LE DIEU TRUQUE, PIERRE SURAGNE
FLEUVE NOIR ANTICIPATION # 625, 1974
Voila Pierre Suragne qui nous refait le coup du gentil sauvage au mode de vie anéanti par l'apparition du méchant civilisé venu des étoiles. C'était déjà la base de son tout premier anticipation, le maladroit mais attachant La Septième Saison (FNA#505), et comme si cela ne suffisait pas, il remettra le couvert juste après ce volume, avec Ballade Pour Presque Un Homme (FNA#633) - un de mes Suragne favori tout de même.
Mais ici, il ne s'agit ni d'une conquête spatiale qui tourne court ni d'un safari recréatoire en relecture masquée de Niourk. Le Dieu Truqué fait plutôt dans la farce morale tendance Hara-kiri. A l'époque, Yves Fremion aurait parlé de Speculative Fiction - soit un mélange de SF satirique et de chronique anthro-politique, le tout mâtiné d'explosion cérébrale par l'intermédiaire de methylenedioxymethamphetamine narrative.
Exception faite de la troisième donnée (ma favorite), ça résume assez bien le Dieu Truqué.
Valentin Dupondt - aucune faute de frappe de ma part - est un français moyen, comme tout auteur de gauche pourrait se l'imaginer dans les années 70. Un vieux décrépi et réactionnaire, qui passe sa retraite dans un bistro après une vie de travaux administratifs ennuyeux et un interlude occupation nébuleux. Jusqu'au soir où, après sa cuite habituelle, il se retrouve transporté comme par magie sur un plan spacio-temporel méconnu - un monde semblable à l'éden et où vivent dans l'innocence la plus totale des humanoïdes aux pouvoirs extra-sensoriels. Et ces derniers prennent ce bon vieux Dupondt, tout juste débarqué des étoiles dans son rutilant pyjama vert moisi, pour le Dieu annoncé par les prophéties. Pas vraiment des lumières, les mecs. Du coup, Valentin se décide à les civiliser à sa manière.
Vous imaginez la suite...
Bref, un roman un peu facile, pas forcement palpitant mais entièrement sauvé par l'écriture sauvage et poétique de Suragne - un style qui, à l'époque, tranchait radicalement avec le reste de la production Anticipation. Voire même, excepté Daniel Walther dans ses limbes éditoriales et le cercle Doremieux chez Opta, avec l'ensemble de la production hexagonale de genre.
(Je reviendrais la dessus une autre fois, quand j'aurais relu Le Sourire Des Crabes par exemple...)
Reste une chute, une promesse de western déglingué, qui, si elle se montre assez prévisible, n'en est pas moins très amusante. Chez Suragne, ça n'est pas toujours donné.
ORAGE MAGNETIQUE, JEAN-PIERRE GAREN
FLEUVE NOIR ANTICIPATION # 703, 1976
Continuons dans le registre du sauvage tout nu tout chevelu avec cet Orage Magnétique au titre... uhm... pas très inspiré. L'orage magnétique du-dit ouvrage, c'est juste les 3 premiers chapitres (pas très passionnants mais faut bien commencer quelque part). Après, on passe aux choses sérieuses avec de l'action, de l'aventure, de l'amour et des coups fourrés.
Mais reprenons. Orage Magnétique, c'est le deuxième Jean Pierre Garen en Anticipation après un confortable sejour en Special Police à la fin des années 60. Probablement une mutation professionnelle - à l'époque, Anticipation tentait de renouveler un cheptel plutôt moribond en puisant sans trop y regarder (merci Piret, Murcie et consorts) dans les autres collections du Fleuve.
Force est d'admettre que ça a plutôt réussi à Garen puisqu'il fait désormais parti, aux cotés de Gilles Thomas et de Serge Brussolo, des auteurs modernes du Fleuve les plus cotés sur les sites d'enchères et chez les bouquinistes. Allez comprendre...
Car dans l'ensemble, un ouvrage de Garen, ça ressemble à s'y méprendre à du Jan de Fast. C'est le même ton à la fois détaché et nerveux, la même écriture discrète, les mêmes thématiques pacifiques exploitées sous la forme d'aventures spatiales aux relents de nostalgie fifties. Il ne manque plus que le docteur Alan pour que le tableau soit complet.
Pour le reste, c'est l'équipage d'un astronef qui se pose sur une planète primitive façon Jack Vance où des seigneurs féodaux pas très sympathiques règnent cruellement sur une population de sauvages télépathes. Du coup, nos héros s'improvisent, libèrent la population du joug des mécréants et finalement, renversent un vieux cliché en décidant de devenir sédentaires sur la planète des sauvages au lieu de regagner leurs petites vies de civilisés.
Comme toute le monde le sait, d'habitude, c'est la princesse extraterrestre qui suit l'aventurier spatial pour devenir femme au foyer dans une station gravitationnelle de troisième zone pendant que monsieur furète ailleurs.
A part ça, rien de plus. Du bon Fleuve seventies, gentiment distrayant et gentiment progressiste. Tout comme Jan De Fast, en quelque sorte.
* * *
...Excusez-moi, je m'étais endormis sur quelques fragments de .txt disséminés de-ci de-là dans l'absence d'agencement de mon bureau windows. Du coup, tout un mois sans aucun nouveau post - je m'en excuse auprès de l'excellent Losfeld et des quelques autres lecteurs potentiels (ou futurs – j'aime bien anticiper). Merci :)
FLEUVE NOIR ANTICIPATION # 625, 1974
Voila Pierre Suragne qui nous refait le coup du gentil sauvage au mode de vie anéanti par l'apparition du méchant civilisé venu des étoiles. C'était déjà la base de son tout premier anticipation, le maladroit mais attachant La Septième Saison (FNA#505), et comme si cela ne suffisait pas, il remettra le couvert juste après ce volume, avec Ballade Pour Presque Un Homme (FNA#633) - un de mes Suragne favori tout de même.
Mais ici, il ne s'agit ni d'une conquête spatiale qui tourne court ni d'un safari recréatoire en relecture masquée de Niourk. Le Dieu Truqué fait plutôt dans la farce morale tendance Hara-kiri. A l'époque, Yves Fremion aurait parlé de Speculative Fiction - soit un mélange de SF satirique et de chronique anthro-politique, le tout mâtiné d'explosion cérébrale par l'intermédiaire de methylenedioxymethamphetamine narrative.
Exception faite de la troisième donnée (ma favorite), ça résume assez bien le Dieu Truqué.
Valentin Dupondt - aucune faute de frappe de ma part - est un français moyen, comme tout auteur de gauche pourrait se l'imaginer dans les années 70. Un vieux décrépi et réactionnaire, qui passe sa retraite dans un bistro après une vie de travaux administratifs ennuyeux et un interlude occupation nébuleux. Jusqu'au soir où, après sa cuite habituelle, il se retrouve transporté comme par magie sur un plan spacio-temporel méconnu - un monde semblable à l'éden et où vivent dans l'innocence la plus totale des humanoïdes aux pouvoirs extra-sensoriels. Et ces derniers prennent ce bon vieux Dupondt, tout juste débarqué des étoiles dans son rutilant pyjama vert moisi, pour le Dieu annoncé par les prophéties. Pas vraiment des lumières, les mecs. Du coup, Valentin se décide à les civiliser à sa manière.
Vous imaginez la suite...
Bref, un roman un peu facile, pas forcement palpitant mais entièrement sauvé par l'écriture sauvage et poétique de Suragne - un style qui, à l'époque, tranchait radicalement avec le reste de la production Anticipation. Voire même, excepté Daniel Walther dans ses limbes éditoriales et le cercle Doremieux chez Opta, avec l'ensemble de la production hexagonale de genre.
(Je reviendrais la dessus une autre fois, quand j'aurais relu Le Sourire Des Crabes par exemple...)
Reste une chute, une promesse de western déglingué, qui, si elle se montre assez prévisible, n'en est pas moins très amusante. Chez Suragne, ça n'est pas toujours donné.
ORAGE MAGNETIQUE, JEAN-PIERRE GAREN
FLEUVE NOIR ANTICIPATION # 703, 1976
Continuons dans le registre du sauvage tout nu tout chevelu avec cet Orage Magnétique au titre... uhm... pas très inspiré. L'orage magnétique du-dit ouvrage, c'est juste les 3 premiers chapitres (pas très passionnants mais faut bien commencer quelque part). Après, on passe aux choses sérieuses avec de l'action, de l'aventure, de l'amour et des coups fourrés.
Mais reprenons. Orage Magnétique, c'est le deuxième Jean Pierre Garen en Anticipation après un confortable sejour en Special Police à la fin des années 60. Probablement une mutation professionnelle - à l'époque, Anticipation tentait de renouveler un cheptel plutôt moribond en puisant sans trop y regarder (merci Piret, Murcie et consorts) dans les autres collections du Fleuve.
Force est d'admettre que ça a plutôt réussi à Garen puisqu'il fait désormais parti, aux cotés de Gilles Thomas et de Serge Brussolo, des auteurs modernes du Fleuve les plus cotés sur les sites d'enchères et chez les bouquinistes. Allez comprendre...
Car dans l'ensemble, un ouvrage de Garen, ça ressemble à s'y méprendre à du Jan de Fast. C'est le même ton à la fois détaché et nerveux, la même écriture discrète, les mêmes thématiques pacifiques exploitées sous la forme d'aventures spatiales aux relents de nostalgie fifties. Il ne manque plus que le docteur Alan pour que le tableau soit complet.
Pour le reste, c'est l'équipage d'un astronef qui se pose sur une planète primitive façon Jack Vance où des seigneurs féodaux pas très sympathiques règnent cruellement sur une population de sauvages télépathes. Du coup, nos héros s'improvisent, libèrent la population du joug des mécréants et finalement, renversent un vieux cliché en décidant de devenir sédentaires sur la planète des sauvages au lieu de regagner leurs petites vies de civilisés.
Comme toute le monde le sait, d'habitude, c'est la princesse extraterrestre qui suit l'aventurier spatial pour devenir femme au foyer dans une station gravitationnelle de troisième zone pendant que monsieur furète ailleurs.
A part ça, rien de plus. Du bon Fleuve seventies, gentiment distrayant et gentiment progressiste. Tout comme Jan De Fast, en quelque sorte.
* * *
...Excusez-moi, je m'étais endormis sur quelques fragments de .txt disséminés de-ci de-là dans l'absence d'agencement de mon bureau windows. Du coup, tout un mois sans aucun nouveau post - je m'en excuse auprès de l'excellent Losfeld et des quelques autres lecteurs potentiels (ou futurs – j'aime bien anticiper). Merci :)
7 commentaires:
Nice come back! ce Dieu truqué me tente bien. mes connaissances en SF frolent le néant, c'est toujours bon d'avoir des pistes, merci.
A peu près tout Suragne vaut le coup. Le Dieu Truqué est très sympa mais assez anecdotique comparé au reste de sa production fleuve noir de l'époque...
je reviendrais là dessus prochainement, je pense.
rien à voir avec suragne, mais autre grand auteure du fleuve des 70's : julia verlanger/gilles thomas...le cycle de l'autoroute est magistral!
en effet.
rien a jeter chez Julia. même ses trucs science-fantasy un peu bateau sont extrêmement agréables à lire. et puis, on comprend d'où peut venir une partie de l'inspiration de Serge Brussolo, période Fleuve Noir.
Accessoirement, les inconditionnels de Gilles Thomas peuvent tenter les Thomas Geha parus en Rivière Blanche ("A comme Alone" et sa suite). C'est ouvertement du à la manière de" par un fan et plutôt réussi.
C'est ce que j'ai pu lire. Mais je ne sais si j'accrocherai... Je n'ai jamais su apprécier la fan-fic...
Suragne a aussi écrit quelques Angoisse, en particulier Je suis la brume, à l'intrigue assez similaire à celle de Un Froid mortel de Brutsche.
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