MACHO D'APOCALYPSE

LE CRI DE L'EPERVIER, JERRY AHERN
PLON / LE SURVIVANT # 4, 1985

L'apocalypse, la chute des bombes, la fin du monde et tout le tremblement, c'est, tu me l'accordera, pas un truc de mauviette. Faut se la défoncer niveau musculature pour survivre. Les luneteux, les nabots, les féministes, paf, rayés de la carte. Place à l'homme, le vrai, celui qui non seulement assure comme une bête avec ses flingots et ses explosifs mais qui est aussi capable de résister sans verser une goute de sueur aux radiations super-mortelles de la nature en mutation et aux assauts répétées des bandes organisés d'anciens chômeurs et de repris de justice hantant les autostrades en friches et les cités en ruine du monde de demain.
Les punk-warriors, comme on dit dans le Survivant. Ça sonne mieux, ça donne le ton. On imagine les gros piercing et les iroquoises rougeoyantes, peut être de la brillantine à gogo pour les plus retro, frusques en cuir, tronches difformes, chaines et picots pour faire bonne mesure. On imagine de bons vieux clichés. Ce n'est pas une critique.
Figures éculées et schémas stéréotypés représentent l'essence même des divertissements post-apocalyptiques. Sans eux, ce ne serait plus pareil. Ce serait chiant.

Heureusement, La série Le Survivant - ou plutôt Le Cri De L'Épervier, tout premier épisode que je lis - répond en tout point à la banalité inhérente du genre et affiche fièrement ses couleurs dès la première page.
"Les states n'étaient plus qu'un vaste désert nucléaire. L'Arizona était une ile entourée d'eaux rugissante. La Californie avait sombré dans le Pacifique, provoquant des tremblements de terre jusqu'en Alaska. L'invasion soviétique progressait malgré une résistance organisée par le nouveau président Samuel Chambers. Ce qui restait de terre épargnée par les radiations et les cataclysmes était en majeure partie contrôlé par les hordes de punk warriors et autres motards de l'enfer. Les réfugiés qui fuyaient les cités détruites étaient impitoyablement pillés et massacrés."
Et dans ce vaste désert nucléaire, John Rourke, ancien de la CIA et one-man-army surarmé, John Rourke, contretype parfait du héros viril, défenseur des opprimés et Zorro post-catostrophiste, John Rourke, donc, se farci à tour de bras du méchant Russkoff, du punk warrior débile et de la poulette sympa (car peu frileuse) tout en recherchant vaguement sa femme et ses deux gosses (probablement perdus dans les Rocheuses) et en assistant de temps à autre le gouvernement américain dans son effort de reconstruction.
Bref, rien de nouveau sous le soleil. Le territoire est ultra-balisé.
Le Survivant, c'est de la romance bien burnée
et calibré au millimètre par un vieux routard du genre, Jerry Ahern, aussi connu sous le pseudo d'Alex Kilgore, dinguo-fou d'armes à feu, fanatique des techniques survivalistes et désormais président de la fabrique de flingues américains Detonics USA - ce qui tombe sous le sens vu que son héros, John Rourke, ne se dépare jamais de ses deux .45 Detonics Combat Master.
Rajoutons un FM SG 543, un Python Magnum 357, divers explosifs, une moto, un couteau et plein de cigarillos et l'on se fait une relativement bonne idée de la série.
C'est du gun-porn post-apocalyptique agréablement troussé, qui ménage son suspense et ses effets sans rechercher les fioritures. Page 131, l'auteur fait même striduler mon compteur Geiger-Müller avec une phrase imparable : "Le signal rouge action clignota dans son crâne en même temps qu'un flot d'adrénaline se ruait dans ses veines."

Néanmoins, si le héros, ce baroudeur implacable typique de la littérature pour mecs, est sans surprise, les personnages secondaires sont bien campés, évitent un certain manichéisme (non, les russes ne sont pas tous des salauds !) et permettent un renouvellement constant des péripéties.
Mention spéciale aussi pour la traduction/adaptation de Frédéric Lasaygues qui argotise comme un grand (ça donne du punch au texte) et n'oublie jamais que clope, au même titre que chiotte et baston, est à l'origine un mot masculin. Ce sont des détails mais dans Le Cri De L'Épervier, les détails sont nombreux. Mis bout à bout, ils assurent à l'ensemble un bon niveau de qualité.
Dans le genre littérature virile bas du front, c'est donc du totalement recommandable. Simple et efficace.

Reste à espérer que la suite soit d'aussi bonne facture...

4 commentaires:

losfeld a dit…

c'est très stridulant en effet, j'ai lu celui-là y'a quelque temps avec un clope et une 16 bien fraiche, c'était bien

ROBO32.EXE a dit…

toi, t'es un vrai mec.

ROBO32.EXE a dit…

en fait, après réflexion, un vrai mec aurait bu sa 16 bien tiède.

DrBis a dit…

C'est une nouvelle façon de pratiquer l'ascèse…