CRIME AU BOIS DE LA CAMBRE, ROGER D'ARJAC
COLLECTION LE VAMPIRE # 4, 1941
Roger Henri Jacquart, plus connu sous le pseudonyme quasi-transparent de Roger D'Arjac, n'est pas un auteur belge comme les autres.
Architecte le jour, il investissait son temps libre dans la rédaction de récits à faire frémir la populace et se révélait être, par le biais de sa série Démonios, un émule appliqué bien qu'un peu balourd du mythique duo Souvestre et Allain.
Dans le contexte du roman policier belge de l'époque, centré autours de la personnalité de Stanislas-André Steeman et ancré dans un carcan d'énigmes soignées et minutieuses, l'œuvre de Roger D'Arjac ne passa donc pas inaperçue.
Avec ses intrigues calibrées pour les esprits crédules et son écriture aussi rudimentaire qu'agitée, il fut largement raillé par ses pairs mais cela ne l'empêcha pas de persévérer dans le populaire frénétique et de nous livrer, au mitan de sa production, cette perle adorablement aberrante qu'est Crime Au Bois De La Cambre.
Le roman s'ouvre sur la figure éculée (mais efficace) du cri qui déchire la nuit.
Un policier se précipite dans la direction du-dit hurlement et découvre alors un cadavre emprisonné sous une couche de glace et dont la tête aurait été arrachée par une explosion.
Dépêchés sur le lieu du crime, les enquêteurs officiels concluent, après maintes tergiversations, qu'il s'agit là d'un suicide par introduction d'une cartouche de dynamite dans la bouche.
"Il avait peur de se rater," explique le chef de la police judiciaire.
Le lecteur, qui vient d'encaisser dix pages d'explications scrupuleuses sur le pourquoi du comment de ce suicide impossible, se demande si il lit bien droit.
D'Arjac, par contre, garde son sérieux.
Son héros, Luc Mahor, sorte de Jerôme Fandor bruxellois, va bientôt entrer en scène et pour ce dernier, aucun doute ne subsiste, ce mystère est l'œuvre de Démonios, DÉMONIOS ! LE GÉNIE DU MAL !
Un ombre qui rode dans la nuit, de nouveaux cris qui déchirent le silence et un poignard tibétain enduit d'un poison qui rend fou... on se croirait presque chez Leon Sazie ou H.J. Magog.
Malheureusement, les personnages (en dehors de nos héros et enqueteurs) ne sont que de simples ébauches sans profondeur, sans traits de caractère précis et sans mobiles valables. Du coup, la ronde des suspects et l'identité des coupables, intérêt primordial des romans d'énigme et autres mystères criminels, tourne court. Il n'y a pas d'implication.
Si les apparences sont superflues, le jeu devient superficiel.
Reste néanmoins une pièce de choix : Démonios, et sa silhouette "tragique," "angoissante," énigmatique." Démonios, le visage encagoulé sous un "cylindre flou," fomentant d'improbables plans de domination du monde dans un abri de jardin secret et ridiculisant, par ses actes et ses paroles, une société bourgeoise sans gloire ni honneur véritable.
Ainsi, trahi par un certain manque d'ambition et assujetti au style Le Jury, il rate sa cible de loin, de très loin, mais retombe sur ses pattes en assurant un spectacle plus qu'amusant, car plein d'une folie contrôlée et imprégné de cette poésie du non-sens et de l'absurde qui caractérise si bien la littérature populaire sans peur et sans reproche.
COLLECTION LE VAMPIRE # 4, 1941
Roger Henri Jacquart, plus connu sous le pseudonyme quasi-transparent de Roger D'Arjac, n'est pas un auteur belge comme les autres.
Architecte le jour, il investissait son temps libre dans la rédaction de récits à faire frémir la populace et se révélait être, par le biais de sa série Démonios, un émule appliqué bien qu'un peu balourd du mythique duo Souvestre et Allain.
Dans le contexte du roman policier belge de l'époque, centré autours de la personnalité de Stanislas-André Steeman et ancré dans un carcan d'énigmes soignées et minutieuses, l'œuvre de Roger D'Arjac ne passa donc pas inaperçue.
Avec ses intrigues calibrées pour les esprits crédules et son écriture aussi rudimentaire qu'agitée, il fut largement raillé par ses pairs mais cela ne l'empêcha pas de persévérer dans le populaire frénétique et de nous livrer, au mitan de sa production, cette perle adorablement aberrante qu'est Crime Au Bois De La Cambre.
Le roman s'ouvre sur la figure éculée (mais efficace) du cri qui déchire la nuit.
Un policier se précipite dans la direction du-dit hurlement et découvre alors un cadavre emprisonné sous une couche de glace et dont la tête aurait été arrachée par une explosion.
Dépêchés sur le lieu du crime, les enquêteurs officiels concluent, après maintes tergiversations, qu'il s'agit là d'un suicide par introduction d'une cartouche de dynamite dans la bouche.
"Il avait peur de se rater," explique le chef de la police judiciaire.
Le lecteur, qui vient d'encaisser dix pages d'explications scrupuleuses sur le pourquoi du comment de ce suicide impossible, se demande si il lit bien droit.
D'Arjac, par contre, garde son sérieux.
Son héros, Luc Mahor, sorte de Jerôme Fandor bruxellois, va bientôt entrer en scène et pour ce dernier, aucun doute ne subsiste, ce mystère est l'œuvre de Démonios, DÉMONIOS ! LE GÉNIE DU MAL !
"En êtes vous si sur, Luc ? Il y a à peine deux mois et demi que nous n'avons plus entendu parler de lui. Évidemment, la dernière fois que nous avons aperçu sa tragique silhouette, c'était dans un temple en flammes qui a dû s'écrouler sur lui...L'action quitte alors le bois de la Cambre pour se dérouler dans une grande demeure appartenant à de riches oisifs. Luc Mahor, son jeune assistant Bob Renan et les inspecteurs Léonard et Balthazar mènent l'enquête tandis que l'auteur multiplie les artifices.
Mais qui peut affirmer qu'il y était encore ? Qui nous dit qu'il ne rôde pas dans l'ombre à la recherche de nouveaux et sanglants forfaits ?
Un ombre qui rode dans la nuit, de nouveaux cris qui déchirent le silence et un poignard tibétain enduit d'un poison qui rend fou... on se croirait presque chez Leon Sazie ou H.J. Magog.
Malheureusement, les personnages (en dehors de nos héros et enqueteurs) ne sont que de simples ébauches sans profondeur, sans traits de caractère précis et sans mobiles valables. Du coup, la ronde des suspects et l'identité des coupables, intérêt primordial des romans d'énigme et autres mystères criminels, tourne court. Il n'y a pas d'implication.
Si les apparences sont superflues, le jeu devient superficiel.
Reste néanmoins une pièce de choix : Démonios, et sa silhouette "tragique," "angoissante," énigmatique." Démonios, le visage encagoulé sous un "cylindre flou," fomentant d'improbables plans de domination du monde dans un abri de jardin secret et ridiculisant, par ses actes et ses paroles, une société bourgeoise sans gloire ni honneur véritable.
"Démonios, avec ce mépris des lois qui le caractérisait, ne disait-il pas tout haut ce que Luc Mahor pensait tout bas ?"En fin de compte, Crime au Bois De La Cambre s'affirme comme une petite réussite drôlement bancale. Faux roman de détection doté de réjouissants accents fantastiques et d'une intrigue idiote, il a les qualités de ses défauts.
Ainsi, trahi par un certain manque d'ambition et assujetti au style Le Jury, il rate sa cible de loin, de très loin, mais retombe sur ses pattes en assurant un spectacle plus qu'amusant, car plein d'une folie contrôlée et imprégné de cette poésie du non-sens et de l'absurde qui caractérise si bien la littérature populaire sans peur et sans reproche.
5 commentaires:
Jamais entendu parler de ce gusse, merci pour la trouvaille. En plus le logo Le Vampire est mortel !
hop, vu que c'est un bouquin à jaquette, j'ai rajouté un scan de la couverture intérieure, avec la chauve souris du logo en plus gros :)
tu tues
Belle couverture (la première), avec une chouette police de caractéres je trouve, la chauve-souris est splendide aussi.
Et ton billet toujours aussi divertissant à lire.
merci artie.
à noter que le dessin de couv' restitue fidèlement le bois de la Cambre et son lac, qui gèle tous les hivers.
voila, c'était la minute informative :)
Enregistrer un commentaire