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L'AUTRE PANTHÈRE

LA PANTHÈRE RIT JAUNE, PAUL BERG
LA PANTHÈRE SE REBIFFE, PAUL BERG
S.E.G. ESPIONNAGE # 99 & 73, 1966 / 1967

Les espionnes aiment à porter des noms d'animaux sauvages. C'est seyant, évocateur et plus distingué que les noms d'oiseaux.
Il y eu ainsi le Jaguar, la Louve et la Panthère.
Il y eu aussi la Panthère - bis repetita.
Il ne s'agit pas d'un effet d'écho. Il ne s'agit pas non plus du personnage phare de René Charvin. Cette Panthère-là, seconde du nom, officiait sous la plume de Paul Berg, un filou du populaire qui imitait San Antonio sous le pseudonyme de Colonel Ceruse et refourguait ses vieux textes de la SEG aux Presses Noires en modifiant les noms et nationalités de ses protagonistes.
Pas étonnant qu'avec un pareil pédigrée, il s'essaya aussi à la contre-façon d'héroïne
(...ou alors était-ce involontaire, le fruit conjugué du hasard et d'une méconnaissance totale du marché de l'espionnage sixties...)
Quoi qu'il en soit, Paul Berg conçu sa propre Panthère de papier, destinée à son propre usage personnel. Malheureusement, il se montra extrêmement maladroit dans sa réalisation et sa créature n'arriva jamais à imprimer son nom en dehors du titre de ses aventures.
Ainsi, dans La Panthère Rit Jaune (ennuyeux bouquin se déroulant à Macao), deux espionnes françaises, Lucie et Eva, se partagent l'affiche mais aucune ne se trouve surnommée "la Panthère" dans le texte.
Le lecteur louche entre les pages. Drôle d'impression. Paul Berg n'essaierait-il pas de nous refiler une camelote honteusement mensongère en plus d'être bassement roublarde ?
Cela semble bien être le cas. Mais passons l'éponge. Car si ce roman, en plus de l'absence nominative d'une panthère en titre, s'impose comme un assommant brouet, La Panthère Se Rebiffe, autre volume de la série, s'avère être une parodie de récit d'espionnage foutrement jubilatoire et atteint de par là même l'objectif ultime du roman de gare jetable : divertir et faire sourire.
A ce titre, l'échange de réplique des premiers chapitres, notamment entre l'agent Lussec et son supérieur Gustave Octave, peuvent faire office de modèle dans le genre décontracté et volontairement peu sérieux.
Quant à l'intrigue, il s'agit d'un empilement de prétextes aussi idiots que fallacieux permettant à l'auteur de démontrer sa grand pratique du roue libre en 200 feuillets légèrement imbibés.
Car dans La Panthère Se Rebiffe, gimmick ultime, les espions se contactent à l'aide de brosses à dents talkie-walkie.
Visiblement fort amusé par son gadget stupide, l'auteur, ce petit rigolo, en favorise l'utilisation outre mesure mais le lecteur que je suis ne viendra pas se plaindre de cet excès d'idiotie.
Je veux dire : Visualise toi en pleine rue, avec une brosse à dent dans la pogne, te donnant un air dégagé tout en discutant avec elle.
Visualise Alpha-Ville tourné au Moyent Orient, Godard dans le coltard et ses acteurs échangeant des répliques profondes en se colgatisant les ratiches.
Visualise ta salle de bain, avec des gros bras qui s'y bousculent le matricule pendant que tu prend soin de ton dentier en transmettant des informations confidentielles.
Le bonheur.
Et si il ne plonge jamais dans les abimes du comique outrancier (genre, mes trois phrases précédentes), La Panthère Se Rebiffe cultive dans ses 120 premières pages un esprit de saine dérision qui pourra étonner de la part de Paul Berg : c'est fin, c'est léger et ça fait rire.
La suite, par contre, se fait plus sérieuse : fusillade, fuite, torture et règlement de comptes. La ligne d'arrivée est en vue, il faut conclure. Viennent ainsi 60 pages clairement moins enthousiasmantes (la routine, ni plus ni moins) mais leur classicisme hâté (et légèrement bâclé) ne saurait en aucun cas ternir l'excellente surprise que constitue ce petit roman d'espionnage.
Je m'en vais donc reviser mon jugement concernant Paul Berg mais, avant cela récapitulons les choses pour le compte des lecteurs du type "tl;dr" :
La Panthère Rit Jaune = ultra-nul. La Panthère Se Rebiffe = tout bon.
Merci et à demain.