VOYAGE AU BOUT DU JOUR, BEHEMOTH
PATRICK SIRY / MANIAC # 3, 1988
Avant ce Behemoth, je n'avais jamais ouvert de Pascal Marignac.
Marignac, c'était Kââ en Spécial-Police et Corsélien en Gore. Et aussi, mais uniquement pour ce court one-shot horrifique sur le radeau éditorial de Patrick Siry, Behemoth.
Bref, Marignac, je ne le connaissais que de réputation et c'était plutôt vague. Excepté Brussolo qui en ré-édita quelques-uns au Masque, personne n'en parlait vraiment. L'auteur était (et reste) un trou noir dans la littérature contemporaine.
L'attestation est assez déprimante. Je n'ai rarement lu de bouquin aussi sidérant et efficace que ce Voyage Au Bout Du Jour. D'ailleurs, une fois terminé, j'ai passé le reste de mon après-midi à récupérer tout ce que je pouvais de Kââ/Corsélien en bacs à soldes de bouquinistes. Absence de notoriété aidant, ça me fit une sacrée belle pile à l'arrivée.
Mais reprenons. Voyage Au Bout Du Jour, comme tout les autres Maniac de Patrick Siry, je l'avais acheté pour la couverture de Gourdon. La pieuvre géante est un argument de vente non négligeable. Bon, passé le premier chapitre (saisissant), je me demandais comment Marignac/Behemoth allait s'y prendre pour nous foutre dans son roman noir, dans ce périple d'un cadre financier parti en Bretagne pour (dixit) se faire chier un maximum, des pieuvres géantes et, de surcroit - mais j'imagine que ça va de pair - meurtrières.
20 pages plus loin, il y arrive mais à ce moment là, on s'en tape un peu des pieuvres géantes meurtrières. Le point central, ce qui capte alors l'attention, c'est l'écriture, travaillée à l'extrême, presque alambiquée, et pourtant aussi limpide que le plus vulgaire des romans de gare. Bêtement, je pensais autant à Manchette qu'à Pierre Pelot lorsqu'il écrit des trucs désespérés à l'extrême façon Le Sourire Des Crabes - à moins qu'il ne s'agisse de certains G.-J. Arnaud, je ne sais pas trop...
La comparaison avec Manchette s'imposait par le style tordu employé par Marignac et les descriptions glaciales de personnages en proie à une folie dérisoire et étrangement drôle. Voyage Au Bout Du Jour, c'est tout d'abord de la misanthropie pincée, puis ça se transforme en un ricanement torve qui monte crescendo et brouille tous les enjeux. Rien à voir avec un Fleuve Noir habituel, avec du Gore, avec un récit fantastique quelconque, avec un pauvre néo-polar des années 80. C'est brusque et rapide, ridicule et furieux. On ne s'y attend pas. C'est un cadre financier pas très net qui se fait chier un maximum dans un coin paumé hanté par des pieuvres géantes dressées pour tuer. OK. Il y a des autochtones qui crèvent, des touristes sadiques, du sexe tentaculaire, beaucoup d'ennui et, petit à petit, le mec perd la boule. Ou quelque chose d'approchant... Et le texte se transforme à nouveau. Mais j'en dis possiblement un peu trop et c'est très con puisque, finalement, je n'ai rien d'autre à écrire que : "ce roman est génial, fou et constitue ma meilleure lecture de ces trois derniers mois."
Il faut parfois savoir être bref.
PATRICK SIRY / MANIAC # 3, 1988
Avant ce Behemoth, je n'avais jamais ouvert de Pascal Marignac.
Marignac, c'était Kââ en Spécial-Police et Corsélien en Gore. Et aussi, mais uniquement pour ce court one-shot horrifique sur le radeau éditorial de Patrick Siry, Behemoth.
Bref, Marignac, je ne le connaissais que de réputation et c'était plutôt vague. Excepté Brussolo qui en ré-édita quelques-uns au Masque, personne n'en parlait vraiment. L'auteur était (et reste) un trou noir dans la littérature contemporaine.
L'attestation est assez déprimante. Je n'ai rarement lu de bouquin aussi sidérant et efficace que ce Voyage Au Bout Du Jour. D'ailleurs, une fois terminé, j'ai passé le reste de mon après-midi à récupérer tout ce que je pouvais de Kââ/Corsélien en bacs à soldes de bouquinistes. Absence de notoriété aidant, ça me fit une sacrée belle pile à l'arrivée.
Mais reprenons. Voyage Au Bout Du Jour, comme tout les autres Maniac de Patrick Siry, je l'avais acheté pour la couverture de Gourdon. La pieuvre géante est un argument de vente non négligeable. Bon, passé le premier chapitre (saisissant), je me demandais comment Marignac/Behemoth allait s'y prendre pour nous foutre dans son roman noir, dans ce périple d'un cadre financier parti en Bretagne pour (dixit) se faire chier un maximum, des pieuvres géantes et, de surcroit - mais j'imagine que ça va de pair - meurtrières.
20 pages plus loin, il y arrive mais à ce moment là, on s'en tape un peu des pieuvres géantes meurtrières. Le point central, ce qui capte alors l'attention, c'est l'écriture, travaillée à l'extrême, presque alambiquée, et pourtant aussi limpide que le plus vulgaire des romans de gare. Bêtement, je pensais autant à Manchette qu'à Pierre Pelot lorsqu'il écrit des trucs désespérés à l'extrême façon Le Sourire Des Crabes - à moins qu'il ne s'agisse de certains G.-J. Arnaud, je ne sais pas trop...
La comparaison avec Manchette s'imposait par le style tordu employé par Marignac et les descriptions glaciales de personnages en proie à une folie dérisoire et étrangement drôle. Voyage Au Bout Du Jour, c'est tout d'abord de la misanthropie pincée, puis ça se transforme en un ricanement torve qui monte crescendo et brouille tous les enjeux. Rien à voir avec un Fleuve Noir habituel, avec du Gore, avec un récit fantastique quelconque, avec un pauvre néo-polar des années 80. C'est brusque et rapide, ridicule et furieux. On ne s'y attend pas. C'est un cadre financier pas très net qui se fait chier un maximum dans un coin paumé hanté par des pieuvres géantes dressées pour tuer. OK. Il y a des autochtones qui crèvent, des touristes sadiques, du sexe tentaculaire, beaucoup d'ennui et, petit à petit, le mec perd la boule. Ou quelque chose d'approchant... Et le texte se transforme à nouveau. Mais j'en dis possiblement un peu trop et c'est très con puisque, finalement, je n'ai rien d'autre à écrire que : "ce roman est génial, fou et constitue ma meilleure lecture de ces trois derniers mois."
Il faut parfois savoir être bref.
7 commentaires:
Pour une fois c'est pas "bien parce que c'est nul", on dirait du vrai enthousiasme! Attention y'a désormais 2 personnes sur terre qui cherchent du Marignac, mais t'as déjà pris de l'avance on dirait...
A octopus sucking a man´s eye is ever a real good cover!
Un livre autre, totalement à la masse. Dans les premiers chapitres j'y ai trouvé un peu de Sternberg (auteur malheureusement trop méconnu) et disons le tout net, une larme de Houellebecq (j'ai osé). Par la suite on s'oriente vers le B.R. Bruss de "L'Oeil était dans la tombe", le meilleur "angoisse " que j'ai jamais lu, à l'atmosphère ultra-glauque.
Merci pour avoir partagé ce coup de coeur, je suis heureux d'avoir découvert ce bouqin.
Edouard
tout à fait d'accord avec vos comparaisons, sauf pour le BR Bruss because, je ne l'ai pas lu !
(mais je prends note et le rajoute à ma liste... il existe une réédition en marabout, non ?)
Malheureusement non, et c'est bien là le problème, car j'ai moi-même été dépossédé de mon exemplaire, que j'avais acquis pour la sommes de 5FF il y a un peu plus de 15 ans. Déjà à l'époque c'était inespéré, mais aujourd'hui il faut compter débourser 50 € en moyenne pour la chose. J'ai dû me rabattre sur l'adaptation BD chez Hallucinations, mais je n'ai pas eu le courage de la lire.
Peut-on se tutoyer?
Edouard
ça craint pour ton BR Bruss...
par contre, pour le tutoiement, je réponds oui :)
(et je m'excuse, j'ai la sale habitude de vouvoyer à tout va !)
Sur que Kaa était un, hem, cas à part. Son habitude était de confirmer sa présence à des salons polar… et de ne jamais venir. Résultat, je n'ai jamais pu le rencontrer ni me faire signer un bouquin (j'ai quelques vieilleries…)
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