Escalofrio (ou Satan's Blood pour l'import vidéo US) est une des toute première production de Juan Piquer Simon, cinéaste espagnol mésestimé, spécialiste du divertissement de mauvais goût aux forts relents de serie Z. Chez nous, il est principalement connu pour Le Sadique à la Tronçonneuse, du gros charcutage drôle et débile, et Slugs, une histoire de limaces tueuses, adaptation d'un des premier numéro de la collection Gore du Fleuve Noir. Bref, un petit filou qui ne fait pas dans la dentelle - et ce n'est pas cette gentille bande d'exploitation poussiéreuse qui me contredira.
Escalofrio est sorti en 1977 - une affiche de la Guerre des Étoiles en atteste fièrement. Pour l'Espagne, deux années après la mort de Franco, c'est une période de transition politique assez confuse. Et cinématographiquement, ça se traduit par apparition de la catégorie "S" (pour sexo), soit plus de libertés quant aux sujets traités et une interdiction aux mineurs.
Dans Escalofrio, l'histoire d'un jeune couple victime des manigances d'une bande de satanistes sert principalement de prétexte à une suite de scènes érotiques, timidement sanglantes et à l'ambiance trouble. Ça ressemble à Rosemary's Baby en version cinéma de quartier à classification X pas vraiment mérité. Une combine assez courante à la fin des années 70, une époque où le mélange de thématiques religieuses et de nudité soft-core était le pain quotidien des productions européennes fauchées. Genre Nuda Per Satana ou Malabimba. Des films boiteux, fantasques et confus, qui, entre deux plans cul insérés pour rentabiliser la pellicule, cultivent l'illogisme et le laissé-aller scénaristique jusqu'à des niveaux vertigineux.
Par exemple, Andrès, le mari, laisse consciemment son trousseau de clefs dans sa voiture après avoir suivi un couple de parfaits inconnus (prétendant être des amis d'enfance) jusqu'à leur résidence secondaire, une baraque pas très rassurante isolée dans l'arrière pays ibérique. Tout ça pour y passer un charmant week-end sous le thème des rituels copulatoires satanistes avec sa femme enceinte de quatre mois - bien qu'elle arbore un ventre parfaitement plat de mannequin pour culottes sloggy. Mais ça ne fait rien : le nouveau né n'a rien à voir avec le développement ultérieur de l'intrigue.
Car, dans Escalofrio, rien n'a vraiment d'importance. Et rien ne fait vraiment sens. C'est un peu comme la scène d'ouverture, la messe noire avec une femme à forte poitrine qui se fait sacrifier par un barbu sataniste. Ou le maniaque qui rode dans la maison sans que personne ne s'en formalise, puis tente de violer la femme enceinte avant de finir dans la penderie poignardé par le gros barbu du début. Des pistes non-exploitées, oubliées avec quelques autres tout aussi surréalistes qu'idiotes. Quant à savoir si ce fut volontaire... aucune importance !
Car c'est l'absence totale de logique scénaristique qui fait tout le charme de ce film. On lui pardonne son rythme erratique, son absence de tension, ses fausses promesses concernant le gore et le sexe. En traitant ses personnages stupides et ses situations improbables avec un sérieux qui force le respect, Escalofrio devient proprement fascinant. Même son twist final, aussi prévisible qu'incohérent, est jouissif.
Bref. Ce n'est certainement pas un essentiel du catalogue de Mondo Macabro mais ça reste une petite curiosité très recommandable. Les amateurs d'eurotrash années 70 apprécieront.
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