Quoi de plus approprié pour rythmer les exploits d'agents secrets qu'une poignée de 33 tours easy-listening des années 60 ? T’avouera, ça tombe sous le sens. Exotica touristique, ritournelles pop et tonnerre brass-bandesque, on tient là l’intégralité des poncifs du genre catapultés sur disque microsillon. Et go, James, go !
Bongo qui cavalent, percussions qui cascadent, trompettes qui s’emballent et orgues hammond qui déraillent, en ping-pong dans les enceintes et dans tes esgourdes. Demandez le programme. Toute l'artillerie d'une stéréophonie rudimentaire qui éclate en une grande gerbe multicolore - tacatac, badaboum, tudu-dam-doum ! - et passe du jazz au jerk en un twist sauvage - brak-a-bam tam-tam.
L'idée de cette sélection ?
Disons qu'au fil des brocantes, le nez plongé dans des cartons fleurant bon le garage à grand-père, la moisissure et le salpêtre, 1 euro la pièce et on te fait un prix si t'en prends plein, l'accumulation de ces reliques phonographiques de la soirée cocktail sixties est devenu pour le gars mézigue une véritable addiction.
Super Stereo Sound, Perfect Presence Stereo, Mode Disque Stereo, Command
Records Stereo, Phase 4 Stereo, Truc Muche Stereo, Bidule Chouette du
même acabit et mort à la mono... tonie !
Bien entendu, je ne gagne pas à tous les coups. Ma pomme accumule aussi les déconfitures. Combien ai-je pu en dégauchir, de ces 33/45/78 tours aux pochettes magnifiques, pour finalement me retrouver avec, sur les bras, une compilation des exploits accordeonisé, trompettisé ou bien encore orgue-hammonisé d'un émule d'Aimable, d'André (Verchuren) ou de Klaus (Wunderlich) ? Judokadanse, MFP et les Surprises parties du Pingouin, c'est à vous que je pense. Et je ne vous remercie pas !
Mais ce n'est pas grave, on continue.
C'est l'interminable quête du vinyle ultime qui, entre deux guimauveries à vomir, cache sa pépite tropicale, son surf détonant, son standard swing massacré par quelque adepte de la surboum au trinitrotoluène. Ou bien encore sa polka endiablée, entonnée par l'amicale des copains du comptoir, section clair de lune à Maubeuge et casatchok du coude levé. Coin, coin. Faut savoir être éclectique, dans la vie.
Mais je m'égare.
Alors concluons.
Cette sélection, elle s'appelle Stereophony for Spies. C'est le volume 1. Ça dure 38 minutes et 41 secondes.
D'abord, il y a les bruits d'un train qui proviennent d'un disque de démonstration stéréophonique Phase 4. Puis il y a le grand Enoch Light sur l'une de ses rares compositions personnelles. Et ça enchaîne. Un xylophone qui tintinnabule sur une cadence twist. Un cha-cha-cha à l'efficacité certifiée garantie sur ma tête de lecture. Une version du classique Misirlou, entre latinerie suave et jazz de strip-teaseuse. Un brass turquisant et inventif. Une reprise de Our Man Flint soutenue par une cow-bell du plus bel effet. Eleanor Rigby des Beatles retourné à la sauce espionnite John Barryesque, trompettes Herb Alpertisantes incluses. L'orgue hammond du virtuose Jimmy Smith et les arrangements de Lalo Schifrin pour jerker jusqu'à en crever (ses godasses). Reprise de souffle avec un drôle de swing horrifique par le compositeur de Sinatra et d'Yma Sumac. Ensuite, un interlude pompier. Exclusif : Le producteur des Beatles en vadrouille chez les allemands de telefunken. Encore une fois : trompettes Herb Alpertisantes incluses. Réponse de Bob Crewe : martèlement barbarellesque, barouf distordu, roulements à gogo, morceau de bravoure. Ça te laisse sur le carreau. Ding, dang, dong. Départ à destination de Londres et New-York, vol L.A. 231, horaire 13 h 55. Vive Air-France et gros coup de cœur : You'll never get my lovin'. Sugar-pop psychédélique, vocaux féminins groovy et Ray "funky trumpet" qui pouet-pouet en personne. Après ça, on est loin : le moog de Claude Denjean se déchaîne sur les portes du pénitencier cosmique. Zoum, zooum, vooouumm. Bruits bizarres. En fait, les mêmes bruits de train qu'au début, mais inversés (vive les platines qui tournent en verlan !). Et "bye bye", disent les percussions, flûtes et clochettes d'Hal Mooney. Fondu au noir. Cut to : Générique de fin.
Vous venez d’assister à OPÉRATION EASY-LISTENING. Une production Müller-Fokker, avec D.J. Résidu dans le rôle du mec qui passe les galettes de cire. Merci au Révérend Dolby Surround pour son assistance à la technique. Merci à la région Bruxelles capitale et au marché aux puces des Marolles pour le stock de vieux disques. Merci à la bière Gluck pour l'inspiration. Bande originale disponible en téléchargement sur soundcloud et en écoute sur mixcloud.
La suite au prochain épisode.
- STEREOPHONY FOR SPIES TRACKLISTING (album, record company, date) -
Enoch Light - Provocative Percussion (Provocative Percussion vol. 3, Command Records, 1961)
Skip Martin - Night Train To New Orleans (Surprise Partie Stéréo-Percussion vol.1, Vogue, 1961)
Mike Simpson - Three Little Words (Discussion in Percussion, Mercury, 1961)
Ted Heath and Edmundo Ros - Misirlou (Swing vs. Latin, Phase 4, 1964)
L. Becker and R. Byrne - Istambul (More Persuasive Percussion, Command Records, 1966)
The Roland Shaw Orchestra - Our Man Flint (Themes for Secrets Agents, Phase 4, 1966)
Warren Kime - Eleanor Rigby (Brass Impact, Command Records, 1967)
Jimmy Smith - The Cat (The Cat, Verve, 1964)
Billy May - Return Of The Zombie (Big Fat Brass, Regal / EMI, 1958)
George Martin - Poker Face (Percussion Panorama, Metronome, 1969)
The Bob Crewe Generation - The Black Queen’s Beads (Barbarella OST, Dynovoice, 1968)
The Button Down Brass - You're Never Gonna Get My Lovin' (The Button Down Brass featuring the Funky Trumpet of Ray Davies, Fontana, 1968)
Claude Denjean - House of the rising sun (Moog!, Phase 4, 1971)
Hal Mooney - Bye Bye Blues (Woodwinds and Percussion, Mercury, 1961)
8 commentaires:
Sélection très bath!! Merci pour le partage!
Très sympa la compil'. Merci pour le partage. ;-)
C'est... les craquements d'un vinyle au début... Des années que je n'avais plus entendu ce bruit ! Dingue.
Merci.
Yeahhh.
Et une petite version d'Istanbul par Dario Moreno:
http://www.youtube.com/watch?v=BeIOAnRe87k
Beau travail !
Belle initiative, D.J. Robo32! Associer les sons et la lecture, que demander de plus? Comme quoi, renifler de bon matin des cartons poussiéreux et moisis peut avoir du bon! Ta compil' est libre de droits, bien sûr?
Exactement. Copyleft et tout le tremblement !
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