WEEK-END ANGOISSE # 2 : DES ROBOTS ET DES MONSTRES A LA CAMPAGNE

LA NUIT DES TREPASSEES, JEAN MURELLI
FLEUVE NOIR ANGOISSE, 1967

Ce n'est pas très fréquent de voir un magnifique robot à l'ancienne s'afficher fièrement sur un Angoisse - et encore moins avec une poupée french-cancan dans les bras. Du grand Gourdon - la période dite du 'crâne' restant à ce niveau-là assez exceptionnelle.
C'est donc entierement motivé par ce visuel fortement psychotronique que j'y ai joyeusement investi quelques pauvres déniers.
Mais attention ! La Nuit des Trépassées n'est pas à consommer uniquement pour sa sublime couverture. C'est un Angoisse assez atypique, absurde, abstrait. Malgré quelques travers ruraux, on peut presque parler d'un Angoisse électronique.
"A quelques pas derrière lui, dans le hall, il y avait... une chose... un... une mécanique... une sorte d'être... Un robot, pour tout dire. Deux caissons d'acier simulant le corps et la tête. Des tubes articulés pour les jambes et les bras. Le robot classique, oui, illustré bien des fois dans des revues de vulgarisation scientifique, et qui n'aurait pas épaté un gosse de dix ans. Mais celui-là regardait!"
L'ensemble est très bateau - limite radio-commandé. L'histoire d'un jeune musicien de variétoche amoureux d'une pin-up enlevé par un savant-fou et son robot tueur. Mais Jean Murelli prend le risque de remplacer les superstitions campagnardes qui alimentent l'habituelle imagerie de la collection par une horreur froidement moderniste, faite d'automates en attaché-case et d'interminables bureaux déshumanisés rappelant le Playtime de Jacques Tati.
Le roman revêt alors un aspect très pop sixties, pas bien sérieux mais indéniablement charmant, s'épanouissant dans un long climax quasi-psychédelique (pour un Angoisse, s'entend...) où notre jeune musicien prend la pleine mesure de la mécanique de mort à laquelle il s'oppose.
On regrettera tout de même l'ajout des personnages du peintre et de ses amis brocanteurs, qui sous prétexte d'en être le fil rouge, parasitent l'intrigue jusqu'à un twist final assez inutile. Mais ça reste largement au dessus de la production Angoisse, toute époque confondue.
Et puis cette couverture...


UNE LUMIERE ENTRE LES ARBRES, ALPHONSE BRUTSCHE
FLEUVE NOIR ANGOISSE, 1974

Bon, roman suivant. Faut pas traîner, c'est dimanche. Soyons donc méthodique : Alphonse Brutsche, c'etait le pseudonyme employé par Jean-Pierre Andrevon pour la publication de ses premiers Fleuve Noir.
En fait, jusqu'à la fin des années 70, l'éditeur demandait à ses auteurs d'arborer un nom qui n'allait pas se retrouver dans les catalogues des concurrents. Ce qui donna Pierre Suragne pour Pierre Pelot ou Gilles Thomas pour Julia Verlanger. Et Andrevon, c'était Alphonse Brutsche, un pseudonyme très vieille france et avec lequel il signât trois Angoisse. La Lumiere Entre Les Arbres en est le dernier. Et c'est pas vraiment génial. C'est pas non plus mauvais, surtout pour du Angoisse en période terminale (numéro 253, le couperet se rapproche dangereusement).
Exception faite de quelques lourdeurs stylistiques comme cette horreur qui fait horreur, Andrevon écrit bien
. Mais son roman ressemble un peu trop à du club des cinq versant timidement dans l'épouvante. C'est bien trop gentil, avec très peu de moment de tension. Et, excepté un stupide homme-singe, personne ne meurt avant la page 190 ! Sur un roman de 215 pages qui se la joue survival, c'est pas très musclé.
Pour le reste, c'est la rencontre de quatre étudiants en vadrouille dans le Cantal et d'un jeune paysan pas très futé et se destinant à une carrière de CRS. Ils tombent dans le piège d'un Docteur Frankenstein local passionné par les greffes de cerveaux et les modifications corporelles sur des animaux. Et son assistant est une créature nommée Gort, comme le robot dans The Day The Earth Stood Still, le film de Robert Wise. Voila.
Ça reste tout de même amusant.

5 commentaires:

Kerys a dit…

J'ai plutôt un bon souvenir des Murelli que j'ai lus (mais pas celui-là !)

ROBO32.EXE a dit…

ah ben du coup, ce commentaire me donne envie de lire d'autres Murelli :)

Flint a dit…

Bizarrement, ce Murelli, acheté d'occasion chez un bouquiniste il y a une bonne vingtaine d'années, ne m'a pas transcendé. Sans doute parce qu'il relève finalement davantage de la science-fiction que de l'angoisse proprement dite et j'avoue ne pas être trop client de la collection Anticipation du Fleuve.

En revanche, j'ai bien aimé ce Brutsche même si l'on est loin d'un chef-d'oeuvre. Mais le thème classique du savant fou projeté dans la campagne française des années 70 n'est pas dépourvu de charme.
Du même auteur, j'ai apprécié Le Reflux de la nuit, roman à la thématique assez proche du futur Simetierre de S. King.

ROBO32.EXE a dit…

Hé didonc, d'ailleurs, une question, cher Flint... ne seriez-vous pas le Flint du site psychovision ?

Flint a dit…

Eh bien , non. Il s'agit là d'une malheureuse homonymie. Le pire, c'est que Psychovision faisant aussi partie de mes "favoris", j'ai lu maintes fois la prose de cet autre Flint. En fait,il s'agissait, en ce qui me concerne, d'un simple clin d'oeil au personnage incarné autrefois par James Coburn.