PARTICULE ZÉRO, MAURICE LIMAT
ICI FINIT LE MONDE, MAURICE LIMAT
FLEUVE NOIR ANTICIPATION # 252 & 257, 1964
Second mea-culpa de la semaine et, après l'espionnage, c'est au tour de Maurice Limat d'être revu à la hausse alors que je n'ai cessé de dire du mal de ses écrits depuis les débuts du Pulpbot.
Honte sur moi, puisque (chacun ses tares) j'aime beaucoup Maurice Limat. C'est même possiblement l'auteur Anticipation "vieille école" (ceux que Patrick Siry considérait ici-même comme "les franges, le bout du tapis") que j'apprécie le plus.
Alors, certes, Limat, c'est parfois, c'est même assez souvent, les franges. Le bout du tapis. Des romans tragiques de médiocrité avec les inévitables longueurs à s'en décrocher la mâchoire, les grosses ficelles, le style pompier, le décorum factice. Et aussi toutes les envolées fleur bleue, un tic que Limat hérita dans ses années passées à produire du Ferenczi pour gamines et qui, pour les Fleuve Noir d'Aventures Spatiales destinés aux jeunes hommes modernes, deviennent fraternités viriles et flirtent doucement avec les amitiés particulières.
Je ne saurais dire si cet homo-érotisme lattant fut œuvre involontaire. Par contre, pour ce qui est des éclats de rire que ces passages peuvent provoquer...
Dans le numéro 2 de la revue Univers, les Frères Tomasini (en fait Jean-Pierre Andrevon et cie. en mode camouflage critique) notaient "[Limat] ne se signale que par une écriture exécrable au point d'en être comique."
C'est cruel. Maurice Limat est un poète frustré, aux aspirations tenant autant d'un surréalisme à la petite semaine que de l'arrière-garde à la dignité stylistique crispée. Un mélange étrange, lourd, indigeste mais pas dénué d'intérêt.
Car Limat fait dans la SF baroque, dans la broderie d'images fantasques. On est parfois pas très loin d'un B.R. Bruss. Ses romans ne se résument parfois qu'à de longues évocations d'une faune et d'une flore extraterrestres bigarrées, comme mélangées en dépit du bon sens par un généticien fou. Il semblerait même que l'auteur préfère à l'action trépidante les interminables descriptions d'un bestiaire improbable, fait de Singes-Pingouins ou de Caïmans-Pangolins. Quant à son héros emblématique, le Chevalier Coqdor, une espèce de Bob Morane des étoiles, il est constamment accompagné de son fidèle Rax, un Bouledogue-Chauve-Souris.
Voila... je pensais bien faire mais je vous ai très certainement décidé à ne jamais ouvrir un Limat de votre vie. Vous avez probablement raison. Moi, je continue à les lire, inlassablement. D'ailleurs, les deux derniers en date étaient assez agréables. Surtout le premier, Particule Zéro, dans lequel Coqdor, assisté par les habituels Robin Muscat et le Docteur Stewe, fait face à des mécréants venus de la planète Algenib. Tiens, ce nom me rappelle quelque chose... Bref. Les Algenibiens ont entre leurs mains un dangereux artefact qui carbure à la particule Zéro, soit l'absence d'énergie faite énergie ou un truc du genre. Et que fait cette bande de saligauds mal élevés avec son gadget futuriste ? Eh bien, ils s'en servent pour switcher leurs ennemis du cours du temps comme si il s'agissait de vulgaires cassettes magnétiques coincées dans un gettoblaster en furie. Je vous rassure tout de même : à la fin, leur plan démoniaque (un truc bassement hégémonique) tombe à l'eau.
Bon, je me moque, je me moque, mais faut bien avouer que Particule Zero (malgré une montagne de défauts, cf. plus haut...) est un récit d'aventure spatio-fantastique de très bonne facture. C'est du roman populaire pour adolescents, approximativement aussi distrayant que Fréquence ZZ. Sur l'échelle du Maurice Limat, et même sur l'échelle des Anticipation années 60, c'est bien au dessus de la (triste) moyenne.
Par contre, ça se gate franchement avec Ici Finit Le Monde, mon second Limat du mois. Je viens tout juste de m'en rappeler les détails et, exception faite d'un titre qui flashe à mort, ce n'est pas très glorieux. Je parlais un peu plus haut de la sentimentalité envahissante dans les écrits de Maurice. Avec Ici Finit Le Monde, nous nageons en plein dedans.
Chose amusante, dans les dernières pages, un personnage déclare (approximativement) "nous ne sommes pas dans les courriers du cœur !"
Malheureusement (?), si.
ICI FINIT LE MONDE, MAURICE LIMAT
FLEUVE NOIR ANTICIPATION # 252 & 257, 1964
Second mea-culpa de la semaine et, après l'espionnage, c'est au tour de Maurice Limat d'être revu à la hausse alors que je n'ai cessé de dire du mal de ses écrits depuis les débuts du Pulpbot.
Honte sur moi, puisque (chacun ses tares) j'aime beaucoup Maurice Limat. C'est même possiblement l'auteur Anticipation "vieille école" (ceux que Patrick Siry considérait ici-même comme "les franges, le bout du tapis") que j'apprécie le plus.
Alors, certes, Limat, c'est parfois, c'est même assez souvent, les franges. Le bout du tapis. Des romans tragiques de médiocrité avec les inévitables longueurs à s'en décrocher la mâchoire, les grosses ficelles, le style pompier, le décorum factice. Et aussi toutes les envolées fleur bleue, un tic que Limat hérita dans ses années passées à produire du Ferenczi pour gamines et qui, pour les Fleuve Noir d'Aventures Spatiales destinés aux jeunes hommes modernes, deviennent fraternités viriles et flirtent doucement avec les amitiés particulières.
Je ne saurais dire si cet homo-érotisme lattant fut œuvre involontaire. Par contre, pour ce qui est des éclats de rire que ces passages peuvent provoquer...
Dans le numéro 2 de la revue Univers, les Frères Tomasini (en fait Jean-Pierre Andrevon et cie. en mode camouflage critique) notaient "[Limat] ne se signale que par une écriture exécrable au point d'en être comique."
C'est cruel. Maurice Limat est un poète frustré, aux aspirations tenant autant d'un surréalisme à la petite semaine que de l'arrière-garde à la dignité stylistique crispée. Un mélange étrange, lourd, indigeste mais pas dénué d'intérêt.
Car Limat fait dans la SF baroque, dans la broderie d'images fantasques. On est parfois pas très loin d'un B.R. Bruss. Ses romans ne se résument parfois qu'à de longues évocations d'une faune et d'une flore extraterrestres bigarrées, comme mélangées en dépit du bon sens par un généticien fou. Il semblerait même que l'auteur préfère à l'action trépidante les interminables descriptions d'un bestiaire improbable, fait de Singes-Pingouins ou de Caïmans-Pangolins. Quant à son héros emblématique, le Chevalier Coqdor, une espèce de Bob Morane des étoiles, il est constamment accompagné de son fidèle Rax, un Bouledogue-Chauve-Souris.
Voila... je pensais bien faire mais je vous ai très certainement décidé à ne jamais ouvrir un Limat de votre vie. Vous avez probablement raison. Moi, je continue à les lire, inlassablement. D'ailleurs, les deux derniers en date étaient assez agréables. Surtout le premier, Particule Zéro, dans lequel Coqdor, assisté par les habituels Robin Muscat et le Docteur Stewe, fait face à des mécréants venus de la planète Algenib. Tiens, ce nom me rappelle quelque chose... Bref. Les Algenibiens ont entre leurs mains un dangereux artefact qui carbure à la particule Zéro, soit l'absence d'énergie faite énergie ou un truc du genre. Et que fait cette bande de saligauds mal élevés avec son gadget futuriste ? Eh bien, ils s'en servent pour switcher leurs ennemis du cours du temps comme si il s'agissait de vulgaires cassettes magnétiques coincées dans un gettoblaster en furie. Je vous rassure tout de même : à la fin, leur plan démoniaque (un truc bassement hégémonique) tombe à l'eau.
Bon, je me moque, je me moque, mais faut bien avouer que Particule Zero (malgré une montagne de défauts, cf. plus haut...) est un récit d'aventure spatio-fantastique de très bonne facture. C'est du roman populaire pour adolescents, approximativement aussi distrayant que Fréquence ZZ. Sur l'échelle du Maurice Limat, et même sur l'échelle des Anticipation années 60, c'est bien au dessus de la (triste) moyenne.
Par contre, ça se gate franchement avec Ici Finit Le Monde, mon second Limat du mois. Je viens tout juste de m'en rappeler les détails et, exception faite d'un titre qui flashe à mort, ce n'est pas très glorieux. Je parlais un peu plus haut de la sentimentalité envahissante dans les écrits de Maurice. Avec Ici Finit Le Monde, nous nageons en plein dedans.
Chose amusante, dans les dernières pages, un personnage déclare (approximativement) "nous ne sommes pas dans les courriers du cœur !"
Malheureusement (?), si.
4 commentaires:
j'aime aussi beaucoup le limat d'Angoisse, avec souvent des histoires bien ficelées et une atmosphère assez unique.
malheureusement, je n'ai lu qu'un seul Limat en Angoisse, Mephista Et Le Chien Hurlamort et c'était très mauvais.
Mais j'imagine que ceux publiés pendant la période "château + crâne" sont meilleurs...
De Limat, je ne connais hélas que les franges, le bout du tapis, la zone sous laquelle on enterre la poussière... Mon premier Limat fut justement l'atroce Méphista et le chien Hurlamor, l'un des pires Angoisse de la création, dont le premier chapitre a l'insigne mérite d'être narré par le fameux chien ce qui nous donne de grands moments de délire du genre "je me sens parcouru par des ondes que je ne connais pas. C'est un peu comme lorsqu'on est sur la piste, qu'on sent le gibier. (...) Mieux que cela. Lorsque je sens passer l'appel du rut." Que voilà un chien intelligent.
Plusieurs tentatives plus tard (L'Aquarium de sang, Ici le bourreau)et j'en suis venu à croire que Limat était un auteur d'histoires à l'eau de rose, de romans sentimentaux qui se serait reconverti tardivement dans la série Angoisse.
Je n'ose imaginer ce que peuvent donner ses Anticipations.
Ah-la-la, oui, ce premier chapitre du Chien Hurlamort, c'est vraiment quelque chose !
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