaire.winnerbb.net/pseudonymes-f20/maxwell-george-t967.htm et, si comme moi vous avez l'âme du completiste papier, Tonton Pierre a auto-édité son étude en 32 pages richement illustrées tout en couleur - port compris, ça donne 7 euros pour les français et 7,25 pour les belges.
Bref, une initiative décapante que je ne peux applaudir qu'en tapant mon clavier contre la table. Houra !

(la môme, dans l'une de mes couv' favorites de Salva)


Et puisque nous en sommes au rayon des révélations, c'est en chinant pour une modique somme dernièrement le Bibliothèque Du Fantastique (les omnibus Fleuve Noir) consacré à Gérard Prevost que j'ai appris l'identité exacte de Peter Viane - dont Prevost remania le Ne Les Tue Pas Tous des éditions du Trotteur en Pitié Achevez-Moi pour le compte des éditions de la Seine.
Donc, Peter Viane cachait en réalité Pierre Cambot et Liane Mery. Ce dernier nom parlera très certainement aux amateurs de romans cochons seventies. Mais oui, voyons, Liane Mery, cet auteur Euredif qui donna à la collection Aphrodite de si beaux titres comme Duo à Trois, L'Amour Qui Va Qui Vient ou (celui-ci détruit tout sur son passage :) Zizi-Boy. Des romans à l'eau de rose avec un peu de fesse dedans. De vraies purges. Par contre, Pierre Cambot, inconnu dans mon bataillon...

Voila, c'est tout pour aujourd'hui ! Bonne nuit !

TERMINUS DE LA RIGOLADE

LA MORT EN CARNAVAL, GEORGE MAXWELL
SOGEDIDE / LE JAGUAR, 1954

Après s'être tartiné des piles et des piles de mauvais romans, il est toujours étonnant de constater que la Spy-Fiction, cette sous-production populaire pas très fameuse, a connu en son temps quelques pics de qualité. Étonnant parce que l'espionnage, j'en dis constamment du mal et pourtant, ce genre ne peut être uniquement réduit aux lourdeurs de Frankie Belinda, à la retenue ennuyeuse de Paul Kenny ou bien aux multiples délires alcoolisés de tacherons anonymes puisqu'on y trouve aussi de bons romans d'action et d'aventures qui, en 190 pages, résument efficacement tout ce que ce genre de production peut contenir d'exceptionnel. Il y a les Yves Dermeze en SEG, les Gil Darcy à L'Arabesque et (le firmament du genre à mes yeux) Le Jaguar de George Maxwell.
"Un passé tumultueux, des dangers sans nombre courus sur tous les continents, une volonté à toute épreuve, au service d'un système nerveux en acier trempé, et un nombre de missions, plus périlleuses les unes que les autres aux différents degrés du contre-espionnage américain, lui avaient forgé un tempérament à la mesure de ce qu'on attendait de lui, et surtout de ce qu'exigeaient les circonstances.
Pour l'heure, il n'était rien moins question que de contrer l'infernal Jaguar sur son propre terrain !"
La Mort En Carnaval, premier épisode de la série, est approximativement identique aux autres Jaguars que j'ai pu lire précédemment. Oui, oui, je l'avoue, j'ai effectué mes lectures dans le désordre mais c'est pas important, on y comprend rien de toute façon. Le Jaguar, c'est du pulp sans aucune autre prétention que le divertissement écervelé. C'est rapide, voire même ultra-nerveux, avec une unité de temps resserrée à l'extrême et des péripéties sans cesse renouvelées.
L'écriture, comme d'habitude chez Maxwell, est à la fois dénué de toute qualité littéraire apparente et pleine d'un style percutant, vulgaire, unique. L'auteur y met à profit les ficelles qui faisaient déjà leurs preuves sur ses Môme Double-Shot : pas d'intrigue nette, pas de pourquoi ni de comment, juste un délirant enchaînement d'action, de courses poursuites, de pugilats et de sexe.
Mais si les enjeux de ce premier volume sont particulièrement abstraits, l'histoire est par contre toute simple. Le Jaguar, anti-héroïne violente et cruelle, vole les documents confidentiels d'un militaire haut-gradé sud-americain. Pour le compte de qui ? On s'en tape. L'important, c'est que son ennemi de toujours, l'agent de la CIA super-bright et misogyne Frank Richard, se lance à ses trousses. Après, c'est une accumulation sans fin de retournements de situation, de double-crossing en tout genre et de tortures physiques à la sexualité exacerbée et aux finalités troubles.
"Il plaqua ses lèvres aux siennes, éperdu de désir, noyé, submergé de folie érotique et ne s'aperçut pas que les mains fines et nerveuses de la femme encadraient sa face violacée, congestionnée, aux yeux désorbités.
Mais il ne put s'écarter à temps ! Comme une hydre elle l'avait enveloppé, assimilé à elle sans qu'il s'en rendit très bien compte, et maintenant, il tentait désespérément de se dégager. Mais elle tenait bon. Pris par la langue, qu'elle broyait entre ses dents tranchantes, Walter tenta de nouer ses mains à son cou. Les deux pouces du Jaguar lui entrèrent en même temps dans les yeux..."
Car si George Maxwell fut calmé après l'arrêt forcé de ses Môme Double-Shot et son transfert à la Sogedide d'André Martel, il exhale tout de même de cette Mort En Carnaval les habituels relents de fantasmes cradingues qui firent la réputation de l'auteur. Et outre cet accouplement de mante religieuse vorace (bien plus explicite dans les paragraphes suivants), s'y trouve aussi de nombreuses tortures prolongées (au fouet, au clope, au couteau), de l'explosion de crane à coup de tatane et un hilarant frotté de croupion de clébard au piment rouge. Du grand art !
Bref, si vous voulez vous faire une meilleur opinion des romans d'espionnages, le Jaguar est un morceau de choix. Malheureusement, il est aussi unique en son genre.

DU BRUT POUR LES BRUTES # 2 : LITTERATURE DE PETITES VERTUES


FALLAIT PAS ME DOUBLER !, GEORGE MAXWELL
LE CONDOR / LA MÔME DOUBLE-SHOT, 1952

Il y a à peine une semaine, l'excellent Monsieur Losfeld abordait ici-même le premier volume des aventures de la Môme Double Shot, Fallait Pas Me Doubler. Un roman à double tranchant, par ailleurs, et sans jeux de mots.

George Maxwell, je le répète mensuellement, c'est l'énervé anonyme du polar des années 50. Un type qui écrit vite, sans fioriture et avec beaucoup de gueule les histoires sanglantes du poupée blonde doté d'un fort caractère et d'une belle carrosserie. C'est une absence totale de finesse littéraire, une gigantesque grossièreté de 180 pages, un truc pas très conforme - et plus si affinités.
"Ça pue l'alcool, le linge sale, la sueur, le cigare froid et le vice fashionable. On voit que dalle; trop de fumée, pas assez de lumière; y a une main qui me court sur la jambe, et qui remonte comme un gros rat; un rat qui pinsouille, mordille et me tire les poils, et moi, je suis le mouvement... J'ai les nichons en compote et la peau huileuse à force de transpirer; je glisse sans toucher terre , et j'évite des monticules vautrés, farcis de gémissements; j'écrase de mes pieds nus des bides velus, des doubles et des triples, et des gueules en accordéon qui couinent quand on marche dessus. J'ai l'impression d'être en pièces détachées [...] J'ai envie de dégueuler, tout ça est dégueulasse."
Pour autant, Fallait Pas Me Doubler, passé son premier chapitre entre orgie mondaine hallucinée et écriture automatique, se montre plutôt timoré. Bien entendu, il y a de la violence (les habituelles fusillades et poursuites en voiture). Il y a aussi pas mal de cul (sur le premier tiers du bouquin, elle se fait un gars différent par chapitre). Mais rien qui sorte cette histoire du cadre très formaté d'un polar sexy type La Tarente.
C'est le double tranchant de l'affaire.
Pour du Maxwell, la vitesse de croisière n'est pas très élevée, les situations assez classiques et la déviance plutôt minime. Pour peu que vous ayez lus quelques Double Shot plus tardif, vous serez immanquablement déçus. On est très loin du délire total d'un Pyjama de Sapin, pour citer mon favori actuel.
Et dans le même temps, en ce qui concerne le registre polar sexy, Fallait Pas Me Doubler est bien au dessus de la moyenne. C'est moins stupide, moins raciste, moins gras, sans guimauve et mieux écrit.
Et puis c'est du Maxwell, c'est le premier Double Shot. Un "Spécial Origine" avec l'apparition des futurs triplets de la tatane, Ben, Kiss et le Gorille. Pour le reste, Maxwell essaye certaines choses (du cul ?), tâtonne (du cul ou une intrigue ?), cafouille (deux intrigues ?) puis lance la machine dans un final assez correct. Bref, Fallait Pas Me Doubler est un brouillon stylistique. Une tentative plutôt réussie, à la fois intrigante et ennuyeuse, décevante et fort plaisante à lire.
Dans le genre, j'ai connu bien pire.


FRISSONS DE JOIE, LARRY SAUNDERS
EDITIONS DE LA TARENTE, 1953

Tiens, par exemple, ce truc-là. Frissons de Joie. Ou Bâillements d'Ennui. Ou Gros Yeux de Merlan Frit, car l'intrigue est totalement dégénéré donc, forcement, on lève assez souvent les yeux au ciel. Mais je dis ça en employant le sens le plus positif possible du mot dégénéré.
Frissons de Joie, c'est un roman qu'il ne faudrait jamais lire et pourtant, nous aurions tord de nous en priver.
C'est à l'érotisme suranné ce que la charcuterie est au végétarien. Un vrai concentré de douceur poétique pour mec viril gonflé aux flageolets. Une perte de temps absolue.

Mais permettez moi donc de vous en faire l'article... Je veux dire : de résumer la chose tant que j'en ai encore le courage.

Notre héros, Tom, est un clochard narrateur de type première personne du singulier. Un gars mal rasé et puant qui passe son temps à jurer comme un charretier (un slang vieille france très démodé) tout en traînant ses guêtres sur les routes des Etats Unis. Et qui pratique aussi l'abstinence sexuelle propre à sa classe sociale. Bref, Tom ne mène pas une vie très folichonne. Jusqu'au jour où il sauve Lona La Tigresse d'une bande de va-nu-pieds en rut.
Lona, c'est une super-poupée vagabonde un peu dominatrice sur les bords. Un truc qui remonte grave la libido de notre pauvre Tom. Malheureusement, elle est plutôt du type chaste. "Ah, si la plus hideuse des négresses était passée à ce moment-là, je crois que je l'aurais violée !" déclare, la queue entre les jambes, notre héros à la verve fougueuse.
Mais Lona a aussi une mission. Elle veut venger son mari, assassiné par les truands d'une organisation tentaculaire - une drôle de mafia principalement constituée de clochards libidineux et de nanas dévergondées genre Rosa La Chienne. Lona engage donc Tom comme garde du corps et ils partent ensemble, en vadrouille, châtier les saligauds et, bien entendu, se taper quelques séries de nanas dévergondées.
A partir de là, j'ai quelque peu décroché de l'intrigue à proprement parler, mais c'était pas très grave. Tout l'intérêt, vous l'aurez compris, réside dans le festival de subtilités sexuelles auquel Frissons de Joie nous convie. Un exemple ?
"- Vous allez vite, beaucoup trop vite !
Trop vite, qu'elle disait ! Avec une rombière de cette coupe-là on n'est jamais sûr qu'elle va pas se débiner au bon moment et vous laisser en carafe [...] Quand on est fixé on peut remettre ça avec les hors-d'oeuvres et le tremblement. Et aïe donc, ça n'a pas fait ouf... La réalisation de mon désir avait trouvé un domicile. Ah les anges ! C'étaient eux qu'avaient fait le Técalemit dans cet écrin de velours qui m'allait comme sur mesure. Et revlan. Pas besoin d'attendre le chant du coq. On se comprenait si bien qu'on s'est foutu à hurler tout les deux en même temps."
A la fin, l'auteur y fait une grande révélation. Tom n'était pas un clochard mais un ponte du FBI en mission sécrète. A ce moment là, on ne s'étonne plus de rien. On est même bien content puisque le roman est terminé.
Comme ma chronique d'ailleurs.
Donc, que dis-ai-je à propos du roman noir sexy ? Ah oui : c'est stupide, raciste, gras, guimauveux (car il y a une foultitude de bons sentiments) et mal écrit. Mais à moins d'être une fiotte trop attachée à la noble délicatesse des arts littéraires, c'est tout de même assez marrant.

SEMAINE NOIRE # 7 : EN VRAC ET EN QUATRIEME VITESSE !


SYMPHONIE EN 6.35, ANGE BEAUCAIRE
HACHETTE / LE POINT D'INTERROGATION, 1955

Avec une couverture pareille, n'importe quel bouquin est une déception - surtout si l'auteur ne fait pas dans le pop-corn hardboiled sexiste et brutal façon Mickey Spillane.
Manque de pot, Ange Beaucaire est plutôt versé dans le Simenon, ou le Boileau-Narcejac - le roman policier réaliste, le roman d'enquête minutieuse. Et pour ce qui est de la minutie, Beaucaire n'y va pas de main morte : 280 pages en petits caractères (je prends de mauvaises habitudes avec mes Flammes d'Or aux typos pour aveugles) remplies d'expertises balistiques, de filatures, d'interrogatoires à la régulière, le tout entrecoupé par les suppositions et les doutes quotidiens de nos inspecteurs face à une affaire de grand banditisme à l'ampleur considérable.

À part ça, pas de bastons, pas de règlements de comptes, tout juste quelques petites courses poursuites effectuées par de véritables gentlemen du volant. Et je ne parlerais même pas de l'absence totale d'érotisme. L'amateur du saint-diptyque ultra-violence + porno vintage ferait mieux de retourner lire du George Maxwell.
Les autres apprécieront une description passionnante et détaillé à l'extrême du Paris des années 50, le véritable personnage principal de ce roman.
"La place Pigalle était comme le métro. Chartois avait toujours trouvé que, de jour, elle n'était plus qu'une annexe de la zone, un espace misérable, un decors inachevé et sordide. Avec ses maisons laides, biscornues, plantées de guingois, que l'on eût dites construites en carton-pâte. Avec sa fontaine ignoble entourée d'arbres squelettiques, pitoyables. Avec la masse noire, sinistre, du cabaret Le Sphinx. Avec les enseignes géantes découpant sur le ciel, comme des puits de pétrole, leur ossature métallique : Les Naturistes, Nu-Du-Pigall's. [...] Au millieu de cette médiocrité agressive, il n'y avait qu'une fausse note : la façade respectable et digne, singeant l'antique et le cossu bourgeois, de l'hotel Royal-Pigalle, dernier bastion du mauvais goût academique livré à l'assaut des monstres du bas-fond."
Passé outre la roublardise du titre et de la couverture, c'est tout de même une excellente surprise.


ECHEC AU PORTEUR, NOËL CALEF
HACHETTE / LE POINT D'INTERROGATION, 1956

Je vais éprouver quelques difficultés à dire la même chose de cet Echec Au Porteur signé Noël Calef, l'auteur d'Ascenseur Pour L'Echafaud et de divers autres trucs à l'eau de rose pour mectons sensibles. Je vais donc expédier ça en vitesse.
Le roman entrecroise le joyeux quotidien de deux gamins parisiens et une sombre affaire de traffic de drogue - pour résumer grossièrement, c'est l'histoire d'un intermédiaire un peu trop honnête qui, pour les beaux yeux de sa petite amie, veut échapper à sa misérable condition mais ne réussi qu'à s'empêtrer irrémédiablement dans un engrenage meurtrier.
Ça se veut à la fois humaniste et tragique mais ce n'est que difficilement palpitant, pas très bien cousu et surtout, extrêmement prévisible. Quant au final, il est totalement idiot : depuis le début, nos truands (un camé boiteux et un allemand) s'étaient emmêlés les pinceaux avec leur bombe maquillée en ballon de football. Et vous appelez ça des durs ?
Je le sentais venir depuis un bon moment mais j'espérais que l'auteur soit assez malin pour éviter cette chute. Raté.

Sinon, le bouquin reçut le Prix du Quai des Orfevre en 56, et fut adapté au cinéma en 58 avec Serge Reggianni dans le rôle du pauvre type passeur de drogue. À ce que j'en sais, les scénaristes auraient réécrit la fin. Un signe qui ne trompe pas.


J'VEUX MON BLE, GEORGE MAXWELL
LE CONDOR / LA MÔME DOUBLE-SHOT, 1953
DES HOURIS ET DES MÔMES, GEORGE MAXWELL
SOGEDIDE / MISS ONE-SHOT, 1956

Toujours une histoire de gamins, mais celle-ci ne boxe pas dans la même catégorie. Avec J'Veux Mon Blé, fini les somnolences aux cotés de gentils petits parisiens à la Robert Doisneau, voici du vrai sale gosse de la zone. Du pauvre, du malade, du détraqué, de l'excité qui veut faire comme les grands : voler, tuer, baiser et se droguer. Et plantée au milieu de cette horde de débraillés en culottes courtes, la Môme Double-Shot, tombée dans cette galère par le plus grand des hasards narratif - c'est à dire en écrasant malencontreusement un gamin ivre mort.
Ça n'a rien de joyeux et ça ne s'améliore pas au fil des pages : Maxwell aborde sans prendre de gants des sujets comme la pédophilie et la délinquance juvénile puis, à la moitié du bouquin, abandonne carrément son héroïne pour se concentrer sur les profils désespérés de sa petite troupe de voyous. Le roman verse alors, de temps à autres, dans un misérabilisme plombé mais se rattrape toujours, quelques lignes plus loin, par des évocations poétiques inattendues et saisissantes, à l'image du fabuleux paragraphe final.

"...Une bribe de chair vivante arrachée à ces Babels vertigineuses et systématiques, illuminées telles des cathédrales et décomposées comme des sépulcres; ces bouts du monde où fleurissent à chaque pas les fleurs vénéneuses des désillusions, avant d'engendrer les fruits amers et pourris des renoncements universels..."
Jean Rollin considérait J'Veux Mon Blé comme le meilleur roman de George Maxwell - ça reste à voir. J'Veux Mon Blé est avant tout un George Maxwell atypique, à mille lieux de ses habituels délires déviants surexcités.
C'est aussi un Double-Shot presque entièrement délaissé par son héroïne et pâtissant néanmoins de cette filiation encombrante. Il est certain que l'auteur aurait été plus à l'aise sur un autre format que celui de sa série phare pour l'évocation de ses destins sordides.
Derrière le vernis sexy et hardboiled qui faisait sa réputation, il y a toujours eu chez George Maxwell quelque chose de plus profond, et qui ne fut jamais pleinement développé. Un peu comme si André Helena s'était contraint à produire uniquement du 180 pages pour la Flamme D'Or. Un beau gâchis ? Pas du tout.


Quant au coup du gosse des rues qui tourne mal, Maxwell le retentera trois ans plus tard - cette fois pour sa série Miss One-Shot, une version light de la Môme pour faire plaisir à des censeurs pas très friands de viandes sanguinolentes et de sexes moites.
L'intrigue des Houris et Des Mômes est approximativement la même que celle de J'Veux Mon Blé, minus la violence et le sexe. Bref, un traitement plus aseptisé. Pour continuer sur le parallèle avec André Helena, disons qu'il s'agit d'un Noël Vexin des petits jours. Ce qui, au demeurant et pour du George Maxwell, toujours très punchy et efficace, reste extrêmement lisible.
Pour le reste, on peut apprendre dans le premier chapitre que George Maxwell détestait le film Les Diaboliques et adorait les bouquins de William Irish. C'est dit.


C'EST POUR LE 15, BEVIS WINTER
LE TROTTEUR / ESPIONS ET AGENTS SECRETS, 1953

Je me rappelle plus trop de celui-ci. Pourtant, je l'ai lu il n'y a pas si longtemps, à peine deux ou trois semaines... Ce qui ne veut pas dire que ce fusse mauvais. Loin de moi cette idée ! Vite lu, vite oublié n'est pas du tout un gage de médiocrité. En fait, je me rappelle très bien du début, c'est les derniers chapitres qui me sont un peu nébuleux, quant tout part en sucettes d'espions avec le démantèlement d'un complot contre le président le jour du 4 juillet. Ou un truc dans le genre.
Bref, ça commençait plutôt bien, sans casser trop de briques. Comme le dit si bien l'éditeur en quatrième de couverture, Bevis Winter c'est "le nouveau Peter Cheney, qui est loin d'ennuyer son monde". Et ça commence comme du Peter Cheney sur roulette, en vitesse douce, sans ennuyer grand monde.
Notre héros, un journaliste miteux, retrouve son voisin de palier, un bon copain de boisson et accessoirement un agent super secret des USA, étendu dans sa chambre, raide-mort de mort pas naturelle. Du coup, notre journaliste, flairant le papier du tonnerre à refiler à son éditeur acariâtre (et aussi parce que c'est un citoyen américain plutôt modèle malgré un petit penchant pour l'onanisme cérébral), se décide à reprendre l'affaire en main. Un boulot consistant principalement à se faire allumer la tronche par des agents ruskoffs et prendre contact en loucedé avec des agents du FBI, le tout sans perdre une miette des rondeurs féminines que l'auteur fait généreusement défiler dans le décor.

"Ça me permettait de reprendre ma petite observation du relief de la mignonne... Je me serais bien offert un lolo ! Ça avait l'air ferme comme de la matière plastique, ces trucs-là, mais le nylon est assez transparent de nature, et je voyais bien que de la matière comme ça, c'était de la bonne bidoche frissonnante !"
Une bien belle observation, tout en minutie et délicatesse. Merci monsieur.

SEMAINE NOIRE # 5 : COUP DOUBLE & ONE-SHOT

COUP DOUBLE, COMMANDANT RENE
SOGEDIDE / ENQUETES, 1955

En 1954, après la défection pour cause de censure des éditions du Trotteur, apparaît la Sogedide et ses superbes couvertures-serrures, un drole d'éditeur aux publications mensuelles uniquement portées par deux auteurs antinomiques : George Maxwell, rescapé du pilonnage de ses môme double-shot trop hardcore pour l'époque, et Commandant René, un huluberlu sévissant dans le faux témoignage politico-romancé.
J'ai, pendant un petit moment (quelques minutes), observé une théorie comme quoi René et Maxwell auraient pu être le même homme. Mais c'était juste avant l'ouverture de Coup Double, mon tout premier Commandant René (et, de par mon dévouement masochiste au roman poubelle pour quai de gare, certainement pas mon dernier).

Pour faire vite : Coup Double est un mauvais roman d'espionnage aux enjeux moralistes ponctués de scènes érotiques en faisant le digne ancêtre des SAS et autres Brigade Mondaine de grand-père. Ça débute avec un prologue "naturaliste" sur la drogue et la prostitution. Comme tout le monde le sait, toutes les activités répréhensibles sont interdépendantes. Bref, Commandant René nous explique en détail le trafic de coco dans le paris chaud. En un mot : édifiant.
"Le mécanisme de la drogue est assez particulier. Il y a d'abord le drogué, ensuite, le premier revendeur puis le demi-grossiste et finalement le grossiste. Ce dernier se ravitaille à l'étranger généralement."
Et là, on passe aux choses sérieuses ! Jacques Millard, jeune assistant du Commandant très porté sur la bagatelle et narrateur suppléant pour ce volume, découvre que le marché de la drogue cache un plus gros poisson : le terrorisme international. Aucun pays ne sera cité par le Commandant mais mon petit doigt me conseille de regarder vers l'est - à moins que ce soit encore un coup des arabes, nos méchants habituels.
Millard prend alors le premier train pour Marseille, le pays de la pègre, des espions et des petites pépés pas farouches capables de faire l'amour plusieurs fois par chapitre, n'importe où, n'importe quand. Pour lui, c'est le pied.
Il s'infiltre alors dans l'entourage d'un caïd local et remonte lentement l'organisation, jusqu'à atteindre le niveau drogue et terrorisme. Entre temps, conscience professionnelle oblige, il s'offre aussi pas mal de bon temps avec ces petites garces de Murielle et Sonia.
"En une minute elle fut aussi nue qu'un ver et cette fois (il) ne put résister au désir de prendre cette femme. il se pencha et tomba littéralement sur elle (!!!).
Son corps fut accueilli par un autre corps affolé qui se mit à se lover sur le lit comme une pieuvre aux milles tentacules.
Dans un océan de félicité, les deux êtres montèrent ensembles vers les hauteurs suprêmes de l'étreinte.
Il la regardait maintenant se rhabiller, Si Murielle était une maîtresse femme, Sonia pouvait sans conteste
se vanter d'être dix fois supérieure."
Notez que notre homme est un rapide. Il remettra tout de même le couvert quelques paragraphes plus tard. Ça, c'est du zob. Quant à l'enquête, elle se conclura par un K.O. du lecteur et la mise en échec des méchants par la D.S.T., une organisation bien de chez nous.


COLT LÜGER ET BERETTA, GEORGE MAXWELL
C'EST VOUS LE TUEUR ?, GEORGE MAXWELL
SOGEDIDE / MISS ONE-SHOT, 1956

Pendant ce temps, dans la même collection et après un petit détour dans le registre de l'espionnage en folie (le Jaguar), ce vieux filou de George Maxwell reprend le chemin du hard-boiled sexy pur et dur avec une toute nouvelle héroïne, Miss One-Shot, la fille de la légendaire Môme Double-Shot, accompagnée de l'ancien acolyte de maman, le Gorille Charly.
Niveau continuité, j'ai un peu du mal à y croire. La dernière fois que j'ai lu du Môme, Hope Travers avait bien moins de trente ans et pas de gamine à charge. Mais c'est pas grave, c'est du Maxwell et la logique ne peut avoir aucune prise sur le génie de cet auteur.
A moins qu'il ne s'agisse d'une ruse un peu pataude pour faire revivre le succès de la Môme Double-Shot sans pour autant passer par la case interdiction de publication. Allez savoir. les années 50, c'est un peu le far-west de la littérature de gare...

Mais reprenons. Colt, Lüger et Beretta, 4eme volume des aventures de Miss One-Shot, débute de manière assez abrupte, avec une série de courses poursuites dont on ne comprend pas vraiment l'enjeu et surtout, la forte impression de débarquer en plein milieu d'une histoire dont les circonvolutions précédentes nous sont totalement inconnues. Et pourtant, aucun souci - c'est bien une nouvelle aventure chaotique de Hope, pardon, Pearl Travers, au prises, dans ce volume, avec ce gigantesque nid de vipères juridico-sentimental qu'est le monde du cinéma hollywoodien.
Au menu donc, des actrices qui se font chanter, des secrétaires qui tentent de percer via la promotion canapé, des producteurs qui magouillent, des scénaristes à la ramasse et du truand pour faire payer l'addition. Le tout sous la forme d'un mystère à l'ancienne avec explication et résolution en chapitre final. Car contrairement aux autres séries de George Maxwell, Miss One-Shot a des allures de whodunit bancal.

C'est cet aspect qui prévaut largement dans C'est Vous Le Tueur ? - un titre qui, pour une fois, ne trompe pas sur la marchandise puisqu'il est question d'assassinats dans un petit cirque miteux. Tombés par hasard sur ce spectacle, alors qu'il roulaient vers une autre aventure possiblement plus palpitante, Pearl et Charly décident de se la couler douce et d'élucider cette sombre affaire à la manière de Sherlock Holmes, les bastons et la bad-ass attitude en plus.
"Pas d'histoires maintenant. Le Beretta gicle tout seul dans ma griffe, et je croche tout de suite la détente pour soulager mon copain.
Un pruneau chacun dans les quilles des plus proches. Deux cris de douleur. Charly se défait du troisième. Un autre est à terre depuis un moment, écorniflé par la première bastos du Gorille. Un suivant s'est pris un marron sur le blair et gît également à plat ventre un peu plus loin, la frime en meringue.
- Arrière tous ! je tonne en tirant un coup en l'air, cette fois, ou parole d'One-Shot, je vous dequille l'un après l'autre."
Comme souvent chez Maxwell, le roman se déroule en une seule nuit. Un procédé qui d'habitude donne énormément de punch à sa narration. Et pourtant, ce C'est Vous le Tueur reste très calme dans ses largeurs, sans effusion de testostérone, avec juste une petite accélération à 30 pages de la fin avec l'habituelle course poursuite à 200 K/M suivie de sa fusillade dans le désert. Avant ça, c'est juste Pearl et Charly rodant autour du cirque avec le shérif local qui compte les macchabés et quelques individus douteux qui manigancent des sales coups dans leur coin.

Bref, le moins bon des Maxwell que j'ai pu lire - ce qui n'en fait pas pour autant un mauvais roman. C'est suffisamment pittoresque, envolé et rétro pour en faire une lecture extrêmement agréable. La description des numéros de cirque, bien qu'un petit peu longuette, est très amusante. Le reste, par contre, joue beaucoup plus la retenue. C'est du George Maxwell expurgé de ses délires transgressifs, des explosions gore et sexuelles, sans gros mots (juste une lettre suivie de trois petits point) ni ultra-violence. Du George Maxwell pour gosses.
Faites que la bibliothèque Verte les réédite au plus vite !

SEMAINE NOIRE # 2 : GEORGE MAXWELL DOUBLE SHOT

QUELQUES ROSES POUR LE TUEUR, GEORGE MAXWELL
UN PYJAMA DE SAPIN, GEORGE MAXWELL
1952, ÉDITIONS DU CONDOR

Le polar français du début des années 50, c'est un peu comme une vaste décharge aux trésors méconnus. A l'exception du très apprécié Leo Mallet, de l'inénarrable San Antonio et de quelques rééditions d'André Helena, toute la production noire de cette époque a sombré dans un oubli populaire et critique des plus profonds, nous laissant sur les bras quelques dizaines de publications mensuelles aux pages racornies par plus d'un demi-siècle de négligence et qu'il faut désormais dénicher à l'aveuglette dans des fonds d'étagères poussiéreuses - et cela, sans aucune certitude quant à la qualité intrinsèque de chaque ouvrage.

C'est approximativement dans ces conditions mêmes (c'est à dire à quatre pattes) que je me suis retrouvé nez à nez avec deux romans de George Maxwell, deux "Môme Double-Shot", sa première série d'aventures mêlant polar et espionnage, bien avant le Jaguar et Miss "One-Shot". Ce sont respectivement les numéros 8 et 9 de la collection aux Éditions du Condor, une des nombreuses façades du 5 rue des Moulin, éditeur coiffant la quasi-intégralité des publications de type pulp à la française du début des années 50. Une production au kilomètre, du roman de gare jetable et sans noblesse, brassant aussi bien du hardboiled type Série Noire en plus racoleur avec la collection Franco-Americaine des Éditions du Globe que les coquineries policières des Éditions du Fetiche aux titres si prometteurs, genre Drôle de Châssis ou T'as les Mains Qui S'égarent.
Et George Maxwell, donc, sévissant aux Éditions du Condor avec des faux romans américains soi-disant traduits par Richard Esposito, probablement son vrai nom. Après un petit tour de piste avec des histoires d'espions et d'agents secrets, genre en vogue dans les années d'après-guerre, il se lance dans le sérial, les aventures de la Mome "Double Shot", une blonde sulfureuse, faisant à la fois office d'agent du FBI et de free-lance de la gâchette. Violente comme un homme et séduisante comme une pin-up de magazine pour homme, n'hésitant jamais, entre deux whiskys, à sortir son Luger favori pour mettre de l'ordre dans des affaires bien nébuleuses. A moins qu'elle ne se dévêtisse pour satisfaire ses désirs de femme libre avec un amant occasionnel. Tout un programme.
"A ce moment, la porte s'ouvre. Je suis derrière le battant, mais, par le rais de la fente, je vois la souris de toute à l'heure armée d'un pétard trop gros pour sa main. Ces trucs-là, pour les manier, faut avoir l'habitude.
Je croche double la détente du Luger. Les pruneaux ricochent sur le métal. Le fourbi s'en va dinguer au diable. J'en profite pour claquer la lourde d'un coup de pied. Ça fait 'bang', et la tordue reste con.
- Pas d'histoire, bonne femme... on est ici en famille."
L'écriture de George Maxwell est nerveuse et sans fioriture, parfaitement rodée pour du 190 pages mensuel, délivré directement pour les relais de gare. Un style brutal, enrichi par de très nombreuses fautes d'impressions - des lettres manquantes ou des mots inversés qui rendent certaines phrases incompréhensibles. Le tout enrobe des histoires clichées, à la fois simplistes et étrangement alambiquées, un peu comme les films noir de Seiju Suzuki - mais sans les cassures narratives à la Nouvelle Vague. Juste du roman noir survolté, bourré à bloc de non-sens et de passages fou furieux en provenance directe du cerveau malade d'un fétichiste du baston et de la bagatelle.

Par exemple, Quelques Roses Pour Le Tueur, où un jeune boxer nommé Kid K-O, petit protège de la Môme, se retrouve empêtre dans des magouilles mafieuses l'empêchant de remporter son titre dûment mérité. Une trame classique, combinaison archi-usée de boxe et de truands, servie dans sa première moitié sur un rythme assez nonchalant pour du Maxwell avant de virer dans les trente dernières pages au règlement de compte sur-violent.
Et là, ça devient franchement hallucinant - surtout en considération de l'époque de production. George Maxwell s'y donne à coeur joie, tapant en plein dans le dérangeant, dans le cradingue proto-gore, avec ses têtes qui explosent dans des geysers de sang et ses tortures brutales accompagnées par des mutilations sexuelles pas très ragoûtantes
"Le museau noir du Luger vient cogner ses mâchoires. Elle fait un "o" énorme avec sa bouche. J'enfonce le tube dedans, tandis que de l'autre main je lui maintiens la tête en la tenant aux cheveux. Ses yeux s'agrandissent de terreur.
Le froid du canon ne doit pas être agréable sur sa langue. Je ressors l'arquebuse d'un coup sec. Le guidon de mire lui emporte deux dents au passage. Du sang dégouline sur son menton. Elle laisse échapper un hoquet de douleur en portant la main à sa bouche. Des larmes giclent par saccades.

Je la repousse et elle retombe en travers du lit. Je lui fourre l'énorme canon double entre les cuisses, et j'appuie fortement.

Son ventre fait un soubresaut terrible.
"
Wouh ! Et ce n'est rien comparé au volume suivant, Un Pyjama de Sapin, un incroyable roller-coaster tendance spy-fiction mais en bien plus dégénéré. D'ailleurs, George Maxwell en oubli carrément d'esquisser une intrigue. Même la Môme, balancée dans l'affaire en quelques lignes par son patron au FBI, n'obtient aucune explication des différents protagonistes - ce qui ne l'empêche pas outre mesure de tirer dans le tas... ou de se faire lacérer à deux reprises la poitrine par des nazi sortis d'on ne sait où. Rajoutons à ça une espionne anglaise à la limite du saphisme, un volume conséquent de maccabés, des courses poursuites à plus de 200 km/h et de la torture en pagaille.

L'ensemble est rapide et insensé. Que ce soit dans ses situations ou dans sa violence, tout dans la Môme "Double-Shot" tient du délire pornographique, c'est à dire complaisant et obscène dans sa narration jusqu'à atteindre un nihilisme grand-guignol où la morale et le bien ne constituent même plus des enjeux de second plan. Ils sont juste absents du cadre. Ici, seule l'image, la représentation d'un choc de perversions et d'interdits compte.
Du coup, on comprend facilement comment, deux années plus tard, la Môme "Double-Shot" et son éditeur fermèrent boutique en raison d'une censure pas très favorable.
Quant à en espérer une réédition, de nos jours...